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Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 11 octobre 2010 à 16h00
Régulation bancaire et financière — Discussion générale

Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi :

Je vais revenir rapidement sur un certain nombre de questions qui ont été posées ou d'observations qui ont été faites.

Je suis totalement d'accord avec M. Giscard d'Estaing pour considérer que la réglementation et l'encadrement des conseils en gestion de patrimoine seront une nécessité. Nous devons évidemment poursuivre les travaux de consultation, et je donnerai un plein soutien à une proposition de loi qui aurait pour objet d'encadrer cette activité.

Monsieur Perruchot, je vous remercie infiniment d'avoir rappelé l'ensemble des contributions positives de ce texte, son ampleur, son ambition aussi.

Pour la taxation bancaire, la France souhaite rejoindre le courant des pays européens qui, avec la Suède, l'Allemagne à partir du 1er janvier, la Grande-Bretagne à partir du 1er janvier, mettront en place par le biais de la loi fiscale un mécanisme de prélèvement sur les banques. Il aura pour objet non pas d'obtenir en quelque sorte réparation du coût pour le contribuable du plan de sauvetage des banques puisque ce dernier a en fait permis de récupérer au bénéfice de l'État et donc du contribuable français 2,4 milliards d'euros, mais d'inciter les banques à ne pas avoir un comportement systémique à risque. Ce dispositif sera examiné dans le projet de loi de finances.

J'en profite pour rappeler que la France soutient le mécanisme de contribution sur les transactions financières – je préfère parler de contribution plutôt que de taxation. Son champ d'application devra être le plus universel possible pour être vraiment efficace. C'est un combat du Président de la République, qui ne se contente pas de mots, qui met son discours en actes et essaie de convaincre l'ensemble de ses partenaires.

Monsieur Muet, vous avez évoqué une utile séparation entre les banques de dépôt et les banques d'investissement. Nous pouvons échanger des arguments. Moi, je ne suis pas convaincue de la pertinence du mécanisme. Il faut examiner avec honnêteté intellectuelle tout ce qui pourra assainir le tissu bancaire et conforter les banques dans leur activité de financeur de l'économie. Quand on regarde les banques ayant été à l'origine des difficultés financières que nous avons rencontrées à la fin de 2008, on s'aperçoit que des établissements comme Bear Stearns, Lehman ou Merril-Lynch étaient des banques d'investissement, qui n'avaient pas le modèle universel qui nous a probablement été plus utile que le leur dans la crise, et que Northern Rock, par exemple, qui n'a pas été non plus dans une situation très agréable, était, elle, seulement une banque de dépôt, qui faisait du refinancement des collectivités territoriales. Je ne suis donc pas convaincue que l'activité mixte, le modèle universel à la française ou à l'Europe continentale, soit particulièrement néfaste et susceptible d'être blâmé.

On peut regarder avec intérêt un dispositif du type de celui qui a été recommandé par M. Volcker, dont on retrouve des éléments dans la loi Dodd-Frank, qui consiste à demander aux établissements de faire leurs opérations de trading pour compte propre dans des structures spécifiques sans mélanger les genres, mais je ne pense pas, et j'essaie d'être le plus honnête possible intellectuellement, sans esprit partisan, ce qui n'est pas de bon aloi dans un tel débat, qu'une séparation entre banques d'affaires et banques de dépôt soit le remède au problème systémique auquel nous avons été confrontés.

Sur la pertinence de certaines politiques budgétaires ou des politiques monétaires que nous voyons à l'oeuvre, en particulier aux États-Unis, j'ai moi aussi des interrogations.

Monsieur Brard, vous prétendez que nous appliquons les recettes du passé dans une période de crise qui, nous sommes tous d'accord, a été extrêmement grave. J'ai le regret de m'inscrire en faux contre ce que vous dites parce que nous n'avons pas juste utilisé les vieilles recettes du passé.

Quand on crée le médiateur du crédit, qui, je vous rejoins, madame Grosskost, a été extrêmement utile et dont le Président de la République a souhaité le maintien, même si certains effets de la crise ont pu s'estomper, pour qu'il continue à servir d'intermédiaire entre le tissu économique et le secteur bancaire, quand on invente le fonds stratégique d'investissement, la société de financement de l'économie française, la société des prises de participation de l'État, ce n'est pas de la routine, vous avez d'ailleurs vous-mêmes très activement participé à la création de cette oeuvre législative. Ne nous dites donc pas que nous sommes simplement en train de rabâcher et d'utiliser les vieux rossignols du passé.

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