Nous vous remercions de nous recevoir et d'entendre nos observations sur le projet de budget du ministère de la défense pour 2011.
Tout d'abord, nous nous devons de dénoncer la minceur des éléments que nous a transmis le ministère de la défense. Alors que des dossiers relativement complets nous étaient auparavant remis par la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD), nous devons cette année nous contenter de cinq pages de présentation succincte. Plus la situation du ministère s'aggrave, plus nous sommes confrontés à des restrictions budgétaires et moins nous avons le sentiment d'être respectés et écoutés en tant que représentants des personnels civils.
Quoi qu'il en soit, nous pouvons d'ores et déjà mettre en évidence plusieurs éléments qui ne sont pas rassurants quant à la volonté du ministère de rééquilibrer les effectifs des militaires et des civils sur les fonctions de soutien. Bien que le ministre se soit engagé à respecter une répartition des suppressions d'emplois entre les militaires et les civils, à hauteur de 75 % pour les premiers et de 25 % pour les seconds, nous constatons, pour la deuxième année consécutive, que la part des emplois de personnels civils supprimés est de 30 % environ, et ce alors même que les effectifs civils sont passés de 145 000 à 72 000 personnels en douze ans.
Par ailleurs, alors que nous ne connaissons toujours pas les référentiels en organisation des bases de défense et que certaines informations en provenance des établissements ne sont pas de nature à lever nos craintes, nous pouvons estimer les effectifs de personnels civils autour de 70 000 en 2010. Compte tenu des réductions et du financement toujours inférieur au plafond d'emplois autorisé (PMEA), ils devraient se situer autour de 68 000 à la fin de l'année 2011. Il faudra nous expliquer comment, dans ces conditions, le ministère compte renforcer l'emploi de personnels civils dans les fonctions de soutien.
Si nous ne devions aborder que la question des postes à responsabilité au sein des bases de défense, nous dénoncerions le projet du ministère qui n'envisage de ne confier que sept postes à des civils sur les 102 postes de chef ou adjoint de groupement de soutien des 51 bases de défense ; nous devrions remercier le ministère d'une telle générosité ?
Comment, dans ce contexte, ne pas aborder la question cruciale de l'externalisation ? À plusieurs reprises, nous avons marqué fermement notre opposition aux mesures d'externalisation qui ont pour seul but de supprimer de l'emploi public et qui rajouteront des milliers de suppressions d'emplois aux 54 000 déjà prévues par le plan en cours.
Sur le projet RHL-l (restauration, hébergement, loisirs), concernant huit sites, nous avons pu démontrer au ministère de la défense que les économies réalisées ne seront pas au rendez-vous alors même que le ministre ne manque de rappeler qu'elles conditionnent sa décision. En effet, et sans entrer dans les détails du dossier, nous avons apporté la preuve qu'une régie civilianisée et optimisée coûtait environ 5 millions d'euros de moins qu'une prestation externalisée.
Le ministre s'apprête pourtant à valider la mesure d'externalisation, donnant raison à certains membres de son cabinet pour lesquels l'externalisation est un dogme. Contrairement à ce que l'on entend en ce moment, l'irresponsabilité et les positions dogmatiques ne se trouvent pas toujours du même côté !
À ce sujet, nous portons à votre connaissance le point du rapport de la mission partenariat public-privé du ministère, où il est précisé que les personnels militaires sont disponibles sur leur poste de travail 1 000 heures sur 1 600, compte tenu des contraintes de leur statut (sport, tours de services, etc.). Cela n'est pas une critique gratuite, mais seulement la confirmation de ce que dit Force Ouvrière depuis des années. Nous laissons cela à votre sagacité. Puisque le ministère de la défense en fait état, il n'y a pas de raison de ne pas se saisir de tels éléments pour engager une vraie politique de civilianisation, susceptible de réaliser des gains importants pour la nation.
Le projet de budget pour 2011 présente une augmentation relativement importante de la part allouée aux mesures catégorielles, ce dont nous pourrions nous réjouir si nous faisions preuve d'une naïveté déconcertante. Mais comment peut-on décemment nous présenter ces chiffres comme une avancée sans précédent pour les personnels civils alors que, dans le même temps, il est décidé de geler les traitements des fonctionnaires et de suspendre les décrets salariaux des ouvriers de l'État ?
En d'autres termes, ce sont les personnels civils qui financent leurs mesures catégorielles d'autant plus que les efforts du ministère sont inférieurs à l'économie de 30 millions d'euros dégagée par le gel des salaires. Je vous engage à rapprocher ces chiffres de ceux de 2010, lorsque 25 millions d'euros supplémentaires étaient consacrés à la revalorisation de la condition des personnels militaires, ce qui s'est traduit par une augmentation de la solde mensuelle des capitaines de l'ordre de 350 euros.
Nous ne remettons pas en cause les mesures en faveur des militaires, mais nous ne voyons pas pourquoi ce qui est possible pour une composante de ce ministère ne le serait pas pour l'autre.
À ce titre, nous ne pouvons passer sous silence la future suspension des décrets salariaux des ouvriers de l'État, socle de leur statut. Alors que le climat dans les établissements se durcit face aux difficultés croissantes liées aux restructurations, le ministère de la défense prenant à sa seule charge la moitié de l'effort de la révision générale des politiques publiques (RGPP) en la matière ; alors que les inquiétudes sur les retraites sont palpables, ce ministère prend le risque d'en rajouter en touchant à l'un des acquis sociaux auxquels les personnels sont le plus attachés. Force Ouvrière rejette cette décision et mettra tout en oeuvre pour faire échec à cette attaque supplémentaire envers les personnels civils, plus particulièrement envers les ouvriers de l'État.
Nous avons brossé en quelques traits les grands sujets que nous souhaitions aborder. Force Ouvrière est une organisation viscéralement attachée aux principes républicains, comme, nous en sommes persuadés, vous toutes et tous qui nous écoutez. Nous ne sommes ni des opposants politiques ni des co-décideurs de la politique de défense de la France. C'est en vertu de ces principes que nous vous demandons de prendre en compte nos observations.