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Intervention de Étienne Pinte

Réunion du 7 octobre 2010 à 15h00
Immigration intégration et nationalité — Article 49, amendement 154

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉtienne Pinte :

Cosigné par mes collèguesFrançoise Hostalier etNicole Ameline, cet amendement vise à supprimer, à l'alinéa 2, les mots suivants : « soit d'un arrêté de reconduite à la frontière pris moins de trois ans auparavant en application de l'article L. 533-1, ». Dans sa rédaction actuelle, cet alinéa permettrait de reconduire à la frontière une personne vivant régulièrement sur le territoire et exerçant un emploi sans autorisation, y compris un ressortissant communautaire, et même lorsqu'il se trouve en France depuis moins de trois mois. Cette même mesure pourrait être édictée à l'encontre d'un ressortissant d'un pays tiers même s'il se trouve encore dans le délai de validité de son visa – ou depuis moins de trois mois s'il en est dispensé.

D'une part, si la notion de menace de trouble à l'ordre public est laissée à l'appréciation des juridictions nationales, elle est strictement encadrée par le droit communautaire. L'article 27 de la directive 200438 précise ainsi que « les mesures d'ordre public ou de sécurité publique doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l'individu concerné. L'existence de condamnations pénales antérieures ne peut, à elle seule, motiver de telles mesures. Le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. Des justifications non directement liées au cas individuel concerné ou tenant à des raisons de prévention générale ne peuvent être retenues ». À titre d'exemple, selon une jurisprudence constante, l'occupation illégale d'un terrain sans caractères particuliers ne constitue pas une menace de trouble à l'ordre public susceptible de fonder un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière – je renvoie notamment à la décision de la cour administrative d'appel de Versailles du 28 avril 2009.

D'autre part, le droit communautaire assortit de garanties de procédure les mesures d'éloignement à l'encontre des ressortissants communautaires. L'article 28 de la directive 200438 protège ainsi certaines catégories contre la notification d'une mesure d'éloignement motivée par la menace de trouble à l'ordre public : l'administration doit prendre en compte les éléments personnels de l'intéressé comme la durée du séjour, l'âge, l'état de santé, la situation familiale et économique, l'intégration sociale et culturelle dans l'État membre d'accueil et l'intensité de ses liens avec le pays d'origine. De plus, contrairement aux mesures d'éloignement de droit commun, les mesures d'éloignement prises à l'encontre de ressortissants communautaires doivent prévoir le délai de départ volontaire d'un mois – l'arrêt du 13 janvier 2010 du Conseil d'État considère que la décision de reconduite à la frontière d'un ressortissant communautaire doit, sous peine de nullité, indiquer ce délai.

Par ailleurs, l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière prévu à cet article est assorti d'une interdiction d'entrée sur le territoire français pendant trois ans. Cette décision ne pourrait faire l'objet d'aucun recours et serait automatique, ce qui équivaudrait à une interdiction de retour sur le territoire français. Or selon la directive « retour », une telle interdiction ne peut être applicable qu'aux ressortissants des pays tiers et non aux ressortissants communautaires.

(L'amendement n° 154 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

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