Mes propos seront extrêmement sévères. C'est la première fois, dans l'histoire du Parlement, qu'une Commission organise deux auditions pour réagir à des mauvais résultats de l'équipe de France de football. Cet échec au Mondial d'Afrique du Sud a entraîné une multiplication de déclarations d'acteurs politiques et sportifs. Une médaille au moins a été gagnée : celle de la démesure. La majorité, à l'évidence, se sert du football pour éviter de parler des retraites ou de la fraude fiscale. Elle a proposé une loi, puis une commission d'enquête parlementaire et même, ce matin, une pétition contre la Fédération internationale de football association (FIFA) afin d'obtenir le recours à la vidéo pour l'arbitrage. La stratégie de diversion est manifeste.
Le débat ne doit pas porter sur la performance sportive de l'équipe de France. Nous avons perdu parce que nous n'étions pas à la hauteur de la compétition, qu'il s'agisse de la phase finale comme des qualifications. Le débat est davantage moral et politique : les joueurs et l'entraîneur se sont éloignés du sport populaire, que nous aimons tous, pour rejoindre le sport business.
Les membres de la majorité ont beau jeu aujourd'hui d'élever la voix et de pourfendre le sport business alors que, depuis le début de la législature, tous les textes sur lesquels nous avons eu l'occasion d'échanger à propos du sport tournaient autour de l'argent, des agents sportifs, des paris, à l'instar de la loi de modernisation de l'économie et de la suppression du droit à l'image collectif, le DIC. Nous avons systématiquement essayé de vous ramener vers les thèmes de la politique sportive, de la force que représentent les joueurs pratiquant chaque week-end le football et leurs entraîneurs. Ce sont les premiers à être meurtris aujourd'hui.
Dans un premier temps, le président de la FFF a été encensé – les reportages vidéos sont éclairants. Puis, il ne s'en est pas caché, la pression politique qui s'est exercée sur lui a été trop forte. L'intégrité et l'esprit de responsabilité de ce représentant du football amateur l'ont poussé à démissionner.
Alors que les clubs professionnels de football semblent désireux de « lancer une OPA » sur la FFF, un débat doit être ouvert sur les places respectives du football amateur et du football spectacle. Des représentants du football professionnel ont déclaré que l'équipe de France doit désormais être gérée comme un club professionnel, avec des dirigeants responsables devant des actionnaires. Ne convient-il pas simplement de permettre aux instances du football de se retourner vers elles-mêmes ? Ne convient-il pas de proposer une gouvernance tenant compte de cette richesse si malmenée, qui ne mérite pas une telle démesure mais plutôt un peu de respect ?