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Intervention de Éric Woerth

Réunion du 30 juin 2009 à 21h30
Débat d'orientation des finances publiques pour 2010

Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, tous les efforts du Gouvernement tendent à un seul but : préparer l'avenir. Pour cela, il faut d'abord sortir de la crise, amplifier la lutte contre nos déficits structurels et surtout identifier les secteurs stratégiques dans lesquels nous devons redoubler d'efforts.

Vous le voyez, jamais la politique budgétaire n'a été autant au coeur de nos débats publics, jamais elle n'a été autant sollicitée. En ces temps de crise, où nous ne pouvons plus, comme par le passé, faire jouer les seules mesures monétaires pour pallier l'insuffisance d'activité, la politique budgétaire est devenue l'instrument politique par excellence.

Je rappelle cette simple vérité : si les déficits se creusent, c'est uniquement en raison de la crise – j'ai tenté de le montrer hier –, de son coût et du prix de la relance. Ce constat fait, le défi que nous avons à relever est clair. Il faut s'assurer que la politique budgétaire accompagne non seulement la reprise, mais aussi la croissance de long terme, tout en consolidant la soutenabilité de nos finances publiques.

Vous vous en souvenez peut-être : dès 2007, dans cet hémicycle, j'ai privilégié les dépenses d'avenir dans la construction du budget qui ne répondait pas encore aux règles de la LOLF. J'avais en effet à coeur de séparer les dépenses d'avenir des dépenses courantes. J'ai également eu l'occasion de travailler avec certains d'entre vous, comme Jérôme Chartier, lors de nos débats à propos de la règle d'or, pour définir les dépenses de fonctionnement.

II nous faut maintenant systématiser cette approche. La logique qui a présidé au lancement de la révision générale des politiques publiques doit être prolongée et étendue, dans une deuxième phase, notamment aux dépenses d'intervention, aux opérateurs, ainsi qu'aux niches fiscales et sociales, car c'est bien l'ensemble de la dépense publique qu'il faut tourner vers l'avenir.

Avant de développer ces propos, je commencerai par faire le point sur l'année en cours.

Le déficit public devrait atteindre 7 à 7,5 points de PIB en 2009. Cette dégradation d'un peu plus de 4 points par rapport à 2008 est intégralement due à la crise. Elle s'explique par la baisse des recettes en lien avec la récession et par la mise en place des mesures de relance.

Notre prévision de baisse du PIB, identique à celle de l'INSEE, est de 3 %, soit près de 5 % en deçà de la croissance potentielle. En temps normal, l'effet de baisse de l'activité se traduirait par une hausse des déficits d'un peu moins de 2,5 points de PIB. Mais nous ne sommes absolument pas en temps normal, et les recettes fiscales se replient en fait beaucoup plus vite que le PIB. Ainsi, les recettes d'impôt sur les sociétés, qui atteignaient 50 milliards d'euros l'année dernière, retomberaient brutalement entre 20 et 25 milliards cette année. Cette diminution de recettes de 25 à 30 milliards représente une baisse de plus de 50 % par rapport à 2008.

La sur-réaction à la baisse de certaines recettes par rapport à l'activité explique un peu moins d'un point de PIB de déficit. Il nous faudra en analyser les raisons dans les mois à venir. S'agissant de l'impôt sur les sociétés, je crois pouvoir d'ores et déjà confirmer l'intuition que j'avais exprimée devant la commission : il pâtit non seulement de la baisse des résultats d'exploitation des sociétés, mais aussi de la baisse de leurs résultats financiers. Nombre d'entreprises ont passé des provisions pour dépréciation de leur portefeuille de participations boursières, ce qui réduit leur résultat fiscal. Selon moi, la chute brutale du prix des actifs financiers concomitante au ralentissement de l'activité explique en grande partie cette sur-réaction.

À ce jeu des stabilisateurs automatiques, sans précédent par son ampleur, s'ajoute naturellement le coût budgétaire des mesures de relance, pour environ encore trois quarts de point de PIB. La dégradation de près de quatre points de PIB s'explique donc intégralement par l'effet de la récession sur les recettes et les dépenses sociales, ainsi que par le coût des mesures prises pour lutter contre la récession et relancer l'économie.

À l'inverse, les dépenses hors crise, ou ordinaires, sont parfaitement maîtrisées. Les dépenses de l'État hors relance sont contenues au niveau voté par le Parlement. Ainsi, cette année, pour la première fois depuis 1997, l'objectif de dépenses d'assurance maladie sera respecté ou quasi-respecté.

Le déficit de l'État atteindrait 125 à 130 milliards d'euros en comptabilité budgétaire. Le déficit hors crise, c'est-à-dire courant, représente un peu plus de 40 milliards, et le déficit de crise environ 85 milliards, soit les deux tiers. Notons qu'environ 15 milliards ne pèsent pas sur le déficit maastrichtien, notamment les prêts au secteur automobile ou les sommes versées au Fonds stratégique d'investissement.

Pour le déficit du régime général de la sécurité sociale, de l'ordre de 20 milliards d'euros, environ 10 milliards d'euros doivent être imputés à la crise.

Nous ne sommes évidemment pas les seuls à voir nos déficits augmenter fortement. L'Espagne vient de réactualiser ses prévisions à 9,5 points de PIB pour cette année. D'après les dernières prévisions de l'OCDE, les États-Unis dépasseraient 10 points de PIB en 2009 – ils atteindraient probablement 12 points – et le Royaume-Uni 11 points. Même le déficit allemand, moins important en volume, se dégraderait d'environ 4 points de PIB en 2009, évoluant ainsi au même rythme que le nôtre.

Le déficit public serait globalement stable entre 2009 et 2010. L'amélioration du déficit budgétaire de l'État serait en effet compensée par la poursuite de la dégradation des déficits des comptes sociaux.

En 2010, le déficit budgétaire se réduirait. Les recettes de l'État se rétabliraient un peu avec le retour – modeste – de la croissance, et l'amorce du retour de recettes d'impôts sur les sociétés à un niveau moins atypique.

De plus, une large part des dépenses de relance disparaîtrait. Celles-ci seraient ramenées à 3,5 milliards. La maîtrise des dépenses hors relance se poursuivrait. Elles respecteraient la norme « zéro volume », malgré la révision à la baisse de l'inflation. Ces dépenses hors relance progresseront de 1,2 %, ce qui correspond au taux d'inflation prévisionnel.

Je tiens à souligner le rôle majeur que la loi de programmation des finances publiques, imposée par la commission des finances et le ministère du budget, a joué dans l'élaboration du projet de budget pour 2010. Avec mes collègues et sous l'autorité du Premier ministre, j'ai pu concentrer mon attention sur les budgets les plus concernés par la crise et ses impacts macroéconomiques. Dans une situation extraordinairement fluctuante, cette boussole nous a permis de nous repérer.

Plusieurs budgets ont dû être revus à la hausse. C'est le cas non seulement de l'emploi, pour faire face à la montée du chômage, mais aussi d'un certain nombre de dotations sociales, compte tenu du nombre croissant de leurs bénéficiaires. Le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne augmente également, car notre situation économique s'est relativement moins dégradée que celle de nos partenaires.

À l'inverse, la révision à la baisse de l'inflation a conduit à réduire certaines dépenses comme les pensions ou les charges de la dette, ou encore la défense qui fait l'objet d'une programmation en euros constant, comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer à la commission de la défense. La baisse des taux d'intérêt a également allégé la charge de la dette en 2009 et continuera de le faire en 2010.

Pour la plupart des autres budgets, les modifications ont été marginales par rapport à la loi de programmation. Cela justifie qu'en dépit des incertitudes économiques, j'ai tenu à mener au bout, avec vous, la discussion et le vote de cette loi pluriannuelle, qui demeure une référence majeure.

Par ailleurs, nous poursuivrons évidemment le non-remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux,…

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