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Intervention de général Gérard Nédellec

Réunion du 7 juillet 2010 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

général Gérard Nédellec :

Monsieur le président, je vous remercie pour la façon dont vous avez présenté le service de santé des armées.

Mesdames, messieurs les députés, avant de répondre aux questions que vous souhaiteriez me poser, je voudrais replacer le service de santé des armées dans son environnement tel que nous le percevons et le vivons au quotidien.

Les textes législatifs et réglementaires relatifs au SSA décrivent son double engagement, et cette mission duale a été clairement affirmée dans le plan stratégique élaboré en 2006 : soutien des forces et concours au service public.

Néanmoins, pour paraphraser le chef d'état-major de l'armée de terre, qui, dans l'un de ses derniers messages, affirme « le soutien opérationnel : notre seule raison d'être », je voudrais aujourd'hui affirmer devant vous que « notre seule raison d'être est le soutien des opérations et le soutien opérationnel des forces ».

C'est la raison pour laquelle je commencerai mon exposé par ce volet opérationnel avant d'aborder la transformation dans laquelle s'est engagé le service depuis un an. Puis j'apporterai quelques éléments d'appréciation au regard de certaines analyses de la performance du service de santé des armées et de son implication dans le service public.

La finalité du SSA est de soutenir les forces françaises déployées en opérations extérieures. Il est dimensionné pour répondre aux contrats opérationnels issus du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.

Des quatre hypothèses génériques d'emploi des forces, la plus contraignante est l'hypothèse H3, qui lui impose, en sus du contrat de protection de 10 000 hommes – posture permanente de sécurité – et d'une force de 5 000 hommes – pour les opérations d'évacuation de ressortissants ou humanitaires –, de soutenir 30 000 hommes, deux bases aériennes projetées et un groupe aéronaval.

Pour le chef d'état-major des armées, détenir un SSA qui peut soutenir les forces dans son scénario le plus « dimensionnant », c'est garantir sa liberté d'action, c'est-à-dire sa capacité à engager des forces sans devoir faire appel à d'autres nations pour son soutien médical.

Ainsi, dans les conditions du scénario H3, le SSA doit être en mesure de déployer 190 postes médicaux, 8 antennes chirurgicales, 4 groupements médico-chirurgicaux, 2 hôpitaux médico-chirurgicaux et un élément chirurgical embarqué pour le soutien du groupe aéronaval. Par ailleurs, ces structures doivent être commandées et ravitaillées.

Un système d'évacuations aéromédicales doit pouvoir être projeté pour évacuer les blessés vers une structure hospitalière de théâtre puis de métropole. Ainsi est constituée une chaîne de santé assurant la prise en charge médicalisée des blessés depuis leur relève, sur le lieu même de la blessure, jusqu'à leur traitement définitif dans un hôpital d'instruction des armées en métropole.

À ce jour, la France reste l'un des deux pays européens, avec l'Allemagne, toujours soumise aux contraintes de la conscription, capable de déployer une chaîne médicale complète.

En ce qui concerne les opérations extérieures, l'engagement opérationnel est resté soutenu en 2009. Même si certains théâtres ont évolué de manière significative, ce qui s'est traduit par la réduction du volume des forces françaises, le théâtre afghan s'est renforcé. Le nombre de blessés pris en charge par la chaîne de santé a été identique à celui de 2008, ce qui témoigne de l'intensité de l'engagement des forces et de l'impérieuse nécessité de disposer d'un soutien médical performant. Il y a quelques jours, nous avons eu deux blessés très graves et un mort.

En Côte d'Ivoire, le recentrage de la force Licorne sur Abidjan a permis de fermer l'antenne chirurgicale.

Au Tchad et en République centrafricaine, le transfert d'autorité de l'EUFOR vers la MINURCAT a conduit à un désengagement de la France et à la fermeture de l'antenne chirurgicale de Birao. Présents au Tchad depuis 1986, les éléments français de l'opération Epervier, déployés sur N'Djamena, Abéché et Faya Largeau, restent en place avec leur soutien médical dédié.

Au large de Djibouti, l'opération Atalanta de l'Union européenne est soutenue par le groupement médico-chirurgical (GMC) Bouffard de Djibouti. La formation des militaires somaliens a débuté en Ouganda et est soutenue par un poste médical français.

En Europe, le départ de la majorité du détachement français de Bosnie a entraîné la fermeture du « rôle 1 » d'Astrée. Le SSA aura été présent dix-huit ans en Bosnie. Le passage en Deterrent présence (force de dissuasion) de la KFOR au Kosovo à compter du 31 janvier 2010, avec une réduction de moitié du contingent français, a conduit à la fermeture du GMC de Plana en octobre. Le nombre de postes médicaux déployés est également réduit en proportion.

L'opération Daman, au Liban, est la seule qui n'a subi, pour le SSA, aucun mouvement d'effectifs.

En Afghanistan, le recentrage des troupes françaises en Kapisa et Surobi pour former la Task Force La Fayette nous a amené à adapter notre dispositif médical. Enfin, à la demande de l'OTAN, le service assure depuis le 8 juillet 2009 le rôle de lead nation du nouvel hôpital de l'aéroport de Kaboul (KAIA). Remplaçant le GMC français de Warehouse, l'hôpital militaire de campagne (HMC) KAIA est reconnu comme un « rôle 3 » par l'OTAN depuis le 1er décembre 2009. En 2009, près de 200 militaires français ont été pris en charge par cette structure chirurgicale française avant d'être évacués en France. Cette structure a assumé 3 630 journées d'hospitalisation pour 426 interventions chirurgicales. Pour les consultations médicales spécialisées, l'HMC KAIA a accueilli 4 128 militaires de la coalition et 2 254 civils afghans.

Les capacités du SSA sont également sollicitées pour des missions intérieures. Le service possède une capacité à traiter les blessés irradiés et radio-contaminés. Les hôpitaux d'instruction des armées sont concernés par différents plans : le plan PIRATOX (risque chimique) avec les modules de décontamination pré-hospitaliers des 9 hôpitaux d'instruction des armées (HIA), les centres d'accueil des contaminés chimiques (CA2C) dans 5 HIA, les modules de contrôle des contaminés chimiques (MC3) dans 2 HIA ; le plan BIOTOX (risque biologique) avec les laboratoires de sécurité biologique de niveau 3 dans l'ensemble des HIA ; le plan PIRATOME (risque nucléaire et radiologique) avec les centres de traitement des blessés radio-contaminés (CTBRC) dans 6 HIA.

Outre ces compétences, le SSA assure aussi la production de produits de santé comme les comprimés d'iodure de potassium – pour les accidents de centrale nucléaire – ou d'Oseltamivir – pour la grippe A (H1N1). Les établissements du SSA sont pris en compte dans les trois directives nationales de sécurité du ministère de la santé – veille et alerte sanitaires, établissements de santé, produits de santé.

Enfin, le SSA participe au renfort des moyens de secours civils sur le territoire national, comme ce fut le cas pour le dernier sommet de l'OTAN à Strasbourg en 2009 et pour la récente pandémie grippale – 8 288 vacations de médecins et infirmiers dans les centres départementaux de vaccination.

Au total, 1 347 personnels du service de santé des armées ont été engagés sur les théâtres d'opérations en 2009, soit 33 % de moins qu'en 2008, dans le droit-fil du niveau d'engagement des armées. En instantané, 42 postes médicaux – terre, air, mer et gendarmerie –, 4 équipes MEDEVAC HM (évacuation sanitaire) et 2 équipes chirurgicales sont désormais déployés. En moyenne, 4 % des personnels en opérations extérieures appartiennent à la fonction santé, proportion stable au fil des années. Ce chiffre monte cependant à 6 % pour le théâtre afghan. La fermeture des trois « rôles 2 » – Birao, Abidjan et Plana – a permis de réduire significativement l'effort demandé aux hôpitaux. Le nombre d'équipes chirurgicales projetées est passé de 38 en 2008 à 18 en 2009. L'année 2010 a vu le passage des mandats à trois mois pour les unités médicales opérationnelles de niveaux 2 et 3, contre deux mois auparavant.

Reflet de notre engagement opérationnel au profit des militaires français, 63 évacuations médicales stratégiques ont été réalisées en 2009, soit autant qu'en 2008, où il y avait eu deux évacuations stratégiques avec le système Morphée. Par ailleurs, 796 RAPASAN (rapatriements sanitaires) ont été réalisés en 2009.

La diminution récente de l'engagement des forces en OPEX ne doit pas masquer la réalité des opérations françaises de ces dix dernières années. Au début des années 2000, 16 500 hommes étaient déployés. En 2006, le SSA déployait encore simultanément huit structures chirurgicales en opérations. À ce jour, environ 10 000 hommes sont répartis sur 25 opérations.

Ainsi, depuis 2005, le SSA aura déployé dans les différentes opérations extérieures 18 hôpitaux, où auront servi 151 équipes chirurgicales. J'ajoute que 1 148 médecins d'unité se sont relayés pour assurer la prise en charge des malades et des blessés.

En moyenne, chaque année, environ 3 000 interventions chirurgicales sont réalisées, dont 80 % au profit de la population locale. En moyenne, le service de santé des armées réalise deux rapatriements sanitaires par jour et une évacuation médicale stratégique par semaine – avec un médecin et, le plus souvent, un réanimateur.

J'en viens à la transformation du SSA. De l'audit particulier de la fonction de santé réalisé dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), le service de santé des armées a pu identifier des « espaces » de rationalisation. Anticipé dès 2005 dans le cadre de réflexions entreprises sur le plan stratégique du SSA, ce mouvement de réforme se traduit par des ajustements de la fonction de santé, en parfaite cohérence avec la démarche de mutualisation entreprise depuis plusieurs années – centres médicaux interarmées, directions régionales interarmées – et les objectifs de sa carte stratégique.

Dans cette période délicate de transformation, le maintien d'un service de santé performant et adapté aux missions des armées reste une exigence d'importance capitale.

Cette transformation vise à améliorer la performance du service en renforçant et en adaptant ses compétences exclusives dont la responsabilité ne peut être déléguée et qui ont trait au domaine médical dans sa globalité. Elle permettra d'offrir une meilleure réponse aux besoins des forces en orientant plus clairement toutes les composantes du service vers sa finalité d'emploi opérationnel et d'améliorer la contribution du SSA à la satisfaction des besoins de la sécurité nationale en faisant de ce service un instrument particulier de l'outil de défense au service des politiques nationale et internationale.

Cette démarche ambitieuse de transformation se traduit par plusieurs axes de réorganisation ou de refondation touchant toutes les fonctionnalités du service.

La mise en oeuvre de la réforme de l'organisation des armées a imposé le transfert au SSA de la maîtrise des différents moyens d'action découlant de sa responsabilité et nécessaires à l'accomplissement de ses missions opérationnelles de soutien en matière de santé. L'instauration des bases de défense expérimentales a pour conséquence la nécessaire réorganisation du soutien médical des forces. Ces évolutions se sont ainsi traduites par une concentration des moyens du service et une optimisation de leur emploi dont l'interarmisation est la condition nécessaire.

Ainsi, les centres médicaux de base de défense expérimentale deviennent des formations organiques du SSA, subordonnées aux échelons intermédiaires du service territorialement compétents. Les moyens en personnel et en matériel sont regroupés dans ces centres médicaux et leurs antennes.

Cette démarche vise à rationaliser les conditions du soutien médical en utilisant au mieux la ressource existante et en offrant ainsi une plus grande souplesse d'emploi grâce au regroupement de moyens précieux, employés dans une logique « interarmées », tout en consacrant une attention particulière à la prise en compte des spécificités de chaque armée, le service maintenant par ailleurs ses missions de soutien au profit de la gendarmerie nationale.

La première préoccupation du service concerne le maintien de la qualité de la préparation médicale des unités et de leur soutien opérationnel, sur les théâtres extérieurs comme sur le territoire national, en optimisant le fonctionnement des centres médicaux, malgré les resserrements imposés par la révision générale des politiques publiques. Les premiers retours d'expériences à l'issue des six premiers mois de fonctionnement et les rapports d'audit des centres médicaux soulignent que les activités de la fonction de santé dans le domaine du soutien des forces sont parfaitement maîtrisées.

L'organisation de la formation initiale des praticiens des armées est refondée, d'une part, pour délivrer une meilleure qualité de formation et, d'autre part, pour s'adapter aux évolutions de la réforme de l'enseignement supérieur et de la recherche – réforme « licence-master-doctorat ». L'objectif est d'obtenir, comme aujourd'hui, un taux de succès significativement plus élevé que celui de la population générale des étudiants, en particulier en médecine. Il s'agit également de renforcer et d'améliorer les formations propres aux armées, tant dans leurs volets « technique » que de préparation au « métier d'officier ». Cette refondation s'accompagne du recentrage de la formation initiale des praticiens sur un seul site permettant ainsi le renforcement, par l'optimisation des moyens mis à la disposition des élèves, de la qualité et du niveau de l'enseignement dispensé. Cela se traduira in fine par une meilleure adaptation de nos praticiens à la réalité de leurs conditions d'exercice.

Une démarche d'adaptation de la recherche du SSA avait été initiée en 2001 sous la forme d'une fédération, avec l'objectif d'optimiser son fonctionnement. Malgré certains progrès, de nombreuses imperfections ont cependant persisté, inhérentes à la dispersion des hommes et des structures, comme le montraient les audits des programmes opérationnels. La taille critique de certaines équipes, des redondances thématiques, des travaux éloignés de la mission, des duplications matérielles et le poids des services de soutien similaires empêchaient tout gain d'efficience. Les démarches entreprises dans le cadre de la révision générale des politiques publiques ont permis de mettre en oeuvre la refondation de la recherche pour en faire un outil plus opérationnel et mieux identifié au profit de la défense et de la sécurité nationale. La recherche biomédicale dans les armées sera ainsi rassemblée sur le site de Brétigny, au sein d'un pôle modernisé unique : l'institut de recherche biomédicale des armées. Ce nouveau dispositif resserré permettra d'apporter, spécifiquement et avec une réactivité adaptée, une meilleure réponse aux besoins de la défense dans les domaines NRBC, des facteurs humains, de l'adaptation de l'opérateur aux systèmes d'armes et du soutien médico-chirurgical des forces. Cette nouvelle organisation prendra en compte les nécessités de transversalité, de synergie et de partage des compétences pour lui assurer un rayonnement national et international, en cohérence avec les autres acteurs de la défense et les partenaires publics et privés.

La rationalisation du dispositif de ravitaillement sanitaire est poursuivie avec un resserrement sur trois pôles, l'effort portant sur l'externalisation des activités hors du coeur de métier, la centralisation de la fonction achats du coeur de métier – en réorientant les achats hors de ce périmètre spécifique vers l'administration générale et le soutien commun (AGSC) pris en charge par le commandement interarmées des soutiens, et l'optimisation des capacités de stockage.

Cette fonction est essentielle pour l'équipement en dotations médicales des unités médicales opérationnelles, le fonctionnement courant des formations et établissements de soins du service, la constitution des stocks nationaux dans le cadre de la participation à la lutte contre les menaces sanitaires terroristes ou naturelles de grande ampleur de type pandémie.

L'organisation du ravitaillement sanitaire à la fin des restructurations reposera sur une chaîne resserrée plus performante, en ce qui concerne tant sa dimension opérationnelle que la qualité du service rendu à ses clients et partenaires.

Enfin, pour ce qui concerne le système hospitalier militaire, le schéma national d'organisation des soins est revu afin de mieux répondre aux exigences croissantes de l'engagement opérationnel et de s'adapter au cadre normatif de la tarification à l'activité. À ce titre, le service redistribue ses ressources lui permettant d'augmenter les spécialités projetables tout en préservant les grands équilibres de spécialités indispensables au bon fonctionnement de ses structures hospitalières. Les populations paramédicales et soignantes seront renforcées par rapport aux populations respectivement médicales et non-soignantes. Des services seront regroupés selon des logiques médico-économiques ou environnementales. Les structures elles-mêmes seront adaptées afin d'atteindre la dimension leur permettant d'optimiser leurs coûts fixes. Ainsi, le besoin opérationnel des forces sera mieux satisfait tout en répondant à une logique de performance économique dépendant des bassins de clientèle et résultant essentiellement du passage des établissements hospitaliers des armées à la tarification à l'activité depuis le 1er janvier 2009.

L'ancrage militaire du service dans le périmètre de responsabilité du chef d'état-major des armées – le directeur central répond devant lui de sa mission de soutien médical des forces – constitue le fondement de la transformation du SSA. Cette situation n'est toutefois pas exclusive des responsabilités que le directeur tient directement du ministre, auquel il rend compte de l'administration de son service ainsi que de la dimension interministérielle de ses missions.

Il s'agit toutefois d'une transformation particulière au sein de la défense en ce sens qu'elle fait porter l'effort non pas sur les effectifs – le format n'ayant pas vocation à changer, malgré la réduction du format des armées – mais sur l'aspect qualitatif de la fonction « santé ». Cette transformation permet néanmoins de dégager des économies au terme de la réforme, reflétant ainsi les efforts de regroupement et de rationalisation.

Dans cette réforme, un soin particulier est apporté à l'amélioration des conditions d'exercice et de la pratique médicale dans les armées, tout en conservant au lien particulier qui unit le service aux armées son caractère fondateur.

Par ailleurs, la mise en place de nouveaux dispositifs plus concentrés vise à développer des interactions avec d'autres acteurs en dehors du ministère, en particulier les établissements de santé publique, hospitaliers ou de réponse aux urgences sanitaires de grande ampleur, ou encore les acteurs de la recherche nationale.

Dans ce contexte de profondes mutations, le service a été audité par la Cour des comptes, qui s'est principalement appuyée sur les données des années antérieures pour ses travaux. La Cour développe son argumentation à partir d'un postulat exactement contraire aux principes évoqués jusqu'ici : pour elle, l'existence des hôpitaux des armées ne se justifierait que par leur seule participation au service public hospitalier. Or, les hôpitaux des armées sont une composante militaire à part entière dont le concours du service public hospitalier permet de maintenir au plus haut niveau la compétence de leurs équipes chirurgicales, tout en atténuant leur coût de possession.

Les formations de l'ensemble hospitalier militaire doivent bien être considérées comme des outils sans véritable équivalent dans le secteur public, dès lors qu'elles sont les seules à pouvoir dériver des structures de soutien médical opérationnel en assurant l'entretien des compétences. Certes, leur coût de possession est amorti par leur participation aux missions de service public, mais elles satisfont, dans leur bassin de clientèle, un besoin de santé qui peut, en effet, être jugé opportun, en ce sens qu'il procède d'un intérêt général bien compris, mais certainement pas opportuniste.

De fait, le contrat opérationnel constitue bien le facteur « dimensionnant » des différentes composantes du service et les missions qui en découlent sont effectivement définies et « priorisées » par l'état-major des armées.

L'exemple français constitue donc un système original et équilibré dont la pertinence a été souvent soulignée.

Les constats de sous-activité de l'ensemble hospitalier militaire comparé à des structures civiles, présentées comme équivalentes en termes de capacité et d'effectifs, dominent le rapport et donnent une impression, partiale parce que partielle, d'acceptation résignée que le service ne peut admettre. En effet, l'approche de la Cour se fonde sur un postulat inexact, considérant que les HIA sont des hôpitaux généralistes classiques, c'est-à-dire en tous points comparables en termes de clientèle et d'activité, de structures de charges, de typologie statutaire et professionnelle, alors qu'ils sont différents pour chacun de ces points.

Cette qualification appelle quelques compléments d'information.

La première observation touche au mode de présentation comptable. Le SSA bénéficie d'un compte de gestion dont le résultat, par principe, est nul puisque les services « producteurs » du ministère n'ont pas vocation à dégager un bénéfice ou une perte. Il s'agit bien, dans le concours des HIA au service public, de contribuer à une atténuation du coût de possession de l'outil pour la défense.

Par ailleurs, la typologie des recettes n'est pas homogène avec celle de la santé publique. Aux activités médicales classiques, il convient d'ajouter un certain nombre de prestations régaliennes, souvent, il est vrai, mal comptabilisées ou non valorisées, comme par exemple l'enseignement, les missions d'expertise et de représentation du service. Il faut en outre souligner que, pour répondre à ses spécificités opérationnelles, le service oriente volontairement l'activité de ses hôpitaux vers les activités de type MCO – médecine, chirurgie, obstétrique – même si cela le prive de certaines activités plus rentables. Les activités de MCO représentent 86 % de l'activité des HIA, contre 56 % dans les hôpitaux publics. Cette orientation de l'activité se justifie par le recrutement propre qu'elle induit, nécessaire au maintien des qualifications techniques de ses praticiens.

Enfin, l'impact des OPEX sur l'activité des HIA ne doit pas être sous-estimé. La contribution hospitalière au soutien des OPEX, qui se situe au coeur de la mission du service, est présentée comme marginale – 2 % des praticiens et 4 % du personnel paramédical – et potentiellement compensée par le faible taux d'absentéisme du personnel sous statut militaire. Ces chiffres, qui rendent compte de l'impact en « instantané » des OPEX sur l'ensemble des personnels des HIA, ne doivent pas occulter une autre réalité : l'impact particulier des OPEX sur la population spécifique représentée par les équipes chirurgicales. La participation de ces équipes, à la fois concernées par un sous-effectif conjoncturel mais également au coeur de l'activité hospitalière, s'élève à 25 % dans certains HIA. Ainsi, au cours de la période concernée par l'audit de la Cour, ce sont entre 29 et 38 équipes chirurgicales qui se sont succédé chaque année sur les quatre à sept théâtres d'opérations majeures auxquelles participait la France.

Néanmoins, certaines pistes d'amélioration de l'efficience du service sont étudiées, et c'est en ce sens que le SSA s'est pleinement inscrit dans la dynamique interministérielle insufflée par la RGPP en se fixant un plan d'action à moyen et long termes, touchant l'ensemble de ses composantes, guidé par des principes d'amélioration de sa performance intrinsèque au profit des forces.

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