La Cour partage les observations de la MECSS sur les nécessaires progrès de gestion à accomplir. Ceux-ci se poursuivent cependant, notamment pour la productivité de la branche maladie. Année après année, nous continuons à les surveiller et à aiguillonner les organismes, en attirant si nécessaire l'attention de la représentation nationale.
Monsieur Jacquat, la nouvelle étape que vous évoquez en matière de distinction entre contributif et non contributif fait référence, plutôt qu'au rapport de la Cour sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, notamment à son article 56. Il ne m'appartient pas de formuler d'appréciations sur un texte qui sera bientôt discuté par le Parlement.
Le FSV a pour mission de financer la partie des avantages non contributifs ne devrait pas reposer sur la solidarité professionnelle, autrement dit celle qui est liée aux avantages familiaux et au chômage. Cela dit, bien des avantages non contributifs restent financés par la solidarité professionnelle, le plus souvent de manière implicite. Nous l'avons montré dans le passé, en présentant les règles relatives à la durée d'assurance. Pour ne citer qu'elle, la règle dite des « 200 SMIC horaire », qui permet de constituer un trimestre de retraite même avec une faible activité, est favorable au temps partiel. Le minimum contributif est un autre élément fort de cette solidarité implicite. Son coût avait été évalué dans le rapport sur la sécurité sociale de 2008 à 4,7 milliards d'euros pour le régime général et la Mutualité sociale agricole. Sans actualiser ce chiffrage, le projet de loi de financement fixe un montant forfaitaire correspondant aux recettes supplémentaires apportées par le dispositif nouveau. En réalité, plus que de la décision de principe, ce dispositif relève quelque peu du « système D ». La majoration des charges et produits du FSV, pour environ 3,5 milliards d'euros, confirme cette analyse. Il n'est pas remédié au caractère structurel du déficit du FSV, qui atteindra plus de dix milliards d'euros pour les trois prochaines années. Qu'il doive être repris par la CADES n'empêche pas la Cour de s'en préoccuper. Nous devrons aussi vérifier ultérieurement la réalité de l'accroissement des produits.
Madame Pinville, la branche famille a été longtemps équilibrée, voire excédentaire. La dégradation qu'elle connaît ces dernières années n'est pas comparable à celles qu'ont connues les branches maladie et retraite. La Cour évalue le déficit à 1,83 milliard d'euros pour 2009, 2,6 milliards pour 2010 et 3,2 milliards – en tendance – pour 2011. Selon le Haut Conseil de la famille, l'évolution tendancielle de la branche conduirait à un équilibre en 2017, les recettes évoluant plus rapidement que les prestations. Après cette date, l'affectation des excédents aux déficits cumulés antérieurement permettrait d'assurer en 2024 un équilibre global du régime sur la période 2008-2024, l'excédent annuel à partir de 2024 étant de 6,7 milliards d'euros.
Plusieurs pistes théoriques sont envisageables pour assurer un meilleur équilibre de la branche. La non revalorisation des prestations générerait 500 millions d'euros d'économies par an. Eu égard aux difficultés qu'elle poserait en termes de justice sociale, nous ne la recommandons pas.
L'une des causes essentielles de cette dégradation est le nombre croissant des transferts de la CNAF vers le FSV, afin de compenser les avantages de retraite non contributifs accordés aux parents. Nous ne recommandons pas non plus une évolution qui dégraderait encore la situation de la branche vieillesse.
Dans le rapport sur la sécurité sociale de 2007, la Cour avait proposé comme nouvelles recettes possibles l'assujettissement des prestations familiales à l'impôt sur le revenu, assorti d'un transfert des sommes perçues de l'État vers la branche famille. Pour une assiette de 40,7 milliards d'euros, le produit de cette mesure peut être estimé, en première approche, à 2,8 milliards d'euros, soit l'équivalent du déficit actuel de la branche. La fiscalisation de la majoration de pension pour les assurés ayant eu trois enfants ou plus pourrait apporter un gain supplémentaire de 500 millions d'euros. Enfin, la Cour proposait de réexaminer les demies parts fiscales dérogatoires attribuées dans le cadre du mécanisme du quotient familial. Nous considérons que certaines de ces prestations – notamment le complément pour libre choix du mode de garde, inclus dans la prestation d'accueil du jeune enfant – doivent être davantage mises sous condition de ressources. Certaines prestations facultatives d'action sociale pourraient aussi être recentrées sur les aides essentielles. Ces opérations de fiscalisation et de mise sous condition de ressources permettraient de dégager les sommes nécessaires pour mettre fin au déficit de la branche famille.
Lors de la création du RSA, il a été prévu d'adjoindre à son volet financier un accompagnement de ses bénéficiaires. Le dispositif, complexe, repose en premier lieu sur une nouvelle allocation, l'allocation personnalisée de retour à l'emploi. Cette aide est attribuée au cas par cas pour répondre à des besoins précisément identifiés et lever les obstacles à la reprise d'emploi. Elle peut ainsi prendre en charge une partie des coûts qui lui sont associés : mobilité, garde d'enfant, examen du permis de conduire par exemple. En particulier, elle peut être proposée aux membres d'un foyer dont les ressources sont inférieures au montant forfaitaire du RSA et qui perçoivent des revenus d'activité inférieurs à 500 euros par mois ; en contrepartie des prestations reçues, ces personnes sont tenues de rechercher un emploi ou d'entreprendre des démarches et actions favorisant une meilleure insertion professionnelle.
Les conseils généraux devaient conclure une convention d'orientation et d'accompagnement définissant les modalités de prises en charge des bénéficiaires du RSA, ainsi qu'un pacte territorial d'insertion réunissant l'ensemble des acteurs dont la coopération est indispensable pour la mise en oeuvre des programmes départementaux d'insertion. En mars 2010 – lors de l'achèvement des investigations de la Cour sur les familles monoparentales –, dans un grand nombre de départements, les conventions d'orientation et d'accompagnement étaient toujours en cours d'élaboration. Autrement dit, leur élaboration est en retard. De ce fait, nous n'avons pas été en mesure d'évaluer les dispositifs d'accompagnement développés dans le cadre du RSA. Nous le regrettons : leur déploiement mériterait d'être étudié avec attention. Nous regrettons aussi que le dispositif prévu par la loi du 23 mars 2006, qui instaure pour les bénéficiaires du RSA une priorité d'accès aux modes d'accueil des jeunes enfants, même s'il a été repris dans la convention d'objectif et de moyens de la CNAF, n'ait pas fait l'objet d'un suivi. La Cour est prête à y travailler, pour peu qu'elle dispose des éléments nécessaires.
La Cour a également recommandé d'engager une réforme de l'allocation de soutien familial (ASF), afin notamment de mieux définir la notion de « hors d'état » et d'expérimenter une ASF différentielle pour les petites pensions. La majoration du plafond de l'allocation de rentrée scolaire (ARS) irait selon nous dans le bon sens : elle contribuerait à cibler les aides sur les familles qui en ont le plus besoin, notamment les familles monoparentales. La Cour n'a cependant pas recommandé formellement cette mesure. Nous demandons, en effet, un effort parallèle de mise en ordre des divers dispositifs de majoration des plafonds de ressources déjà prévus pour d'autres prestations. Le nombre de familles monoparentales bénéficiant d'un plafond majoré n'est pas connu. Les majorations varient de 20 à 30 % selon les prestations et les configurations familiales. Cette complexité réclame donc un examen attentif.
Madame Poletti, c'est le directeur de la CNSA qui a exprimé le souhait que les comptes de cette caisse puissent être certifiés par la Cour des comptes. Cette dernière ne devant pas faire concurrence aux commissaires aux comptes privés, une disposition législative serait nécessaire pour cela. Cette nouvelle mission aurait aussi l'inconvénient d'amener la Cour à réexaminer des crédits qui sont en réalité gérés par les Caisses primaires d'assurance maladie. Un recours aux commissaires aux comptes du secteur privé serait donc préférable, quitte à ce que nous exercions ensuite notre contrôle à partir de leurs travaux.
La Cour a publié en novembre 2005 un rapport public thématique sur la prise en charge des personnes âgées dépendantes. Le suivi particulier qu'elle y a consacré a ensuite été retracé dans le rapport annuel de février 2009. La réforme annoncée n'étant pas connue dans ses détails, je me bornerai à espérer qu'elle s'inspirera des recommandations que la Cour a faites en 2005 et reprises en 2009.