Le budget qui nous est présenté lance la France dans un nouveau cycle de croissance.
Il est nécessaire de réduire et le déficit et la dette. Le niveau des transferts sociaux sert d'amortisseur naturel aux crises fortes. Ce système a pu fonctionner aussi longtemps que les marchés acceptaient de financer largement l'endettement consécutif au financement de ces transferts. Mais la chute des recettes provoquée par la crise en 2008-2009 aurait asséché les capacités de financement de notre modèle social si le marché n'avait consenti à absorber deux fois et demi plus de dette publique qu'à l'accoutumée. Une dette excessive nous rend dépendants des prêteurs étrangers ; c'est donc une menace pour notre souveraineté nationale.
La sécurisation des recettes fiscales et sociales est un engagement tout aussi important. En 2009, l'impôt sur les sociétés a atteint 21 milliards d'euros. En 2008, année « normale », il atteignait 49,2 milliards. Le projet de loi de finances pour 2011 prévoit que 44 milliards d'euros environ seront collectés à ce titre. Cela illustre la vulnérabilité de cet impôt à la crise, mais aussi sa vulnérabilité à la concurrence fiscale internationale. Or la France a le deuxième taux nominal d'impôt sur les sociétés le plus élevé de l'Union européenne après Malte – nominal, car les différences d'assiette brouillent la comparaison. Il n'en reste pas moins que le taux « facial » élevé est un désavantage pour la France, dont la situation au titre de l'impôt sur les sociétés n'est pas aussi mauvaise qu'il y paraît. Il faut donc encourager la définition d'une assiette commune consolidée d'impôt sur les sociétés – le projet ACCIS – et espérer que l'initiative de convergence fiscale franco-allemande trouve rapidement une issue favorable.
J'ai entendu les critiques portant sur ce qui serait l'insuffisance du « rabotage » des niches fiscales, certains soutenant qu'il devrait être plus large et plus égalitariste, écrêtant uniformément toutes les dépenses fiscales. En matière de niches fiscales comme en toute chose, il faut faire la part des choses. Les dépenses fiscales sont des dispositifs dérogatoires institués pour répondre à une situation économique ou sociale précise ; il serait donc utile de les limiter systématiquement dans le temps et de les évaluer, tous les trois ans par exemple, avant de les reconduire éventuellement. Le comité d'évaluation présidé par M. Guillaume remettra en juillet prochain un rapport impatiemment attendu, car il permettra d'approfondir le travail engagé de réduction des niches fiscales.
J'ai, pour finir, quelques questions à poser aux ministres. En premier lieu, la soumission de l'ensemble des offres triple play à la TVA à taux normal ne risque-t-elle pas de créer une distorsion de concurrence entre le câble et l'ADSL ? Dans un autre domaine, comment faire pour étendre aux pays européens, l'Espagne par exemple, la taxe sur les banques ? Par ailleurs, quelles seraient les conséquences d'un accroissement de 30 points du spread avec l'Allemagne si les investisseurs, qui surveillent l'évolution de notre dette, avaient moins confiance en la France ?
Enfin, lors de la deuxième conférence sur le déficit, le Président de la République a lancé une réflexion sur l'adoption d'une règle constitutionnelle relative aux finances publiques. Un groupe de travail présidé par Michel Camdessus a été créé, dont les conclusions ont été remises au début de l'été. Le Premier ministre a transmis les conclusions de ce groupe aux Commissions concernées et aux groupes politiques, dans la perspective d'une concertation. Comment s'articulent la loi de programmation des finances publiques et la réflexion ainsi conduite ? Lesquelles des préconisations contenues dans le rapport Camdessus avez-vous retenues dans la loi ?