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Intervention de Jacques Myard

Réunion du 26 juin 2008 à 15h00
Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale — Reprise de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Myard :

Cette défense européenne devrait être le fondement même d'une OTAN rénovée.

Permettez-moi de ne pas être d'accord avec cette démarche. Votre analyse semble être la suivante : nos partenaires européens étant dans l'OTAN et pour l'OTAN, et la France étant favorable à la défense européenne, c'est en ralliant l'OTAN qu'elle réussira à convaincre ses partenaires de construire une défense européenne. Voilà un syllogisme un peu illusoire, voire une bévue. Il ne faut pas prendre ses désirs pour des réalités.

Aucun de nos partenaires ne rêve véritablement d'une défense européenne. Ils ont aliéné leur défense dans l'OTAN. La preuve, l'article 42-7-2 de feu le traité de Lisbonne, indiquait que « Les engagements et la coopération [dans le domaine de la politique de sécurité et de défense] demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, qui reste, pour les États qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l'instance de sa mise en oeuvre. » La messe est dite !

En termes militaires, nous n'avons pas besoin, du fait de la coopération que nous avons nouée avec cet organisme, de rentrer dans l'OTAN. Mais, en réalité, le problème est bien davantage une question politique et diplomatique. Je suis intimement convaincu que rallier aujourd'hui l'OTAN, c'est donner un mauvais signal au monde entier, et que nous n'arriverons ni à avoir de l'influence sur les Américains ni à rallier nos petits camarades européens à notre cause et à nos idées.

En réalité, il faut inverser la démarche, muscler notre défense, aller pas à pas vers la mobilisation de 3 % de PIB pour notre défense. Là, nous entraînerons les autres. Car la clé, c'est que plus la France est forte et indépendante, plus l'Europe est indépendante, moins la France est indépendante, plus l'Europe est américaine. Voilà la vérité. Tout le reste n'est que littérature.

Il est une autre question que nous devons nous poser : l'OTAN a changé de nature. Cela a déjà été souligné, l'alliance est devenue, de par la volonté des Américains, un outil au service de leur manichéisme, je n'ai pas peur d'employer ce terme. Nous sommes très loin de l'alliance défensive fondée sur l'article 5 de l'OTAN, lui-même fondé sur l'article 51 de la Charte des Nations unies relatif à la légitime défense individuelle et collective. Et tout cela s'est fait dans le dos du Parlement. Je suis donc intimement convaincu que rallier l'OTAN serait une faute géostratégique et diplomatique.

J'ajoute, et cela est important, que notre défense passe aussi par des accords de coopération sur le flan sud, c'est-à-dire en Méditerranée notamment. Je me réjouis à ce propos de l'accord récent qui a été signé par le Premier ministre en matière de coopération militaire en Algérie. Nos destins sont liés. La France est certes européenne mais elle est également méditerranéenne et elle doit garder sa liberté de manoeuvre.

Monsieur le ministre, pour moi, le débat est ouvert. Le Livre blanc, c'est comme les lois de programmation, c'est comme l'amour : tout est dans l'exécution. Je serai à vos côtés pour vous aider à obtenir les crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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