Monsieur Nauche, la télémédecine entre bien dans le cadre de la recherche, mais elle ne fera pas partie des recherches qui seront effectuées à Brétigny. Nous disposons déjà de la possibilité de transmettre des images grâce au projet ISSAN – Infostructure Santé. Cet objectif d'état-major, soutenu par la direction générale de l'armement, vise à augmenter notre capacité de télétransmission et de télémédecine. Deux postes, à Djibouti et en Afghanistan, sont d'ores et déjà équipés. Mais il n'est nullement question de télé-opérations, de chirurgie à distance, pas plus que de robots téléguidés.
J'en viens au regroupement des sites à Orléans dans le cadre de la transformation de notre système de ravitaillement. L'établissement de Chartres sera en effet déplacé car, malgré une rénovation réussie, il ne permet plus la moindre extension. Or nous avons besoin de capacités de stockage supplémentaires destinées au SSA, au ministère de la défense, mais également à la santé publique. En outre, nous subissons de fortes pressions locales pour rétrocéder cet établissement à la municipalité… Ce déplacement à Orléans permettra de faire l'économie de 39 personnes, qui compensera le coût de la reconstruction du site. Selon nos évaluations, nous pourrions parvenir à un équilibre budgétaire entre 2012 et 2013. Encore une fois, nous faisons le choix de regrouper nos forces pour être plus efficaces.
Sur le plan des effectifs, le gain de cette transformation pourrait être de l'ordre de 520 personnes, réparties sur quatre composantes du service, les hôpitaux n'étant pas concernés par la déflation des effectifs.
Nous disposons actuellement d'un centre de recherche à Grenoble et de divers instituts – Brétigny, Marseille et Toulon. Il est prévu de regrouper en 2013 ces quatre établissements de recherche sur le site de Brétigny-sur-Orge pour faire face à la dispersion des équipes et à la redondance des thématiques et des personnels. Comme nous l'avons fait pour les hôpitaux, nous assumons notre choix de centraliser l'administration dans le secteur de la recherche.
Pourquoi Brétigny ? Parce qu'il s'agit déjà d'un site militaire, ce qui en facilitera la surveillance, et que nous pourrons récupérer des constructions existantes. Dans le cadre de la refondation de la recherche, il est prévu de construire un laboratoire de sécurité biologique de niveau 4. Enfin, la commune de Brétigny est située sur un axe regroupant des établissements de recherche de très haut niveau – le centre d'études du Bouchet, le CEA, l'École Polytechnique, l'INRA… – ce qui permettra à nos chercheurs, même si leur priorité demeure la recherche au profit de la défense, de s'inclure dans la recherche nationale.
Le risque pour les personnels est réel. Certains d'entre eux, notamment les plus anciens, très impliqués dans le tissu local, ne voudront pas venir à Brétigny. Nous en avons conscience, c'est la raison pour laquelle nous nous consacrons depuis quelques mois au recrutement de chercheurs civils. La direction des ressources humaines du ministère (DRH-MD) nous a aidés en nous permettant de leur offrir un bon niveau de rémunération et un profil de carrière suffisamment attractif pour les fidéliser. Le plan de ralliement de la recherche se déroule donc de façon satisfaisante.
Nous sommes très attentifs au devenir du site de Grenoble où se concentraient un grand nombre de chercheurs, mais il aurait, lui aussi, nécessité d'importants travaux. Seul le site de Brétigny nous permettra d'accueillir l'ensemble des chercheurs et 250 personnes supplémentaires.
La féminisation des services de santé des armées pose question – je ne dis pas qu'elle pose problème. L'armée française est la plus féminisée de toutes les armées européennes, et le SSA ne fait pas exception. Le taux de féminisation au sein du corps des médecins est de l'ordre de 20 % – mais il dépasse les 50 % à l'entrée à l'école. Nul doute qu'il augmentera au cours des dix prochaines années. Les études qui ont été réalisées montrent que les femmes ont une carrière plus courte que les hommes, de deux ans en moyenne, et qu'elles partent moins en OPEX – plus de deux fois moins que les hommes –, ce qui s'explique par des raisons d'ordre physiologique.
Nous devons réfléchir à cette situation. Le SSA a proposé il y a quelques années d'adapter l'activité des militaires aux femmes, au moins au sein des hôpitaux, par le biais de services à temps incomplet. Cela n'a pas été accepté par l'état-major des armées, mais nous reposerons la question car nombre de femmes médecins qui nous quittent resteraient si nous étions en mesure de leur offrir de meilleures conditions d'emploi.
Nous n'avons pas de problèmes majeurs s'agissant des médecins, mais nous restons très attentifs à leur égard. J'ajoute que l'inspecteur général du SSA va prochainement présenter une étude sur la féminisation au ministre de la défense.
Les professions paramédicales sont très féminisées – 69 % des infirmiers sont des femmes. Cela ne pose généralement pas de problèmes, sauf en Afghanistan pour les personnels des OMLT. Ceux-ci étant intégrés aux forces afghanes, la présence des femmes n'y est pas tolérée, et nous avons rencontré des difficultés pour réaliser les postes d'infirmiers.
En ce qui concerne la formation aux soins des combattants et des militaires, nous avons mis en place il y a deux ans deux formations : la première, dite « sauvetage au combat de niveau 1 » (SC1) est destinée à tous les militaires et comporte des spécificités militaires ; la seconde, dite « sauvetage au combat de niveau 2 » (SC2), destinée aux personnels plus qualifiés, leur apprend les gestes d'urgence qui relèvent théoriquement, en métropole, de la compétence d'un infirmier, voire d'un médecin. Ces formations, qui par exemple apprennent aux militaires à poser une perfusion, ne seront jamais utilisées en France : ce sont fondamentalement des formations de premiers secours, réservées aux situations d'exception rencontrées en opérations extérieures. Elles ont permis d'améliorer considérablement la qualité et le soutien que nous offrons aux militaires, qui le reconnaissent volontiers. Le général Lecerf, commandant des forces terrestres, que nous avons rencontré il y a trois semaines à Lille, s'en est tellement félicité que nous lui avons fait une proposition : dans certaines circonstances très précises et en OMLT, les infirmiers pourront être remplacés par des aides-soignants ou des brancardiers secouristes ayant suivi une formation de type SC2. Pour cela, nous allons augmenter la durée de cette formation, la portant de cinq jours à quatre semaines.
Nous n'adhérerons pas pour autant à la vision américaine, car nous sommes persuadés que le soutien médical doit toujours se faire au plus près du blessé.