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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 16 septembre 2010 à 15h00
Avenant à la convention france - suisse en vue d'éviter les doubles impositions — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Vous êtes jaloux, monsieur Vigier !

Je ne lis, dans un premier temps, que le titre : « Projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre la France et la Suisse en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune ». Il n'y a rien, pas un mot, sur l'évasion fiscale. Mais, décidant de faire foin de la qualité de l'intitulé, j'ai choisi, dans un second temps, de me concentrer sur la qualité de l'accord proprement dit.

Les dispositions du texte, bien que parfois d'une technicité quelque peu aride, sont empreintes de cette rondeur diplomatique propre aux textes internationaux. Sur chaque chiffre, sur chaque mot, flotte cet indescriptible parfum de la négociation entre partenaires égaux et très complaisants. On y sent un sens de la pondération que l'on aimerait humer plus souvent dans les projets gouvernementaux ! Et puis – ô joie ! – on trouve même un article correspondant aux préconisations de l'OCDE sur la transmission d'informations fiscales aux fins de lutter contre l'évasion fiscale. La Suisse devait ressentir une furieuse envie d'être rayée de la liste des paradis fiscaux, Claude Birraux l'a souligné tout à l'heure. Car tel est, en effet, le but principal poursuivi par le gouvernement suisse dans la signature de cet accord. L'OCDE l'avait inscrite sur sa liste des paradis fiscaux, et, pour en être retirée, elle devait impérativement signer douze accords de coopération fiscale avec d'autres États. Nous y reviendrons dans la discussion générale. La Suisse obtenant ce qu'elle souhaite par le biais de cette décision, j'attends impatiemment les dispositions en faveur de la France, celles annoncées au moment de la signature par le Gouvernement, celles permettant de rapatrier, d'après vous, madame la ministre, « des centaines de milliers, voire des millions d'euros ».

C'est à l'article 8 que j'ai connu mon premier frisson : est visé le recouvrement des créances fiscales des États contractants. Ah non ! Je relis plus attentivement : est visée la notification des créances fiscales aux fins d'en faciliter le recouvrement. Connaissant bien les textes du Gouvernement et leur tendance à apporter une réponse musclée aux faits divers récents, j'imagine déjà la frayeur de ceux qui pratiquent ce sport particulier de l'évasion fiscale. Cette cécité sur certains points de l'actualité se prolonge dans la fadeur de l'article 8, qui prévoit, en effet, la seule notification par courrier des créances fiscales. Mais attention, la haute diplomatie française a réussi à arracher à la Suisse une concession majeure et je me doute que M. Kouchner, dont on a perdu de vue les performances, a frappé ! Est précisé au deuxième paragraphe de cet article : « Les notifications sont adressées par envoi recommandé avec accusé de réception. » La diplomatie internationale a progressé ! En tout cas, alors que le nombre de lettres adressées par l'intermédiaire de La Poste baisse, voilà une façon de lui garantir certainement son chiffre d'affaires !

Sentez-vous, enfin, toute l'innovation révolutionnaire du nouvel accord proposé par le Gouvernement ? Si vous ne la sentez pas maintenant, vous risquez de ne plus jamais la sentir !

Puisque l'on reproche souvent à l'opposition de ne pas être constructive, je préfère marquer un temps d'arrêt dès maintenant pour féliciter le Gouvernement de cette avancée majeure :…

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