Je tenterai de répondre de mon mieux au feu roulant de questions auquel vous m'avez soumise.
S'agissant de la répartition des gels budgétaires, 530 millions d'euros de crédits seront mis en réserve en 2011, dont 400 millions pour l'hôpital – je détaillerai ultérieurement la ventilation entre les fonds, car je n'ai pas encore tranché. 30 millions d'euros seront mis en réserve sur les dotations du Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS). Avec une dotation portée à 250 millions en 2011, son fonds de roulement sera de 45 millions fin 2011, ce qui permet de réaliser le gel sans difficulté.
Enfin, 100 millions d'euros seront gelés pour le médico-social. Les mises en réserve sur l'enveloppe « soins de ville » sont moins importantes, parce que les crédits sont d'une nature différente et que les autres fonds – le Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaire d'une part, le Fonds national d'action sanitaire et sociale, d'autre part – sont hors ONDAM.
Pour ce qui est de la responsabilité civile professionnelle des médecins, M. François Baroin et moi-même avons chargé M. Gilles Johanet d'une mission de concertation avec la profession pour définir les solutions possibles. Il ressort de son rapport que le relèvement du plancher de garantie comme celui du seuil de prise en charge des primes devraient être écartés car ils sont jugés inflationnistes ; que la mutualisation des risques exceptionnels entre les assureurs et l'ensemble des praticiens potentiellement concernés devrait être privilégiée et qu'une réécriture a minima de l'article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 pourrait être effectuée sans attendre les conclusions d'un rapport complémentaire. Aussi proposerons-nous par amendement de supprimer la condition d'insolvabilité du professionnel pour que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux intervienne sans action récursoire au-delà du plafond de garantie.
Nous avons confié à M. Johanet une deuxième mission tendant à mettre au point une méthode de mutualisation plus large et à élaborer un dispositif de solidarité entre plusieurs professions de santé. Cela consistera peut-être à modifier ce même article 44 en élargissant son champ à toutes les professions médicales, notamment les sages-femmes, et en prévoyant un mécanisme d'écrêtement pour les sinistres les plus graves. La solution envisagée permettrait de couvrir les sinistres compris entre le plancher de garantie et ce montant.
M. Jean-Pierre Door m'a interrogée sur le report au 1er janvier 2013 de la facturation directe des établissements de santé. Le cadre général posé par l'article 54 de la loi de financement pour 2009 reste d'actualité. Nous avons pris du retard, je le reconnais, mais la mobilisation est réelle. Le choix des établissements participants à l'expérimentation a donné lieu à un appel à candidatures et cent établissements se sont portés candidats. La première version du projet de décret concernant les modalités de l'expérimentation a été diffusée pour consultation début septembre. Nous en sommes à la finalisation du cahier des charges technique. Compte tenu du retard pris au démarrage, j'ai demandé une prolongation de l'expérimentation jusqu'à la fin de l'année 2012 ; C'est l'objet de l'article 37 du projet de loi.
J'en viens à l'évolution du reste à charge des ménages. Parmi les pays de l'OCDE, la France se caractérise par la part élevée de la richesse nationale qu'elle consacre aux dépenses de santé et par la faiblesse de la part de ces dépenses restant à la charge des ménages. Cette particularité est rendue possible, comme aux Pays-Bas, par le haut niveau de prise en charge publique et le rôle important joué par les organismes complémentaires. Par rapport à ses principaux partenaires, la France se situe dans le groupe de tête. Avec une dépense totale de santé égale à 11,2 % de son PIB en 2008, la France se trouve en deuxième position des pays membres de l'OCDE, derrière les États-Unis – avec lesquels les comparaisons sont sans signification étant donné l'ampleur des honoraires médicaux – et à un niveau supérieur à celui de la Suisse et de l'Allemagne.
Le financement de la dépense de santé fait intervenir quatre acteurs : la sécurité sociale, les organismes de protection complémentaire, l'État et les ménages. En France, la part de la dépense totale de santé restant finalement à la charge des ménages s'élève à 7,4 % : c'est un des taux les plus bas des pays de l'OCDE. Ce faible niveau du reste à charge s'explique par une prise en charge publique élevée – 78 % –, qui place la France très au-dessus de la moyenne des pays de l'OCDE. Ainsi, à financements publics sensiblement égaux, la France et l'Italie ont des restes à charge finaux très différents : respectivement 7,4 % et 19,5 %. Le rôle des organismes complémentaires est donc déterminant. En France, 94 % de la population est couverte par un contrat d'assurance complémentaire santé, et la puissance publique intervient de manière très substantielle dans l'accès à ces organismes complémentaires.
Vous avez également évoqué la situation de l'AP-HP et l'évolution de son budget. Il serait malhonnête de présenter les efforts de gestion demandés au plus grand groupe hospitalier européen comme la conséquence d'un désengagement de l'État, alors que les moyens qui lui sont alloués ont été en constante augmentation. Rien qu'en 2010, l'assurance maladie doit verser à l'AP-HP près de 37 millions d'euros de plus qu'en 2009 et près de 150 millions de plus qu'en 2008. Les évolutions que j'ai tenu à apporter à la tarification à l'activité en 2009 et en 2010 pour tenir compte davantage du niveau de sévérité des cas et de la précarité des patients ont été très favorables à l'AP-HP. En revanche, on rappellera que le passage à la tarification à l'activité a mis en évidence la surdotation de l'AP-HP par rapport aux autres hôpitaux du pays, y compris aux autres établissements de grande taille. Il est tout à fait légitime de réduire cet écart, qui ne se justifie pas.
Le rapport sur la convergence tarifaire a été transmis au Secrétariat général du Gouvernement, qui est chargé de le communiquer au Parlement : vous l'aurez donc d'ici peu.
Expérimenter des maisons de naissance ne signifie évidemment pas reconstituer sous une autre appellation de petites maternités dangereuses. Une convention sera passée entre chacune de ces maisons et le service de gynécologie-obstétrique de l'établissement de santé attenant. Les femmes qui accoucheront en maison de naissance devront ne présenter aucun facteur de risque connu et vouloir un accouchement physiologique. Ce profil correspond à celui des accouchements par voie basse sans complication avec une courte durée de séjour, qui représentent un peu moins de 1 % des accouchements. Des femmes sensibilisées à l'accouchement physiologique pourraient également s'inscrire en maison de naissance. Pour le moment, l'expérimentation ne concernera donc qu'un faible pourcentage de naissances, mais l'effet statistique sera néanmoins étudié.
Sur cette demande qui émane de certaines femmes, je ne porte pas de jugement de valeur. Les principaux éléments du cahier des charges ont fait l'objet d'un document issu d'une concertation réalisée en 2008 au sein de la Commission nationale de la naissance. L'adossement à une structure présentant toutes les garanties de sécurité est une condition sur laquelle nous ne saurions transiger.
Mme Edwige Antier m'a interrogée sur l'accord cadre sur les dispositifs médicaux. Cet accord est signé entre le Comité économique des produits de santé (CEPS) et les organisations représentants les industriels concernés. Le CEPS est informé des prix pratiqués par les industriels et il peut prendre attache avec les fédérations hospitalières. Il fixe les prix pour la liste ville et pour la liste en sus à l'hôpital. Pour les dispositifs médicaux utilisés à l'hôpital qui ne figurent pas sur la liste en sus, les établissements de santé procèdent à des appels d'offre. Dans ce cas, les prix ne sont pas fixés par le CEPS.
Non, monsieur Malherbe, on n'a pas atteint le « taquet » pour ce qui est des prix des médicaments. L'évolution est permanente, puisqu'il s'agit de sortir du remboursement ou de moins rembourser les produits jugés moins efficaces pour faire entrer sans arrêt de nouvelles molécules au remboursement – pour 300 millions d'euros chaque année. Pour autant, globalement la dépense de médicament ne diminue pas en France, ce que l'on peut regretter.
La négociation avec les pharmaciens d'officine se poursuit. Je leur ai indiqué qu'ils ont bénéficié cette année de l'impact positif de la réforme de la taxe professionnelle, pour 60 millions d'euros, et qu'il ressort des conclusions du rapport de l'IGAS sur l'expérimentation de la réintégration des médicaments dans le forfait de soins des EHPAD qu'elle doit être prolongée. Les représentants des officines comprennent, au regard de la situation budgétaire, que toute mesure de revalorisation doit être gagée. Je tiens à maintenir le maillage officinal dans les zones « sous-denses », et nous y travaillons.
Votre question, monsieur Lebreton, me permet de clarifier la mesure relative au forfait de remboursement pour les bandelettes d'autocontrôlé du diabète. Je tiens, en effet, à souligner que cette mesure ne concerne nullement les diabétiques insulino-dépendants, mais les malades atteints de diabète de type 2 non insulino-dépendant. L'assurance maladie a constaté que 10 % des patients atteints de diabète non insulino-dépendant de type 2 utilisent en moyenne 510 bandelettes par an, alors que la plupart des patients non insulinodépendants n'en consomment aucune. Pour éviter ces gaspillages, nous envisageons de forfaitiser le remboursement de bandelettes par patient et par trimestre. Ce forfait sera fixé par le CEPS sur les recommandations de la Haute Autorité de santé. Cela ne devrait pas poser de problème particulier, et nous attendons de cette mesure 35 millions d'euros d'économies en 2011 pour l'assurance maladie.
Mais, le traitement du diabète de type 2 doit aussi s'accompagner de mesures de prévention et d'éducation thérapeutique. Ainsi, les recommandations sur la prise en charge du diabète de type 2 s'accordent pour préconiser le dosage systématique, quatre fois par an, de l'hémoglobine glycosylée. Or, en 2008, 40 % seulement des personnes diabétiques suivies par des médecins traitants ont bénéficié de ces dosages. Pour améliorer ce suivi, la CNAMTS a introduit un indicateur concernant la prescription de dosage de l'hémoglobine glycosylée pour les patients diabétiques dans le contrat d'amélioration des pratiques individuelles qu'elle signe avec les médecins traitants. L'objectif escompté à trois ans est que 65 % de patients diabétiques bénéficient effectivement de ces trois ou quatre dosages dans l'année.
Il s'agit donc, vous le voyez, d'une maîtrise médicalisée de la dépense : rien ne sert d'utiliser des bandelettes inutilement alors que, dans le même temps, des examens utiles ne sont pas faits.
La situation financière des établissements de santé, contrairement à ce que l'on entend dire, s'est très significativement améliorée. Leurs comptes, qui avaient connu une lente dégradation jusqu'en 2007, ont montré en 2008 une inversion de tendance. En 2008, le résultat sur le compte de résultat principal s'est établi au niveau national, tous établissements confondus, à - 570 millions d'euros, contre - 686 millions d'euros en 2007. Les chiffres disponibles à ce jour pour 2009 – ils correspondant à 84,9 % des établissements représentant 93,7 % du budget des hôpitaux – confirment cette tendance à l'amélioration, avec un déficit évalué pour l'instant à environ 493 millions d'euros, soit 74 millions de moins qu'en 2008. Soixante-sept pour cent des établissements présenteront des comptes à l'équilibre ou en excédent à la clôture des comptes pour l'exercice 2009.
L'essentiel du déficit se concentre sur les CHR et les CHU, dont la situation financière s'est toutefois améliorée. Malgré cela, ils représentent à eux seuls plus de 80 % du total des déficits des hôpitaux. On regrettera que l'évolution globale ainsi décrite masque de très grandes disparités.