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Intervention de Germinal Peiro

Réunion du 2 juillet 2010 à 9h30
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 10 bis

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGerminal Peiro :

Cela dit, je me suis aperçu à quel point nous leur rendrions un mauvais service en votant cet article. En effet, nous rallumerions au niveau national une guerre entre les éleveurs et le reste de la société.

Même s'il y a, en Bretagne, des algues vertes et des nitrates dans les rivières, cette affaire n'est pas bretonne. Ce sont des problèmes qu'on rencontre partout aujourd'hui ; ils remplissaient dimanche dernier une plein page de Sud-Ouest Dimanche, qui couvre neuf départements. Le problème est national.

Je pense sincèrement que, si nous poursuivons dans la voie que vous avez empruntée, nous rendrons le plus mauvais service qui soit au monde agricole. En effet, nous savons avec certitude que, depuis un siècle, les activités humaines ont totalement pollué les masses d'eau de notre pays. Nous savons tous que nous ne pourrons pas respecter la directive-cadre européenne qui nous impose de revenir d'ici 2015 à un bon état écologique des cours d'eau pour 70 % des masses d'eau.

Nous savons tous aussi d'où viennent les pollutions. Elles sont d'origine industrielle et sont causées par les métaux lourds, le chlore et les PCB. Songez, mes chers collègues, que, bientôt, nous ne pourrons plus consommer les poissons pêchés dans la moitié des rivières de France. On a tué la pêche professionnelle sur le Rhône, la Saône et la Seine. Nous sommes à la veille d'interdire la consommation des poissons de la baie de Seine, autrement dit des poissons pêchés en mer ! Nous sommes aussi à la veille d'interdire la consommation des poissons pêchés en Méditerranée face au delta du Rhône : voilà la réalité ! Monsieur Dionis du Séjour, vous savez parfaitement que, depuis quelques mois, la consommation des anguilles de la Garonne est interdite en raison de la pollution par les PCB.

Ces pollutions sont d'origine industrielle et urbaine – en tant qu'élus nous avons d'ailleurs notre part de responsabilité en la matière –, mais aussi d'origine agricole. Or nous avons plus travaillé sur les pollutions industrielles et urbaines que sur les pollutions agricoles, car les premières se voient plus que les secondes. Le gros problème des pollutions agricoles, c'est qu'elles sont diffuses et qu'il est extrêmement compliqué de les traiter. Elles proviennent des intrants disséminés sur les millions d'hectares de notre territoire et des épandages. Il est très difficile de les repérer. Reste qu'en Bretagne nous sommes arrivés à trouver l'origine des pollutions.

Je considère donc que, partant d'une bonne intention, vous rendez un très mauvais service au monde agricole que vous voulez pourtant soutenir. Cette mesure sera à l'origine d'une nouvelle stigmatisation des agriculteurs et des éleveurs. Il ne vous a pas échappé que, depuis que nous débattons de la LMA, personne ne s'intéresse vraiment à ce projet de loi. Avez-vous lu la presse hier, aujourd'hui ou au lendemain des réunions de la commission ? Il n'y avait rien sur le projet de loi lui-même, alors que pas un seul jour ne passe sans un article sur les algues vertes et la pollution des eaux.

Le monde agricole a besoin de soutien. Il reçoit 10 milliards d'euros par an grâce à la PAC, et nous nous battrons tous pour que ces montants soient maintenus parce qu'ils sont indispensables. Cependant, la société n'acceptera ces soutiens à l'agriculture que si les méthodes de culture et d'élevage évoluent.

Pour régler un tout petit problème technique, localisé à un endroit précis, on va jeter l'opprobre sur l'ensemble des agriculteurs. Il va donc falloir recommencer ce travail considérable qui consiste à convaincre que ces derniers ne sont pas des pollueurs, qu'ils doivent être les premiers défenseurs de l'environnement. Si vous voulez que ce discours soit crédible, monsieur Le Fur, il faut les aider à adapter leurs méthodes, au lieu de tendre les bâtons pour qu'ils se fassent battre, comme vous êtes en train de le faire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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