Pis encore, votre projet de déchéance de la nationalité concerne un Français, mais pas n'importe quel Français : celui qui a obtenu sa nationalité depuis moins de dix ans et ne pourrait donc se prévaloir d'être Français de souche.
Vous avez donc inventé un nouveau statut : le Français de seconde zone, le Français stagiaire qui n'est pas encore complètement titularisé, au-dessus de la tête duquel vous décidez de placer une épée de Damoclès. Vous savez pourtant fort bien que cette disposition est contraire à l'article 1er de notre Constitution qui consacre l'égalité des droits.
De plus, vous vous prenez les pieds dans le tapis juridique puisque vous devez introduire une distinction entre les binationaux et les personnes n'ayant qu'une seule nationalité auxquelles votre projet ne pourra pas s'appliquer, au risque de les rendre apatrides alors que vous avez souscrit des engagements internationaux pour limiter l'apatridie. Votre article est donc complètement bancal et manifestement totalement contraire à l'esprit de notre Constitution et à notre histoire
Les nouvelles dispositions introduites par votre texte sont une insulte à l'État de droit et au respect de la légalité. Vous méconnaissez l'article 66 de la constitution qui précise que « nul ne peut être arbitrairement détenu » et que « l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ».
Par ailleurs, selon l'article 5-4 de la Convention européenne des droits de l'homme, « toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale ». En permettant au juge administratif de se substituer en premier lieu au juge judiciaire, vous faites fi d'une éventuelle décision allant à l'encontre d'une reconduite rapide de l'étranger en situation irrégulière. Votre projet de loi prévoit de reporter au cinquième jour la première intervention du juge des libertés, soit ultérieurement à la décision du juge administratif. Par conséquent, l'étranger pourra être reconduit à la frontière, même si la procédure qui a conduit à son interpellation est ultérieurement qualifiée d'irrégulière.