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Intervention de François de Rugy

Réunion du 24 juin 2009 à 21h30
Lutte contre les violences de groupes — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

Avant d'aborder les différents problèmes que pose ce texte, je veux revenir sur la politique actuelle de sécurité et de tranquillité publiques.

Pour commencer, il faut poser la question de son efficacité, car c'est sur ce terrain que nous attendent nos concitoyens. Regardons non seulement la réalité de la délinquance, de la violence, de l'insécurité et de tout ce qui peut perturber la tranquillité, mais aussi le sentiment d'insécurité. Si nous sommes honnêtes, nous devons reconnaître que la montée de la violence est durement ressentie par nos concitoyens. Les statistiques viennent nous le confirmer.

C'est pourquoi je crois nécessaire que nous condamnions ensemble tous les actes de violence et de délinquance, quels qu'ils soient. Il faut assurer les victimes de notre soutien et de notre solidarité. Dans la très grande majorité des cas, les jeunes sont les premières victimes des bandes, notamment dans les manifestations, tout comme ils sont, avec les enseignants, les premières victimes des violences commises dans les établissements scolaires. La montée de la violence est grave, ainsi que la tension qu'elle fait naître : le sentiment de la peur empêche de se projeter dans l'avenir, d'envisager celui de ses enfants ou même de vivre tranquillement, où que ce soit, en France.

Certains élus de l'opposition – comme Sandrine Mazetier – se sont demandé avant moi si cette situation gêne vraiment la majorité. Ne représente-t-elle pas sinon un fonds de commerce, du moins une occasion d'ajouter sans cesse de nouveaux épisodes au feuilleton législatif de l'insécurité, qu'elle impose aux assemblées de rédiger indéfiniment ? Dès lors, comment ne pas s'interroger sur l'efficacité de ces textes, notamment de celui que nous examinons ?

Madame la garde des sceaux, quand vous occupiez encore les fonctions de ministre de l'intérieur, vous avez souvent mis en avant ce que vous appeliez les « bons chiffres » de la lutte de la délinquance. Mais, face à la violence et à la peur qu'elle engendre, il faut rester humble. Devant l'important travail qui reste à accomplir, il n'existe pas de solution toute faite.

Pour nous, toute politique de sécurité et de tranquillité publiques doit être encadrée par des principes, auxquels nous devons rester attachés. À défaut, à quoi serviraient les grands discours sur le modèle républicain que le Président de la République a tenus devant le Parlement réuni en Congrès ?

Parmi ces principes figurent, au même titre que le respect des droits et des libertés individuelles, l'efficacité. Les Français ne nous demandent pas de choisir entre la liberté et la sécurité. De tous les peuples du monde, le nôtre est probablement le plus attaché à la tranquillité comme aux libertés individuelles.

L'efficacité d'une politique de sécurité suppose que l'on regarde la réalité en face, sans la nier, ni la déformer à des fins politiciennes comme c'est trop souvent le cas – tel est notre sentiment lorsque nous entendons un certain nombre de discours, y compris ceux tenus ces dernières semaines qui ont abouti à l'examen de cette proposition de loi.

La recherche de l'efficacité suppose que l'on évalue à cette aune chacune des mesures prises. Chacune des mesures que la majorité a fait voter depuis sept ans à l'Assemblée nationale et au Sénat a-t-elle été efficace ? N'est-il pas temps de procéder à leur évaluation approfondie et indépendante avant de poursuivre la fuite en avant législative qui nous conduit à discuter toujours de nouveaux textes, comme nous le faisons encore aujourd'hui ?

J'ajoute que ces nouveaux textes peuvent parfois sembler « anecdotiques » car ils ne traitent jamais successivement que de toutes petites parties du problème. Aujourd'hui, les bandes ; hier, les chiens dangereux : est-ce vraiment sérieux ? Pendant que nous passons des heures à parler de ces sujets nous ne traitons pas de questions autrement plus graves comme la montée de la violence ou la résurgence des violences faites aux femmes, plus particulièrement aux jeunes femmes. Or nous savons bien que l'on constate une recrudescence dans ces domaines. Ne serait-il pas temps de relancer des actions spécifiques dans ces secteurs ? Monsieur Raoult, comme vous, nous sommes élus de terrain, mais, pour notre part, nous constatons sur le terrain que, malheureusement, une association comme le planning familial voit ses crédits baisser alors qu'il faudrait mener de nouvelles actions fortes dans le champ qui est le sien.

Je suis de ceux qui défendent une approche globale de la sécurité : je ne crois pas utile d'opposer la prévention à la sanction. Bien évidemment, aucune règle, aucune loi ne sera jamais effective s'il n'existe pas de sanctions en cas d'infraction. Mais n'est-il pas utile de rechercher les causes des infractions, surtout quand celles-ci se multiplient de façon continue et régulière ? Je crois que cela est particulièrement vrai pour ce qui concerne la montée de la violence. Pour ce qui est de la délinquance, même avec la meilleure prévention du monde – et on peut sans aucun doute beaucoup progresser en la matière dans notre pays – il y aura toujours des personnes qui chercheront à contourner les lois et à profiter de la possibilité qu'elles ont de le faire – profiter s'entend bien sûr en version sonnante et trébuchante. Cela est évidemment vrai dans le domaine des différentes formes de vols quelle qu'en soit la gravité, ce que l'on appelle souvent la petite délinquance. Mais cela est vrai aussi pour les nombreuses autres formes d'infractions.

Je crois utile de m'arrêter quelques instants sur ce point. La condamnation du non-respect de la loi devrait, à mon sens, être la même pour la petite délinquance et la violence que pour toutes les autres formes de délinquance ou d'infractions à la loi.

Il y a quelques années, une action a ainsi été menée – pour ma part, je l'ai toujours saluée – dans le domaine de la sécurité routière, alors que pendant des années nous nous étions accommodés d'un certain laisser-aller quant au respect de la loi. On constate d'ailleurs que cette bataille n'est jamais définitivement gagnée.

Mais qu'en est-il dans d'autres domaines ? Prenons l'exemple du non-respect de la loi en matière de fraude fiscale. Croyez-vous qu'il soit pédagogique de raisonner comme l'ont fait le Gouvernement et la majorité sur le bouclier fiscal ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

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