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Intervention de Patricia Adam

Réunion du 26 juin 2008 à 15h00
Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale — Déclaration du gouvernement et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatricia Adam :

…– hausse dont je me félicite – la capacité de nos forces ne s'est, au mieux, que très marginalement améliorée et s'est même dégradée dans certains secteurs, cela en raison d'erreurs dues à la dispersion des moyens. Enfin, un « jeu » de cavalerie budgétaire a conduit à repousser les problèmes au-delà de la fin de la législature, avec une pression croissante sur les effectifs, comme l'avait courageusement souligné le général Thorette en 2005.

Aujourd'hui, votre majorité reconnaît le déficit des crédits d'investissement, que nous avons régulièrement dénoncé. Et vous prônez des mesures radicales. À l'ajournement continuel semble donc avoir succédé la lucidité. Nous ne pourrons juger cependant de la réalité de cette conversion que dans la durée.

Souvenons-nous qu'il avait été dit dans cet hémicycle qu'un modèle non finançable ne serait pas financé ! Souvenons-nous que les chiffres avaient été donnés ! Peut-être même avez-vous appris des députés socialistes le terme de « bosse », aujourd'hui remplacé par celui de « mur budgétaire », pour désigner la situation inextricable laissée par les engagements non financés !

Cohérence oblige, vous vous rangez à ce constat : à budget constant, le modèle doit être révisé à la baisse. Il eût été plus responsable d'afficher la vérité des chiffres en assumant une baisse du contrat opérationnel plutôt que de tailler insidieusement dans les effectifs en sous-recrutant, comme ces dernières années. Nous y reviendrons. Car après le mur budgétaire, un deuxième mur nous attend : celui d'une RGPP non préparée, non concertée quoi qu'on en dise, et non financée !

Quant à la commission du Livre blanc, quel fossé entre le discours et la pratique ! Nous ne pouvons, en effet, qu'adhérer au discours s'agissant de la création de cette commission, du choix de son président et de ses membres, comme de la présence de quatre parlementaires. Mais, la pratique, c'est l'intervention continuelle du Président de la République pour peser, biaiser et imposer ses choix. Quelle rupture, effectivement, une rupture décomplexée et assumée !

J'ai démissionné de cette commission, comme mon collègue du Sénat Didier Boulaud, car la liste des avanies qui lui ont été infligées est bien longue. Nous avons même acquis, au fil du temps, la certitude qu'elle se verrait, au final, priée d'endosser la paternité de décisions qui ne lui appartenaient pas.

De même, la conception très variable de la confidentialité des travaux en cours et les fuites organisées au plus haut niveau de l'État vers la presse avaient tout d'une double opération de guerre psychologique : en pesant d'abord sur les débats de la commission, puis en préparant nos concitoyens à telle ou telle annonce, on en arrive à cautionner la fuite de documents de travail classifiés, au profit de la presse. La discipline intellectuelle ne s'applique visiblement qu'aux autres !

Ainsi, c'est par la presse que les commissaires ont appris que les états-majors seraient regroupés dans un Pentagone à la française ; que le statut de la DGA serait modifié ; qu'une base interarmées serait créée à Abu-Dhabi ; que l'intervention française en Afghanistan changerait de nature, alors qu'avait été repoussée la demande du groupe socialiste de créer une mission d'information dès le mois de septembre. Enfin, c'est depuis Cherbourg que le Président de la République a annoncé qu'un des trois escadrons de mirage 2000-N ne serait pas remplacé. Je ne poursuis pas l'inventaire. Il est accablant.

Du rêve à la réalité, voyez le signal que vous donnez : aujourd'hui, une déclaration, un débat, certes, et puis plus rien. Le Livre blanc ne changera pas. Il est écrit, édité, diffusé et, quels que soient nos propos dans cet hémicycle, en « despote éclairé », ainsi que l'a qualifié l'éditorialiste d'un grand quotidien régional, le Président de la République décide seul.

J'en viens au fond.

L'analyse des menaces, tout d'abord, est une question essentielle qui fonde largement la stratégie. C'est là, entre autres, que nous avons des points de désaccord. Le rôle d'un Livre blanc est de recenser les menaces, d'en dresser un ordre de priorité, mais aussi de tenter d'en expliquer les causes, pour pouvoir ensuite agir.

Le Proche-Orient y est identifié comme étant au centre d'un arc de crise majeure, ce que l'on ne peut contester. Mais à aucun moment, il n'est affirmé que la défense est appelée à n'intervenir qu'au service de la diplomatie. Aucune analyse n'est faite sur les moyens de renforcer le rôle politique de l'Union européenne dans la gestion des crises. Or nous plaidons que la sécurité internationale n'est pas le droit du plus fort, mais la force du droit.

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