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Intervention de Jean Luckner Bonheur

Réunion du 6 mai 2009 à 14h00
Délégation à l’aménagement et au développement durable du territoire

Jean Luckner Bonheur, coopérative de producteurs de café Recocarno au Cap haïtien :

Je représente le réseau des coopératives caféières de la région Nord – le Recocarno- dont je suis le coordonnateur exécutif. Je remercie les responsables des Cafés Malongo de m'avoir donné l'occasion de parler de mon organisation et de notre perception du commerce équitable. Notre réseau est constitué de huit coopératives. Il compte 6 500 membres dont 43 % sont des femmes. Ce réseau est géré par un conseil d'administration de sept membres, tous producteurs et productrices. Son expertise s'exerce dans la production et la commercialisation du café vert.

Le commerce équitable garantit un prix minimum aux producteurs, qui ne subissent pas les fluctuations du prix du café sur le marché international. Le marché équitable a, en quelque sorte, assaini les relations commerciales entre les petits producteurs de café et les consommateurs en les mettant en contact direct. L'existence du marché équitable et le prix minimum garanti qu'il offre a permis aux producteurs, femmes et hommes, de faire des gains substantiels et de réaliser des conquêtes. Ainsi, le Recocarno vend son café sur le marché équitable depuis bientôt onze années, au cours desquelles bien des changements se sont produits dans la vie du réseau et de ses membres.

Sur le plan économique, ce prix a permis la valorisation du café sur le marché haïtien. Le rôle joué par le commerce équitable dans la régulation des prix du café sur le marché national est fondamental : ainsi le prix du café a été décuplé en dix ans. Tous les producteurs de café, qu'ils soient organisés ou qu'ils ne le soient pas, bénéficient de ces avantages.

Sur le plan social, le prix minimum garanti par le commerce équitable est motivant et stimule la création de beaucoup d'entreprises coopératives exportatrices de café. Ces organisations, par leur fonctionnement démocratique et transparent et en raison des actions de formation menées, se renforcent et se positionnent sur le marché du café. Les spéculateurs et les exportateurs traditionnels qui exploitaient les producteurs ont ainsi tendance à disparaître du circuit commercial. L'impact de cette évolution est vivement ressenti par les ménages, dont la qualité de vie est nettement meilleure grâce à l'augmentation des revenus et à l'amélioration de l'alimentation par le développement de cultures alternatives - maraîchage, igname, banane. Les producteurs sont ainsi toujours plus motivés à fournir un produit sain et de grande qualité.

La prime du commerce équitable offre aux organisations l'avantage d'investir là où les services sociaux de base manquent. Elles investissent beaucoup dans les infrastructures routières et de commercialisation, dans la construction d'écoles primaires dans les zones les plus reculées du pays et en parrainant des enfants dont les parents ne pouvaient payer la scolarité. Elles construisent des marchés publics, des salles d'attente pour les passagers dans les gares routières, des ponceaux dans les zones d'accès difficiles par temps pluvieux. Elles électrifient les centres de préparation du café pour prolonger les journées de travail ; elles investissent, enfin, dans la formation de tous, dirigeants et membres de base, pour renforcer leurs capacités productives, organisationnelles et institutionnelles.

Sur le plan politique, le plaidoyer mené en faveur de la culture caféière en tant que culture stratégique a sensibilisé les décideurs politiques et les a contraints à créer un Institut national du café dont l'objectif, clairement défini, est d'encadrer les organisations de producteurs de café.

Sur le plan environnemental, le prix minimum garanti par le marché équitable est un puissant levier motivant les producteurs à travailler à la relance de la culture caféière. Les techniques agro-écologiques utilisées sont sans incidences sur l'environnement, les producteurs n'utilisant ni engrais ni pesticides chimiques. En Haïti, la déforestation est un problème majeur. Les caféiers plantés sont de la variété Arabica typica, une variété de montagne humide qui se cultive sous ombrage ; ainsi, l'objectif de l'organisation et l'enthousiasme des producteurs à promouvoir la culture caféière ont favorisé le reboisement des montagnes par la production, en moyenne annuelle, de 500 000 plantules d'arbres forestiers et de caféiers.

Le commerce équitable assure donc un débouché stable aux producteurs et garantit la santé des consommateurs en leur offrant un produit sain et de qualité. Nous devons travailler, ensemble, à sa pérennisation. (Applaudissements)

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