Il y a près d'un mois, j'ai eu l'honneur, avec Georges Tron, de présenter à votre commission l'avant-projet de réforme visant à sauvegarder notre système de retraite. Nous l'avons ensuite soumis au Conseil d'État, puis aux conseils d'administration des organismes de sécurité sociale, notamment de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), qui ont émis un avis favorable. J'y vois la preuve qu'il s'agit d'un texte équilibré, répondant aux défis que notre système doit affronter sans attendre.
Le projet de loi que voici est nécessaire, car nous ne pouvons pas laisser plus longtemps se dégrader la situation financière de nos régimes de retraite, confrontés à un choc démographique sans précédent. Cette réforme est également urgente, la crise ayant accéléré de vingt ans le rythme des déficits. Enfin cette réforme est juste, parce qu'elle donne un avenir à notre système de retraite par répartition, fondé sur la solidarité entre les générations, les actifs finançant les retraites des plus âgés, comme à l'intérieur des générations, via les nombreux dispositifs destinés à compenser les aléas de la vie active, tels que le chômage ou la maladie. On ne peut pas prétendre être attaché à la solidarité entre les générations et se résigner à faire peser tout le poids de l'effort sur nos enfants.
Conformément à la volonté du Président de la République, le Gouvernement a donc pris ses responsabilités sans tarder, dans la continuité des réformes déjà accomplies par notre majorité en 1993, en 2003 et en 2007-2008 pour les régimes spéciaux.
Nous avons bâti cette réforme sur trois exigences : celle de la responsabilité, car on ne peut prétendre maintenir la pérennité d'un système par répartition sans agir sur la durée d'activité ; celle de l'efficacité, puisque nous visons, non seulement la réduction du déficit, mais également le retour à l'équilibre en 2018 ; celle de la justice, car nous ne pouvons pas demander à tous un effort, sans tenir compte de ceux qui ont été exposés à des conditions de travail plus pénibles ou qui ont commencé à travailler plus tôt.
En application de ces principes, cette réforme se fixe les quatre orientations suivantes : augmenter la durée d'activité de manière progressive jusqu'en 2018 ; renforcer l'équité du système de retraites ; améliorer les mécanismes de solidarité à l'intérieur du système de retraites et renforcer la compréhension par les Français des règles de la retraite.
L'augmentation de la durée d'activité est au coeur de la réforme proposée. C'est une réponse de bon sens : qui peut prétendre que l'allongement de la durée de vie ne doit emporter aucune conséquence sur la durée de la vie active ? Qui peut prétendre qu'il est juste de faire face à ce défi en chargeant les générations futures d'une augmentation massive des impôts ? La plupart des pays européens, confrontés à la même situation, y ont répondu de la même manière. Que ce soit en Espagne, en Allemagne, au Royaume-Uni, cette solution n'a pas été celle d'un camp ou d'un parti : elle a été le fait de gouvernements de droite comme de gauche, qui ont tout simplement choisi de regarder la réalité telle qu'elle est.
Cette augmentation sera progressive, pour ne pas bouleverser les projets des Français qui sont proches de la retraite. L'âge de la retraite sera augmenté de quatre mois par génération dans l'ensemble des régimes de retraite, pour atteindre 62 ans en 2018. Parallèlement au recul de l'âge légal, c'est-à-dire l'âge auquel on a le droit de prendre sa retraite, l'âge d'annulation de la décote, aujourd'hui fixé à 65 ans, sera reculé aussi, pour être porté à 67 ans d'ici 2023.
Il est une vérité qu'il faut rétablir : aujourd'hui, ceux qui font valoir leur droit à la retraite à 65 ans ne travaillent pas nécessairement jusqu'à cet âge, certains attendant d'avoir atteint cet âge pour pouvoir échapper à la décote. Ceux qui prétendent, comme je l'ai souvent lu et entendu, que nous allons obliger les femmes à travailler jusqu'à 67 ans ne disent pas la vérité.