Intervention de Jean-Pierre Door
Réunion du 20 octobre 2010 à 9h30
Commission des affaires sociales
Jean-Pierre Door, rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail :Je savais que j'aurais ce débat avec vous, comme je l'ai eu en tant que rapporteur avec les représentants des acteurs concernés : caisses, Haute Autorité de santé, sages-femmes ou médecins. Je rappelle qu'il n'y a pas eu d'improvisation sur le sujet, puisque, depuis la mission périnatalité de 2005, un cahier des charges a été validé ; que notre but est d'offrir une alternative aux femmes qui préfèrent, aujourd'hui encore, accoucher à domicile ; enfin qu'il existe un corps de sages-femmes libérales qui donnent des consultations et suivent les femmes jusqu'à l'accouchement.
Le cahier des charges des maisons de naissance prévoit un réel encadrement. Les expérimentations, dont le nombre sera limité à cinq, seront décidées par le ministre qui n'autorisera l'ouverture d'une maison de naissance qu'à condition qu'elle respecte les normes de sécurité. Elle sera tenue par des sages-femmes libérales et n'accueillera que des patientes volontaires dont la grossesse ne présente aucun risque.
La maison de naissance devra en outre être située « à proximité immédiate » d'une maternité – c'est l'objet de l'amendement AS 327 –, comme les maisons médicales de garde des médecins libéraux, pour que le transport d'une unité à l'autre soit rapide. Elle devra être intégrée par une convention dans un réseau de périnatalité et son ouverture sera conditionnée à l'avis favorable des instances de l'établissement public ou privé concerné. J'insiste sur le fait que, pour sécuriser davantage le dispositif, elle devra être attachée à un centre hospitalier public ou privé et n'accueillera que des femmes dont la grossesse est sans risque, appréciation qui relève de la compétence et de la responsabilité des sages-femmes.
Même si vous êtes nombreux à souhaiter que nous travaillions encore sur le dossier, je vous demande de ne pas écarter d'emblée une expérimentation qui sera parfaitement encadrée et qui répond à une demande de la part des sages-femmes libérales et publiques. Je vous propose par conséquent de rejeter les amendements de suppression et d'en venir à l'examen de ceux qui ont été déposés sur l'article, en attendant éventuellement d'autres améliorations.
3 commentaires :
Le 24/10/2010 à 10:07, Marie Bombrun a dit :
Quelques questions qui n'ont pas été abordées :
1°) Y aurait-il une différence de « gentillesse/douceur » entre une sage-femme publique et une sage-femme libérale qui ferait que l'une est « mieux ou moins bien » que l'autre? Il ne s'agit même pas de compétences médicales! L'une et l'autre ont la même formation et il semble que les sages-femmes publiques aient davantage d'expérience en matière d'accouchement que les sages-femmes libérales qui pratiquent surtout les cours de préparation et la rééducation périnéale. Si les patientes souhaitent un accouchement moins médicalisé, n'est-il pas possible de répondre à leur demande au sein des structures puis de les laisser sortir très rapidement, et sans complication administratives dans les heures qui suivent la naissance? Vous noterez que des économies peuvent être réalisées si le séjour à la maternité est raccourci.La naissance faisant suite à une grossesse sans risque pourrait se faire "en ambulatoire" comme beaucoup d'actes chirurgicaux.
2°) Si la différence de "gentillesse:douceur" était consécutive à la trop grande charge de travail attribuée aux sages-femmes publiques, il serait correct de penser les délester avant de penser à leur "enlever" des collègues afin de satisfaire quelques femmes avec un accompagnement individuel.
3°) Si la sage-femme libérale est "plus gentille/plus douce", c'est certainement parce qu'elle dispose de plus de temps avec la même patiente. Ceci représente un coût et elle devra le facturer. En conséquence, il y aurait deux (ou plus) tarifications pour le même acte?
C'est parfaitement injuste dans un cadre de santé publique.
Je ne comprends pas quel sont vos objectifs.
Le 24/10/2010 à 14:43, Selina Kyle (Fondatrice du GRENN) a dit :
Bonjour Mme Bombrun,
Il ne s'agit pas d'une différence en termes de qualités humaines, mais d'une aptitude, guère enseignée à nos élèves sages-femmes, d'accompagnement des accouchements physiologiques (l'accouchement est systématiquement dirigé dans nos maternités, et "technicisé").
En outre, les sages-femmes libérales sont les seules à accompagner les patientes qui veulent accoucher hors structure hospitalière. Les sages-femmes travaillant en maternité sont quant à elles tout ça fait compétentes pour y encadrer des naissances physiologiques sous condition qu'elles aient le temps de rester auprès de leur patiente ! Car il y a bien un problème de démographie chez ces personnels de santé, criant, alarmant ! Vous aurez beau vous en offenser, on parle bien d'usines à bébés dans le milieu professionnel ! Avec des conditions de travail éprouvantes pour les sages-femmes !
En Angleterre, pour un nombre d'accouchement légèrement inférieur, on a deux fois plus de sages-femmes et deux fois moins d'obstétriciens qu'en France. Peut-on parler d'hécatombe chez les femmes et les bébés Anglais ? On meurt plus d'hémorragie du post-partum en France que dans n'importe quel pays d'Europe !
Je vous informe, Mme Bombrun, de ce que des sages-femmes françaises, malgré l'absence de couverture assurantielle qui vous indiffère toutes et tous dans l'hémicycle, au sein du gouvernement et des instances professionnelles, accompagnent déjà des naissances en plateau technique et à domicile. Elles sont entre 60 et 80 aujourd'hui, hautement compétentes !
Ce n'est pas parce qu'on travaille sur une chaîne de traitement industriel de la viande, avec l'aide de plein de machines ultra performantes et dans un milieu aseptisé, qu'on développe le même art qu'un boucher qui donne dans l'artisanat... Excusez cette comparaison qui en choquera plus d'un(e), mais elle n'est pas loin de la réalité... et surtout, elle exprime mon exaspération face aux personnes qui comme vous osent remettre en question le haut degré de compétence des sages-femmes libérales, sous prétexte qu'elles font moins d'actes...
Rares sont les sages-femmes hospitalières qui se sentiraient autant à l'aise qu'elles sans leur attirail technologique, de machines qui font "Ping !" pour prouver que bébé est toujours en vie : http://dechainees.cluster1.easy-hebergement.net/index.php?page=81f
Et si beaucoup de sages-femmes libérales ne font que du suivi de grossesse (vous l'avez oublié !!!), de la prépa et de la rééduc, c'est justement parce que dans notre beau pays, il leur est quasi impossible de travailler autrement ! On contraint des sages-femmes à ne plus faire d'accouchements ! Pressions des conseils de l'ordre régionaux concernant l'assurance (menace de 45 000 euros d'amende et de radiation !), refus d'offrir un accès à plateau technique, où alors sous des conditions financières et protocolaires inacceptables.
Savez-vous, Mme Bombrun, combien touche une sage-femme libérale pour un accouchement (comprenez parfois une bonne dizaine d'heures de présence - ou plus - et les visites dans les 7 jours qui suivent la naissance) ? Moins de 350 euros. Une autre façon de dissuader les sages-femmes à exercer leur Art de cette manière. Et quand on travaille en PT, il faut reverser une partie de ce qu'on a gagné à la maternité ! D'où des prix exorbitants pour les parents (dépassements d'honoraires), une vraie discrimination sociale... qui fera rigoler certains quand ils évoqueront la clientèle majoritairement "Bobo"...
Il serait bon de lâcher le mépris que l'on affiche pour les sages-femmes libérales ainsi que pour les femmes qui ne souhaitent pas accoucher à l'hôpital, tant que rien ne vient s'y opposer sur le plan médical.
La France est malade de sa politique ultra sécuritaire, même en matière de santé, de sa prétention et de son repli sur elle-même... Il suffit d'aller voir nos amis Allemands, Belges ou Suisse (c'est tout à côté !) pour savoir ce que c'est une Maison de Naissance, et comment ça fonctionne... Nous avons de moins bons résultats périnataux que bon nombre d'autres pays européens, malgré un accouchement "à la Française" des plus médicalisés qui soient...
Mais posons la seule vraie question : de quoi débattez-vous Mesdames et Messieurs les Députés ? Savez-vous ce que c'est une Maison de Naissance ? Y en a t-il un seul parmi vous qui sache m'exposer la différence entre ce projet de Maisons de Naissance (que vous défendez ou contre lequel vous votez) et un pôle physiologique ou un accès à plateau technique pour sages-femmes libérales ? Les deux dernières options, quoique peu développées existent déjà !!!
Moi je vois dans cette volonté d'ouvrir des structures hospitalières affublées de l'étiquette "Maison de Naissance", une odieuse manipulation politico-médiatique ! Donner l'impression, sur le papier, qu'on fait comme ailleurs, alors qu'on s'obstine à refuser une offre extra-hospitalière pour les femmes qui la souhaitent. On préfère qu'elles accouchent de manière plus ou moins inopinée, seules chez elles.... C'est juste révoltant que vos considérations personnelles ne puissent pas céder devant l'insistance, le dépit, l'amertume, la colère, l'exaspération, la souffrance et la détermination manifestée par les usagers depuis 30 ans !
L'accouchement à domicile et en Maison de Naissance doit faire partie de l'offre de soins, organisée de manière efficace, en collaboration respectueuse entre les sages-femmes libérales et les équipes hospitalières. Nos voisins savent le faire. Les Français, non. Pompeux jusqu'à la moelle, rongés par leurs certitudes, imbus d'eux-même, sourds et aveugles... Les femmes leur crient qu'elles accoucheront toutes seules si on ne met pas un personnel médical compétent à leur disposition, on fait comme si on n'avait rien entendu... On espère les ramener à l'hosto avec de fausses Maisons de Naissance... Vous nous prenez vraiment pour des Dindes...
http://dechainees.cluster1.easy-hebergement.net/index.php?page=q0f
Le 24/10/2010 à 04:37, Selina Kyle (Fondatrice du GRENN) a dit :
Monsieur Door,
Permettez-moi de vous faire remarquer que ce que vous évoquez, ça existe déjà ! Ce ne sont pas des Maisons de Naissance, mais des structures bâtardes qui en porteraient le nom et qui se situeraient quelque part entre le pôle physiologique (accouchement encadré par des sages-femmes en maternité) et l'accès à un plateau technique pour les sages-femmes libérales qui y accompagnent leurs patientes... Je suis trop épuisée (hélas !) pour détailler davantage mon propos (il est 4h36). Je vous renvoie vers mon site http://dechainees.cluster1.easy-hebergement.net/index.php?page=34f
A quoi bon travailler pendant des années avec des représentants d'usagers et des sages-femmes libérales (entre autres) si c'est pour refuser ce que nous demandons : des Maisons de Naissance comme il en existe 130 en Allemagne, où les femmes et les bébés se portent très bien...
Je précise que le dernier cahier des charges a été rejeté unanimement (pour des motifs différents) par les associations de sages-femmes, d'usagers, d'obstétriciens et d'anesthésistes...
Finissons en humour (peut-être plus parlant ?) et en vidéo http://dechainees.cluster1.easy-hebergement.net/index.php?page=12f
Les Maisons de Naissance sont une réponse appropriée à la demande de femmes qui souhaitent bénéficier des compétences d'un professionnel expérimenté pour une naissance hors milieu hospitalier.
Si les statistiques peuvent vous rassurer, en voici :
http://portail.naissance.asso.fr/StatistiquesHorsHopitalAllemagne
Et si cela vous laisse dubitatif, vous conviendrez qu'il sera toujours plus sûr qu'une femme accouche accompagnée par une sage-femme l'ayant suivie durant toute sa grossesse, plutôt que de se résigner à le faire seule, sans assistance médicale. Est-ce là ce que la France souhaite ?
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