Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Mathieu Gallet

Réunion du 6 octobre 2010 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Mathieu Gallet, président-directeur général de l'Institut national de l'audiovisuel, INA :

L'INA travaille déjà avec le ministère de l'Éducation nationale. Le concours du ministère nous a été apporté, il y a quelques années, pour la création des « jalons pour l'histoire du temps présent » ; ces jalons sont disponibles sous forme de fresques multimédias sur le site ina.fr. Cela fait partie de mes projets d'accroître leur visibilité pour retrouver aisément cet ensemble qui regroupe un millier de documents mis en ligne en matière de relations internationales depuis 1919. À chaque document audiovisuel répond un document écrit. C'est ce que l'on appelle du « rich media » aujourd'hui et le visionnage est gratuit.

Un certain nombre de régions comme Provence-Alpes-Côte d'Azur et la délégation de Marseille sont des exemples de collaboration avec la région et le département, sur la base d'une convention, pour apporter des fonctionnalités avancées sur ces jalons qui permettent aux enseignants de l'utiliser ; 1 000 collèges et lycées sont ainsi abonnés au service C'est un exemple à développer ailleurs.

S'agissant de la plate-forme de cinéma opérée par France Télévisions autour de deux cents chefs-d'oeuvre, cela pourrait nourrir la nécessaire réflexion sur une démarche inspirée des mêmes principes et centrée sur l'audiovisuel.

M. Rogemont a parlé du « bel héritage » que je trouve à mon arrivée à l'INA. J'en conviens, mais je souhaite toutefois tempérer ce constat. Certes l'INA se porte bien, il s'est modernisé, sa situation est à l'équilibre en dépit de la hausse modeste de la redevance. Il convient toutefois de rester attentif à l'évolution de nos ressources propres, dont nous sommes les plus dépendants de toutes les entreprises de l'audiovisuel public. En 2008 et 2009, nous avons ressenti très fortement la baisse des commandes liée à la crise du marché publicitaire. La création de nouveaux écrans nous ouvre des opportunités, mais le marché traditionnel est encore convalescent. S'agissant de notre chiffre d'affaires dans le domaine de la formation, la situation se complique dans le contexte de la réforme des financements du Fonds d'assurance formation des secteurs de la culture, de la communication et des loisirs (AFDAS). Notre objectif de ressources tirées de la taxe d'apprentissage sera sans doute difficile à atteindre.

L'équilibre entre nos ressources propres et les ressources publiques, respectivement d'un tiers et de deux tiers, doit être préservé. L'investissement dans la formation doit nous permettre d'augmenter notre chiffre d'affaires, qui s'élève dans ce domaine à environ 8,5 millions d'euros.

Ces formations sont financées par des organismes tels que l'AFDAS. Certes elles constituent un coût pour les entreprises, pour autant la preuve de notre spécificité dans ce domaine n'est plus à faire. Nous proposons 270 stages professionnels sur notre catalogue et nous offrons six nouvelles formations liées à la « 3D ». Il nous faut maintenir des contacts réguliers avec le marché afin d'adapter notre offre et répondre aux attentes de nos clients.

S'agissant de notre ouverture au grand public, le site ina.fr fait d'ores et déjà de nous, pour partie, un diffuseur de contenu. Il faut dès lors se poser la question des limites au-delà desquelles la mise à disposition de notre fonds viendrait concurrencer les diffuseurs. Ces limites sont fixées par la loi et chacun doit rester dans son rôle. Mon prédécesseur était à l'origine d'un projet de chaîne INA payante, en partenariat avec Canal Satellite. Ce projet n'a pas abouti, et je ne suis pas sûr de vouloir le reprendre là où il s'est arrêté en 2008. Peut-être faut-il le repenser dans le contexte du développement des télévisions connectées.

Je me félicite à cet égard que nous soyons l'un des trois diffuseurs français, avec TF1 et Dailymotion, à proposer un « widget » sur les télévisions connectées de Samsung, Toshiba et LG. Nous sommes également en pourparlers avec Sony. Cela s'inscrit dans la continuité de notre site ina.fr

Je pense d'ailleurs qu'il faut concevoir notre offre de diffusion d'une manière globale intégrant internet, les télévisions connectées, les tablettes numériques. Si l'on doit envisager une diffusion en continu, il nous faudra en tout état de cause un partenaire puisque la diffusion gratuite, ne correspondant pas à nos missions, n'est pas à l'ordre du jour.

On m'a demandé comment nous nous allons faire pour capter l'internet. Notre mission, telle qu'elle devrait être définie dans le décret sur le dépôt légal des contenus internet, consiste à capter les sites liés à l'audiovisuel. Notre technologie nous permet de répertorier 6 000 sites. Nous avons procédé à une répartition avec la Bibliothèque nationale de France, et nous nous chargeons des sites institutionnels, des sites des chaînes et des sites des programmes.

S'agissant des investissements d'avenir qui pourraient contribuer au plan de sauvegarde et de numérisation (PSN), les moyens correspondant ne sont pas inscrits dans notre COM. Pour ce qui est de la sauvegarde du fonds RFO, il convient sans doute de ne pas attendre le prochain COM. C'est la raison pour laquelle ce sujet fait l'objet d'un dossier dans le cadre du grand emprunt que nous présenterons prochainement au Commissariat général à l'investissement. Ce fonds peut être rentable car lié au fonds existant et pourra être remboursé, même si ce sera sans doute sur une période assez longue. 2011 étant l'année des outre-mer en France, il serait dommage que l'INA ne puisse répondre à cette mission patrimoniale et de préservation.

M. Douillet m'a interrogé sur le rayonnement international de l'Institut. Le choix d'une séparation entre diffusion d'une part et archives et formation d'autre part, qui en 1974 a présidé à la création de l'INA, constitue un modèle assez unique. À la BBC ou à la RAI, deux opérateurs pourtant très actifs dans le domaine de la numérisation des fonds d'archives, l'archivage n'est pas une priorité. Nous avons de notre côté réussi à faire de cette activité un centre de profit. Notre expertise explique que l'on nous confie bien souvent des fonds entiers. Nous avons fait des émules, récemment en Pologne, où nous avons été sollicités afin de mener des actions de formation, ou en Belgique francophone. La Fédération internationale des archives de télévision ne compte pas moins de 180 pays, mais nos interlocuteurs sont le plus souvent les directeurs des archives des diffuseurs. Je pense tout de même que l'international constitue pour nous un axe de développement. Nous travaillons d'ores et déjà avec l'Afrique subsaharienne et l'Afrique du Nord, notamment le Maroc et l'Algérie, et nous souhaitons opérer un rapprochement avec la Tunisie. Nous collaborons également avec le Moyen Orient, par exemple avec Abu Dhabi.

Nous ne jouissons pas d'une grande notoriété, mais dispenser des formations nous donne des occasions de nous faire connaître par l'intermédiaire de nos stagiaires étrangers. Les formations peuvent en effet donner lieu par la suite à des missions d'expertise à l'étranger.

Nous devons aller plus loin dans la gestion de fonds pour le compte de tiers, et l'un des projets que nous avons présentés dans le cadre du grand emprunt vise précisément à développer une offre de services que nous avons pu mettre au point en interne, notamment des services informatiques, qui pourraient être présentés sous forme d'une plateforme exploitée avec un partenaire.

Pour ce qui est de la production, nous réalisons entre 60 et 70 films par an et compte tenu des moyens humains dont nous disposons, je considère que c'est déjà beaucoup. Toute augmentation du chiffre d'affaires supposerait une augmentation des charges, il faut donc trouver le juste équilibre financier, mais également le juste équilibre avec nos partenaires privés, notamment en veillant à ne pas entrer en concurrence directe avec eux.

S'agissant de l'idée d'un festival du film historique, je pense qu'il s'agit en réalité d'un marché de niche. Il convient d'être présent sur les grands marchés généralistes, plus porteurs, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai participé au MIP de Cannes. Je n'abandonne pas pour autant l'idée d'un festival ou d'un lieu d'exposition et plusieurs pistes peuvent être explorées, notamment celle de la future Maison de l'histoire de France.

L'élargissement du dépôt légal a été évoqué. J'ai cité l'exemple de Limoges, oubliant qu'il est toujours périlleux de prendre un exemple, surtout devant des parlementaires de la Haute-Vienne ! A été évoqué le développement des délégations en région ; nous en avons six, je ne souhaite pas que nous en ayons davantage compte tenu du coût que cela représente. Pour autant, je suis favorable au développement des points de consultation du dépôt légal à travers les médiathèques municipales ou les bibliothèques universitaires.

Par ailleurs, nos rapports avec les départements s'agissant de la formation et de la diffusion des outils pédagogiques sont fructueux et cela me parait une très bonne idée de réfléchir avec les villes d'art et d'histoire sur les projets que nous pourrions mener en commun.

Nos délégations régionales sont de petits INA en région. Historiquement, nous sommes liés aux stations régionales de France 3 et nous en conservons les fonds, nous les numérisons, nous les restaurons, nous les valorisons, notamment avec les institutions culturelles et, plus difficilement, avec les rectorats.

M. Pajon m'a interrogé sur notre localisation dans l'Est parisien. Les diffuseurs et les producteurs sont à l'ouest, les tournages se font au nord, et hormis la SFP, nous sommes, c'est vrai, un peu isolés à l'est. Nos liens avec le pôle de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) de l'université Paris-Est sont assez ténus et j'ai rencontré récemment son président afin de réfléchir aux moyens de développer des partenariats notamment dans le domaine des sciences humaines et sociales. Si un laboratoire effectue des travaux sur l'image, le PRES est malgré tout tourné vers des problématiques éloignées des nôtres. Un rapprochement avec le Cluster Descartes me semble difficile compte tenu du fait que nous sommes propriétaire de 7,5 hectares à Bry-sur-Marne et que nous n'avons pas les moyens de déménager. L'arrivée à terme d'un métro automatique serait ainsi bien utile, d'autant que nous sommes actuellement très mal desservis par les transports en commun.

S'agissant de la convention collective et des accords signés la semaine dernière, je voudrais rappeler que nous avons conclu un accord de méthodologie portant par exemple sur le calendrier, les thèmes abordés… Nous avons le projet d'une nouvelle convention globale, qui sera présentée aux syndicats à la fin du mois de novembre, à charge pour eux de nous présenter leurs observations ou propositions en janvier. J'ai souhaité, répondant d'ailleurs en cela au souhait d'un syndicat comme la CFDT, que ces négociations aillent vite et que nous puissions dresser un bilan fin 2011. La convention collective date de 1984, elle a été modernisée par 53 accords d'entreprise.

Par ailleurs, un des projets du grand emprunt concerne la mise en oeuvre d'une plateforme de référencement de l'offre dématérialisée, c'est-à-dire de la télévision de rattrapage et la VOD. L'INA a réfléchi à cette problématique, sachant que le fait d'être partenaire de l'ensemble des chaînes sans être diffuseur constitue une garantie de neutralité. Je ne crois pas à l'hypothèse d'un « Hulu » à la française et c'est à nous de proposer un espace neutre. Nous dialoguons effectivement avec la société « My screen », une start-up qui propose des solutions intéressantes, mais il s'agit d'un dialogue ouvert à d'autres sociétés, le chiffre de 11 millions d'euros évoqué dans la presse n'ayant jamais été mentionné dans nos discussions. Nous concevons cet éventuel engagement comme un investissement industriel, car nous ne sommes ni un fonds d'investissement ni un business angel. Nous souhaitons valoriser notre expertise dans le domaine de l'indexation ou nos outils comme Signature, qui figurerait dans une base que nous labelliserions.

Mme Fourneyron m'a interrogé sur la valorisation audiovisuelle des territoires, qui repose sur nos activités en région et nos partenariats avec les rectorats, les conseils généraux et régionaux. Nous sommes ainsi partenaires de la première exposition du Centre Pompidou de Metz et nous nous sommes aussi associés au soixantième anniversaire de France 3 Lille.

Pour conclure, je pense que l'INA doit se positionner comme tiers de confiance, car nous offrons un environnement respectueux des auteurs et des oeuvres, ce qui est un atout dans l'univers médiatique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion