Ce n'est pas incompatible. Les corps n'ont pas empêché de fabriquer beaucoup de profils différents. On doit avoir 5 000 ingénieurs des TPE qui vont du sociologue au spécialiste du béton précontraint en passant par le statisticien-économiste. La population des attachés aussi est très diversifiée. Cela concerne surtout les A et les A+, dont on attend une spécialité professionnelle, même si nous développons la gestion de la catégorie B par profil et par métier. Depuis quinze ou vingt ans, les concours sur titres se sont développés, pour recruter des gens qui ont un profil ne correspondant pas à nos formations. Par exemple, le spécialiste du béton précontraint se trouve à l'École nationale des travaux publics d'État (ENTPE), qui m'en fournit autant qu'il m'en faut. Mais il y a des profils pour lesquels la mise sur pied d'une filière de formation coûterait exagérément cher : il nous a ainsi fallu trouver deux ou trois spécialistes des nanostructures pour l'un de nos laboratoires de recherche. Nous sommes allés les chercher à l'université, mais leur proposer un CDD n'aurait pas suffi à les attirer car les entreprises se les arrachent. Notre argument, c'est la stabilité d'un corps d'ingénieurs. Nous avons donc un concours sur titres d'ingénieurs TPE pour recruter de dix à trente personnes par an, et, parallèlement un concours d'attaché autour du logement social. On s'est posé la question d'en organiser un pour la loi DALO, mais on a finalement préféré des gens plus aguerris.
Comme nous gérons une population de 10 000 à 12 000 cadres, nous proposons des formations professionnalisantes et nous n'allons chercher dehors que ce que nous n'arrivons pas à fabriquer nous-mêmes. Dans cette optique, nous avons beaucoup développé depuis une quinzaine d'années les allers-retours avec d'autres ministères ou des opérateurs publics ou semi-publics. L'Environnement, notamment, allait « se servir » dans les agences de l'eau. Cette piste devait continuer à être explorée, notamment avec le ministère de l'agriculture puisque nous voyions se rapprocher la fusion DDE-DDAF. Le détachement n'était pas une solution. Le procédé concernait des fonctionnaires, dotés d'une certaine expérience, généralement bons, ce qui fait que, souvent, ils venaient d'être promus, ou qu'ils étaient en passe de l'être. La CAP du ministère d'arrivée renâclait parce que cela faisait un poste de moins. Bref, on n'y arrivait pas. On s'est donc mis d'accord pour s'échanger les gens, en les mettant en position normale d'activité, ce qui veut dire que le ministère employeur paie, mais que la personne continue d'être gérée par son ministère d'origine, ce qui évite les prises de bec. Au bout de trois ou quatre ans, si la personne en question veut rester, il est beaucoup plus facile d'obtenir son détachement parce que tout le monde la connaît. La DGAFP s'est montrée très intéressée au point de généraliser le dispositif dans ses derniers décrets. C'est un apport Agriculture-Équipement, et je m'en réjouis. Il nous arrive même de prendre des fonctionnaires territoriaux ainsi que des militaires, avec la professionnalisation de l'armée – et nous sommes très contents du résultat.