Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 30 juin 2008 à 22h00
Règlement des comptes et rapport de gestion pour 2007 — Santé

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie pour la teneur comme pour le ton de vos observations, qui ont largement dépassé la simple analyse du budget pour se porter sur les questions de fond. Il arrive même que vos interrogations dépassent largement mes compétences. Ainsi, on m'a beaucoup interpellée sur la médecine du travail – je vous invite, madame Fraysse, à poser ces questions au ministre du travail à l'occasion du règlement de son budget –, ainsi que sur la médecine scolaire, qui relève du ministre de l'éducation nationale.

En ce qui concerne les groupements régionaux de santé publique, les GRSP, monsieur Terrasse et monsieur Mancel, l'instauration par la loi de 2004 d'un plan régional de santé publique, qui permet de globaliser l'ensemble des priorités de santé publique d'une même région, est une avancée importante. Les futures agences régionales de santé vont d'ailleurs prendre appui sur ces plans pour développer une politique régionale de prévention et de promotion de la santé.

Les GRSP ont été créés sous forme de groupement d'intérêt public. Sous la présidence du préfet de région, ils mettent en oeuvre la politique régionale de santé. S'ils ont permis la mise en place d'un financement unique au niveau régional, tout le monde s'accorde à dire qu'il s'agit de structures complexes et peu opérationnelles. Si leur mise en place a été difficile, ils ont connu toutefois à la fin de 2007 une montée en charge, qui se poursuit en 2008 et ils jouissent désormais d'une véritable visibilité régionale.

Cette visibilité a conduit les services déconcentrés de l'État relevant d'autres ministères, ainsi que les collectivités territoriales à intégrer cette dimension nouvelle, ce qui a fait notoirement progresser la cohérence des financements et des partenariats depuis un an. La mise en place des ARS constitue donc à court terme une excellente opportunité d'améliorer l'efficience du dispositif.

Les conférences régionales de santé ont, elles, permis de débattre en régions de santé publique, et d'attirer l'attention des pouvoirs publics sur des questions comme les inégalités sanitaires, l'accès aux soins, les dépassements d'honoraires ou la démographie médicale.

Bien entendu, monsieur Mancel, la prévention et la santé publique auront toute leur place au sein des ARS. Je pense précisément que l'isolement de la politique de prévention au sein des politiques de soins nuit à l'efficacité de notre système de santé au niveau territorial.

Je suis tout à fait d'accord avec vous, madame Fraysse : le généraliste, médecin de premier recours, est l'acteur central des politiques de santé publique. Encore doit-il disposer de certains outils, que nous allons lui donner, ou que nous lui avons déjà donnés. Ainsi, le mode de rémunération alternatif au paiement à l'acte, prévu par la loi de financement de la sécurité sociale et dont nous sommes en train de mettre en place les modalités pratiques, est un outil remarquable pour mener des politiques auxquelles le paiement à l'acte n'est pas adapté.

Je souhaite que la politique de prévention et de santé publique soit le titre Ier de la loi « santé, patients et territoires ». Elle sera dotée d'outils tels que la territorialisation des politiques de santé publique et sera sanctuarisée par un mécanisme de fongibilité asymétrique qui permettra de prélever, le cas échéant, des crédits du curatif pour les affecter à la prévention, mais jamais l'inverse – malgré la tentation qui se fait parfois sentir d'affecter au curatif des crédits destinés à la prévention. Ce sont là des éléments très importants.

Quant aux médecins inspecteurs de santé publique, ils jouent, madame la députée, un rôle essentiel au sein de notre ministère. J'ai d'ailleurs présidé récemment leur journée annuelle et leur ai fait part des importantes avancées indemnitaires que j'ai pu obtenir pour eux. J'ai aussi obtenu l'accroissement du ratio entre le nombre de promus et le nombre de promouvables pour cette filière, qui permettra d'accélérer leur parcours de carrière. Une réflexion plus générale sera entamée prochainement dans le cadre de la mise en place des agences régionales de santé – les ARS – et nous pourrons progresser sur cette question.

M. Mancel et M. Terrasse m'ont interrogée sur les crédits consacrés au cancer. De fait, certaines régions ont imputé l'intégralité de la subvention versée au groupement régional de santé publique à l'action 1, « Pilotage de la politique de santé publique », en grande partie à cause des règles locales d'imputation budgétaire, qui diffèrent selon les contrôleurs financiers – ce qui d'ailleurs ne permet d'ailleurs pas au système comptable de l'État de mettre en évidence la destination finale de la dépense.

Avec la montée en charge des groupements régionaux de santé publique, les systèmes d'information budgétaire mis en place permettent désormais de retraiter les données budgétaires. On constate ainsi que les dépenses réelles liées à la lutte contre les cancers atteignent un peu plus de 30 millions d'euros. Vous prêtez attention à juste titre à ces dépenses, inférieures à la prévision qui autorisait un niveau réel de dépenses de 54 millions d'euros. L'écart s'explique principalement par la non-utilisation d'une partie des crédits prévus pour le maintien à domicile et, en effet, par une dépense inférieure au montant prévu pour le dépistage.

À l'inverse, les DRASS peuvent allouer les dépenses en fonction des priorités régionales, dans le cadre des délégations de gestion données aux responsables de budgets opérationnels de programmes. Ainsi, les dépenses réellement consacrées à la lutte contre le tabagisme sont nettement supérieures aux prévisions de la loi de finances initiale, avec une augmentation de 59 %. Il en est de même pour la lutte contre l'alcoolisme, avec une augmentation de 53 % par rapport aux mêmes prévisions, qui traduit la prise en compte au niveau régional de cette priorité politique nationale et démontre la dynamique qui s'est mise en place à la suite des États généraux de l'alcool.

Pour ce qui concerne le dépistage des cancers, à propos duquel vous m'avez pratiquement tous interpellée, le programme national organisé pour le dépistage du cancer du sein permet aux femmes de 50 à 74 ans de réaliser une mammographie tous les deux ans. Comme vous le notiez, monsieur de Courson, le taux de participation n'atteint que 50,7 %, même s'il est très supérieur dans quatre départements, dont le Maine-et-Loire, qui atteint le seuil souhaitable de 70 % – je ne résiste pas au plaisir de vous communiquer cette information, même si elle tient sans doute aussi au fait que le président national de la Ligue contre le cancer vient de ce département. (Sourires.)

Je tiens cependant à souligner que ce sont les femmes connaissant les situations de plus grande précarité qui sont les moins accessibles aux politiques de dépistage. Ce n'est pas d'une question d'argent, car ces dépistages sont gratuits. Le problème n'est pas celui de l'accès financier aux soins, mais de l'accès culturel. Je souhaite donc que ces questions de précarité soient un fil rouge de toutes mes politiques de santé. Il est important que les populations les plus en difficulté disposent d'accompagnements spécifiques.

L'année 2007 a également vu la généralisation, avec trois appels à candidature des départements, du dépistage du cancer colorectal organisé pour les femmes et les hommes de 50 à 74 ans. Le taux de participation actuellement connu pour les opérations pilotes est de 43 %, ce qui est prometteur. L'évolution de la dépense prévisionnelle est liée à l'évolution du taux de participation, mais aussi à une bonne efficience du programme, conditionnée par la réalisation d'économies d'échelle par les structures de gestion à mesure que les programmes se déploient.

Plusieurs questions ont été posées sur l'évolution de la maquette budgétaire. Le resserrement de l'architecture budgétaire réalisé grâce au regroupement des programmes au sein de la mission « Santé » facilitera la lecture du coût des politiques publiques dans le champ de la santé. Le programme « Veille et sécurité sanitaires » sera inclus dans la mission « Santé », fusionné avec le programme « Santé publique et prévention ». Sera ainsi créé un nouveau programme « Prévention sécurité sanitaire ». Le programme « Protection maladie » sera lui aussi inclus dans la mission « Santé ». En revanche, le programme « Lutte contre la drogue et la toxicomanie » sera intégralement transféré à la mission « Direction de l'action du Gouvernement ». Les moyens de fonctionnement et en personnel avaient déjà été transférés par le projet de loi de finances pour 2008 et cette évolution, qui donnera une plus grande visibilité au caractère interministériel de ces actions de coordination, correspond en outre à des demandes réitérées du Parlement.

Ces mesures sont également conformes aux recommandations des différents rapports relatifs à la mise en oeuvre de la LOLF, notamment ceux du Comité interministériel d'audit des programmes. Je ne doute pas que le président Migaud, M. de Courson et M. Carrez seront particulièrement attentifs au fait que nous suivions ces recommandations.

Il a été décidé de ne pas scinder le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » et de le maintenir dans le périmètre du ministre du travail. Je participerai toutefois, comme l'an passé, à son pilotage.

De nombreuses réorganisations sont bel et bien en cours dans le cadre de la RGPP. Ainsi, les directions Support du secteur Santé et solidarité et du secteur Jeunesse, sports et vie associative seront prochainement fusionnées, ce qui correspond d'ailleurs à la logique du nouveau périmètre ministériel.

Dans le domaine de la lutte contre la drogue, à propos duquel m'ont interrogée encore Pascal Terrasse et Jean-François Mancel, le programme était doté en loi de finances initiale de 36,2 millions d'euros. L'exercice a enregistré des reports de 2006 et c'est sur une base de 34,2 millions d'euros de crédits ouverts qu'est appréciée la consommation des crédits de ce programme.

Tous les projets s'inscrivent dans le cadre du nouveau plan gouvernemental de lutte contre la drogue et la toxicomanie préparé par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie – la MILDT – avec l'ensemble des ministères concernés. Je ne détaillerai pas ce plan, qui sera annoncé avant la fin du mois de juillet à l'issue d'une réunion du Comité interministériel de lutte contre la drogue présidée par le Premier ministre. Le nouveau plan gouvernemental s'attachera à réduire la consommation de drogue et le nombre d'usagers par l'intermédiaire de trois grands objectifs opérationnels : prévention à l'intention des entrants en consommation, particulièrement chez les jeunes, effort d'information et de communication et, en nous appuyant sur les avancées inscrites dans la loi de prévention de mars 2007, mise en oeuvre de stages de sensibilisation sur les dangers des drogues. Il faut mener une action résolue pour diminuer l'offre des produits, lutter contre le trafic et développer des moyens d'investigation innovants afin de saisir et de confisquer l'argent de la drogue. Il convient de poursuivre la diversification de la prise en charge sanitaire des usagers – c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je me suis rendue récemment au centre Beaurepaire pour voir avec les acteurs de terrain la réalité de la lutte contre la drogue et de la prise en charge de ses usagers.

Plusieurs questions ont encore été posées sur l'adéquation entre les missions et les moyens. L'objectif du ministère est, bien entendu, de garantir la qualité du service, mais il nous faut faire, à la faveur des prochains départs à la retraite, un effort d'introspection et dégager des marges de manoeuvre pour recruter les compétences dont nous avons besoin et faire évoluer les métiers. Le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux est une opportunité qu'il nous faut saisir pour améliorer les conditions de travail et la professionnalisation et nous y réfléchissons avec les organisations syndicales. Il s'agira également d'améliorer l'environnement professionnel des agents. Il est possible de concilier le souci de mieux servir nos concitoyens, de mieux répondre à leurs attentes en nous recentrant sur nos coeurs de métier, et l'exigence du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

Au cours des prochaines années, nous devrons répondre à de nombreux défis – le vieillissement de la population, la réorganisation de notre système de santé, l'accès de tous à des soins de qualité. Face à ces grands enjeux, la mission du ministère ne peut que perdurer – je réponds ainsi à M. de Courson, qui demande pourquoi conserver un ministère de la santé plutôt que d'en transférer toutes les missions à l'assurance maladie, à ses 152 milliards.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion