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Intervention de François de Rugy

Réunion du 14 octobre 2010 à 9h30
Transparence financière de la vie politique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

N'en rajoutez pas, cher collègue !

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, je tiens à saluer l'initiative des collègues du groupe socialiste qui ont décidé d'utiliser leur niche parlementaire pour favoriser la transparence dans le financement de la vie politique. C'est une excellente chose quand on sait le mauvais climat qui règne dans notre pays. L'ère du soupçon est revenue peser sur les élus et sur la politique en général. Ce n'est ni sain ni souhaitable pour personne.

Je tiens d'ailleurs, comme d'autres collègues, même s'ils ont été plus sélectifs, à rendre hommage à toutes celles et à tous ceux qui, avant nous, lors de législatures précédentes, il y a déjà plus de vingt ans maintenant, ont jeté les bases de règles claires de financement de la vie politique et ont fait, en l'occurrence, le choix du financement public de la vie politique, et notamment du financement public des partis. C'était une bonne chose, même si cela a évidemment un prix. La démocratie a un coût, au demeurant modeste par rapport au budget de l'État. Je me permets d'autant plus de tenir de tels propos que j'appartiens à un petit parti – les Verts – qui n'a jamais rencontré de problème judiciaire quant à son financement. Certains esprits un peu taquins diront que c'est parce que nous sommes un parti encore jeune, qui n'a pas exercé beaucoup de responsabilités au niveau national. Mais, telle est la réalité : avoir peu de moyens est un choix. J'y reviendrai.

Je pense, pour ma part, qu'il convient de revenir sur les principes. Un principe simple a présidé à ces lois sur le financement public des partis : il fallait rendre les élus indépendants des forces de l'argent. Je sais que cette expression ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais je crois qu'elle reflète bien ce qu'il en est. Nous ne voulons pas qu'en France les élus soient dépendants parce que leur campagne électorale ou leur parti aurait été financés par des entreprises. D'où ce choix – qui ne date d'ailleurs pas de la première loi en la matière – d'empêcher le financement d'un parti ou d'un candidat par les personnes morales. Je mets dans le même paquet, si je puis dire, les grandes fortunes : il n'est pas sain d'instaurer une inégalité de traitement, non seulement entre les partis politiques, mais aussi entre les citoyens : certains d'entre eux, sous prétexte qu'ils disposeraient d'importants moyens financiers, pourraient influer beaucoup plus lourdement sur la vie politique. Heureusement que cela ne se passe pas chez nous comme aux États-Unis où l'on peut constater, mandat après mandat, à quel point ce lien de dépendance entre les entreprises, les grandes fortunes et les élus quels qu'ils soient, malheureusement, pèse sur la politique du pays.

Comme beaucoup d'autres, j'ai découvert l'existence de ces micro-partis, de ces partis individuels, comité d'action de M. Machin ou comité de soutien à Mme Truc, à l'occasion de l'épisode Woerth-Bettencourt. Et le plus grave, le plus choquant dans cette affaire, je l'ai dit dès qu'elle a commencé à être révélée, c'est que c'est une affaire de financement des partis, de financement de la vie politique et des campagnes électorales.

Je ne parle pas des accusations qui ont pu être jetées ici ou là sur des versements en argent liquide ; j'espère que tel n'est pas le cas et que la justice pourra faire toute la lumière sur ce point, comme elle pourra le faire, j'ai entendu M. Cazeneuve tout à l'heure, sur les conséquences dramatiques que de telles pratiques ont pu avoir à une autre époque avec l'attentat de Karachi. Je veux simplement souligner qu'il y a là, n'ayons pas peur des mots, un détournement pur et simple de l'esprit de la loi. La multiplication de ces micro-partis permet de se soustraire au plafond de 7 500 euros par personne et par an pour des dons à un parti politique. Il faut revenir à ce plafond et faire en sorte qu'on ne puisse pas le contourner. C'est, entre autres, l'objet de cette proposition de loi, que nous soutenons sur ce point.

Je ne pense pas qu'il faille forcément supprimer purement et simplement les micro-partis. Après tout, on peut faire de la politique à titre individuel ; je ne trouve pas cela très glorieux – je crois pour ma part à l'aventure collective en politique –, mais si quelqu'un ne se reconnaît dans aucun parti, pourquoi pas ? Mais créer un micro-parti pour contourner la loi, ça, c'est inacceptable.

Avec mes collègues écologistes, je soutiens cette proposition de loi et j'invite à mes collègues de la majorité à avancer ensemble. Nous avons l'occasion d'apporter une pierre supplémentaire à l'édifice de la transparence, la transparence de la vie politique mais, surtout, l'indépendance des élus de la politique à l'égard des forces de l'argent. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

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