Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, mes chers collègues, le débat relatif au budget de la sécurité sociale pour 2009 s'ouvre dans une période qui le rend un peu surréaliste quant aux recettes et au déficit annoncé.
L'an dernier, nous avions émis quelques doutes sur la sincérité des prévisions économiques et des indices sur lesquels le texte était bâti. Or les recettes du second semestre de 2008 ont donné raison à ces craintes. Mais cette année, le débat consacré au PLFSS s'ouvre dans un contexte nouveau, celui de la crise du capitalisme financier, laquelle entraîne une crise de la sphère de la production et de l'économie réelle dont on commence, hélas, à percevoir l'ampleur et les dégâts sociaux qu'elle va engendrer.
Le bureau de l'OIT, l'Organisation internationale du travail, vient de rendre public un rapport qui indique clairement qui seront les victimes du naufrage du capitalisme financier : en l'occurrence, pas ceux qui en sont responsables. Les victimes ne seront pas non plus cette minorité rapace et souvent arrogante qui, sur tous les continents, aura profité au cours de ces dernières années de l'accumulation du capital et des revenus financiers, ou de salaires et d'autres avantages financiers si exorbitants que leurs montants dépassent l'entendement.
L'exemple, bien entendu, est venu des États-Unis, mais également d'Europe et notamment de France, où le MEDEF et les gouvernements successifs, invoquant l'attractivité, la compétitivité ou la modernité, n'avaient qu'un seul mot d'ordre : permettre l'augmentation des revenus des dirigeants afin qu'ils atteignent ceux des dirigeants américains, tout en réduisant, au passage, l'imposition sur les hauts revenus. Et, toujours au nom de la compétitivité et de l'attractivité, il fallait conjointement peser sur les coûts de production, sur les salaires, sur la protection sociale, sur les dépenses publiques en général et les dépenses de solidarité en particulier.
Au cours des dernières années, les inégalités patrimoniales et les inégalités de revenus se sont considérablement accrues. Baisses des impôts progressifs, multiplication des taxes, franchises fiscales, forfaits et franchises pour l'assurance maladie ont accéléré la baisse du pouvoir d'achat des catégories laborieuses et modestes, difficultés encore aggravées par le bouclier fiscal. Et que nous dit le bureau de l'OIT ? Ce sont ces mêmes catégories sociales, moyennes et modestes, qui, sur tous les continents, dans les pays industrialisés comme dans les pays émergents ou en voie de développement, vont subir les conséquences de la crise du capitalisme financier.
Face aux drames sociaux qui s'annoncent, ce sont les impératifs de solidarité, de protection sociale, de répartition des efforts sur toutes les catégories sociales qui devraient guider toute politique sociale et compléter toute politique économique et financière. À en croire certaines déclarations de membres de la majorité, ce sont d'ailleurs ces objectifs qui étaient affichés. Il faudrait, plus concrètement, revenir au pacte républicain, selon lequel « chacun participe au bien public à hauteur de ses facultés respectives ». C'est à cette aune-là que nous aurions voulu que s'évalue le bien-fondé de vos projets de budgets publics pour 2009, monsieur le ministre, mais aussi celui de la programmation des finances publiques jusqu'en 2011. Or, de ce point de vue, le budget pour 2009 que vous nous présentez n'est même pas insincère ou irréaliste : il est irréel. Il est comme suspendu en l'air, en apesanteur. Vous l'avez d'ailleurs vous-même reconnu – ainsi que Mme Lagarde, la semaine dernière, ici même –, en indiquant que les prévisions sur lesquelles étaient construits vos budgets seraient revues en novembre. Dans six à huit semaines, il faudra donc reconstruire les budgets.
Sur un seul point, vous vous êtes déjà adapté : la date du retour à l'équilibre du régime général, que vous aviez fixée à 2011 cet été, et que vous venez de reporter à 2012. Maintenez-vous, monsieur le ministre, la prévision d'excédent de 700 millions d'euros pour le régime général en 2012 ? Un tel retour à l'équilibre, notamment pour l'assurance maladie, évoque, comme dit le poète, « l'inaccessible étoile ». En 2004, vos prédécesseurs – ainsi que M. Bertrand, qui, lui, est toujours là – nous l'avaient promis pour 2007 !
L'échec de la loi de 2004 se manifestera, une fois de plus, après les comptes arrêtés de 2006, lorsque nous examinerons, avec l'article premier, les tableaux d'équilibre pour 2007.