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Intervention de Charles de Courson

Réunion du 13 octobre 2010 à 9h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

…il nourrit un fort sentiment d'injustice. Enfin il pose un problème de cohérence avec nos engagements européens. Dans tous les États européens, à deux ou trois exceptions près, les dispositifs similaires d'imposition du patrimoine ont été supprimés, parfois par des gouvernements socialistes, le dernier en date étant le gouvernement espagnol. Le mécanisme que nous proposons, compensant la suppression de l'ISF par la création d'une nouvelle tranche de l'IR, s'inspire d'ailleurs de la solution du Parti socialiste ouvrier espagnol, le PSOE.

Permettez que j'ouvre une parenthèse pour parler de Maurice Allais, dont notre collègue socialiste a invoqué les mânes. Dans l'Impôt sur le capital, ce pur libéral se prononçait en faveur d'un petit impôt de l'ordre de 0,5 %, strictement proportionnel, afin de favoriser la mobilité des actifs et de pénaliser les mauvais gestionnaires de leur patrimoine, selon l'idée chrétienne que l'on n'est pas le propriétaire de ses biens mais que l'on doit les gérer en fonction de l'intérêt commun. Cependant, sa théorie était basée sur une idée fausse, la péréquation des taux de profit, qui n'existe pas dans un pays où les taux de rendement vont de 1,2 % pour le foncier, à 8 % sur les valeurs mobilières.

L'équilibre obtenu grâce à cet amendement ne l'est pas au détriment des revenus du travail. La suppression des 3,9 milliards de recettes de l'ISF sera compensée par la suppression du bouclier fiscal – 800 millions –, par une majoration de 7 points sur les plus-values mobilières et immobilières et sur les dividendes – 2,1 milliards – et par l'instauration d'une tranche marginale supplémentaire sur l'impôt sur le revenu. Les ménages concernés sont ceux dont le revenu fiscal est d'environ 100 000 euros par part, soit 300 000 euros pour un ménage avec deux enfants. Or, pour ces ménages très aisés, la proportion des revenus du patrimoine dans leur revenu fiscal est largement majoritaire.

D'après nos calculs, les 3,1 milliards d'euros de recettes fiscales proviennent à plus de 90 % de l'impôt sur les revenus du patrimoine. Le sens de cet amendement est précisément de substituer à un impôt sur le capital un impôt beaucoup plus juste sur les revenus du patrimoine.

Certains, en privé, nous donnent raison. Mais ils estiment que l'opinion publique ne comprendrait pas une telle mesure. Or une enquête publiée par le Monde montre que 19 % des Français sont favorables à une suppression de l'ISF, tandis que 54 % se déclarent pour une suppression du bouclier fiscal et que 47 % approuvent une suppression conjuguée des deux, accompagnée d'une augmentation du taux d'imposition pour les revenus les plus élevés – autant dire, l'amendement de Courson-Piron ! L'analyse par préférence partisane révèle que la part des personnes favorables à cette dernière mesure est sensiblement la même à droite – 46 % – qu'à gauche – 48 % –, les électeurs d'extrême-gauche étant 56 % à approuver notre proposition. Comme quoi les Français ont du bon sens !

Nous avons débattu de cette question hier à l'Élysée. Le Président de la République nous a affirmé qu'il n'y avait pas de tabou et qu'il souhaitait une grande réflexion sur l'ensemble de la fiscalité du patrimoine, après la publication du rapport de la Cour des comptes sur la convergence franco-allemande. Finissons-en avec le conservatisme professé par Hervé Mariton ! Que le pluralisme s'exprime ! N'oubliez pas qu'il s'agit d'un amendement d'appel, qui fait avancer le « schmilblick ».

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