Bien que ma carrière parlementaire ne soit pas si longue, c'est au moins la troisième fois que je vois la droite repousser le moment de trancher cette question de la pénibilité.
L'article 12 de la loi de 2003 prévoyait une négociation sur trois ans, en vue de prendre en compte la pénibilité dans le calcul des pensions. Cette négociation n'a pas abouti, alors même que c'était, pour certains partenaires sociaux, la condition de leur acceptation – toute relative – de cette réforme des retraites, et le Gouvernement n'a pas tiré les conséquences de cet échec. Pour m'exprimer avec plus de modération qu'un dirigeant syndical important, je dirai que les partenaires sociaux se sont fait « berner »…
Par la suite, même si nous avons voté contre le rapport de Jean-Frédéric Poisson, la mission d'information sur les risques psychosociaux au travail a eu le mérite d'avancer plusieurs idées intéressantes, notamment celle du curriculum laboris, qui aurait permis de gagner quelques années dans l'organisation de la traçabilité, et celle de départ anticipé à la retraite. Ce rapport parlementaire, rédigé par un membre de votre majorité, n'a toutefois eu aucune suite.
Le troisième report de l'échéance, c'est celui qui résulte du présent projet, dont Valérie Rosso-Debord vient de nous livrer la philosophie officielle, en confondant traitement de la pénibilité et prise en compte des carrières longues et en assumant un glissement abusif de la pénibilité vers l'incapacité.
Bref, le Gouvernement, une fois de plus, a reculé et berné les partenaires sociaux.