Monsieur le ministre d'État, personne ne conteste cette mesure de solidarité, qui est assez exceptionnelle et qui a été mise en place très rapidement. Sauf qu'elle a été appliquée d'une manière uniforme dans des endroits qui ne l'étaient pas. Elle a été fort bien été accueillie à La Faute-sur-Mer ou à Charron – où sont localisées les offres de France Domaine. Ailleurs, des problèmes se posent.
Je voudrais revenir sur le délai de détermination des zonages : entre la circulaire du 18 mars aux préfets, signée par votre directeur de cabinet, et le 21 mars, date qui leur était imposée pour remettre leurs cartes de zones d'extrême danger. Cela me paraît un peu court, pour ne pas dire extrêmement court, pour ne pas dire tout à fait surprenant !
Les expertises ont été menées de façon superficielle, de l'avis de tous les maires qui y ont assisté sur le terrain – encore faut-il qu'ils aient rencontré des experts… Et elles leur ont été présentées de façon encore plus brutale. Certains d'experts que nous avons auditionnés, n'ont pas remis d'expertise à proprement parler. L'un d'eux nous a même confié que le délai de la commande était strictement incompatible avec un travail au résultat avéré ! Cela signifie que les zones de solidarité ont été tracées avec quelque légèreté !
Il semblerait enfin que les dernières décisions ne s'appuyaient que sur une seule expertise.
Il y a également beaucoup à dire sur le discours utilisé.
Sous le coup de la terreur, on a d'abord annoncé qu'il faudrait « tout raser ». C'est ce qu'envisageait le préfet de Charente-Maritime, le jour de Pâques, pour le village des Boucholeurs – à l'époque en zone rouge. Il y avait de quoi s'inquiéter.
Heureusement, le 15 avril, vous êtes venu en Charente-Maritime et vous avez « redressé » le discours. À partir de ce moment-là, on n'a plus parlé de « zones noires », mais de « zones de solidarité ».
Le 8 juin 2010, dans un courrier que vous m'aviez adressé, vous indiquiez qu'il y avait trois solutions : premièrement, l'acquisition amiable dans les zones de solidarité ; deuxièmement, en cas d'extrême danger, la déclaration d'utilité publique selon une procédure rodée, au terme de laquelle le juge se prononce ; troisièmement, et je vous cite : « Comme indiqué dans mon courrier du 15 avril 2010, des expertises complémentaires seront menées au cas par cas, afin d'examiner si les critères justifiant un extrême danger sont bien remplis pour les logements concernés. Si tel n'est pas le cas, les logements ainsi considérés seront retirés de la zone de solidarité et ce, avant même le lancement de l'enquête publique relative à la procédure de déclaration d'utilité publique ».
Les choses étaient donc parfaitement claires et je dois dire que, sur ces éléments, tout le monde pensait que cela se passerait relativement bien. Mais ce n'est pas tout à fait ce que l'on constate sur le terrain, monsieur le ministre d'État. À en croire les lettres des préfets adressées aux maires, notamment à ceux de Fouras et de Châtelaillon, qui se trouvent dans des zones qui auraient dû faire l'objet d'expertises complémentaires, il n'y a plus que deux solutions : la vente amiable ou la procédure. Je tiens ces lettres à votre disposition.
Celle que le préfet de Charente-Maritime a envoyée à des habitants de la zone noire va dans le même sens. En voici quelques extraits :
« Une partie de votre propriété est située dans cette zone de solidarité. J'ai donc souhaité, comme je l'ai déjà fait pour les habitants des autres communes concernées par les zones de solidarité, m'adresser directement à vous.
« Par une mesure exceptionnelle de solidarité nationale, le Gouvernement a décidé de vous proposer une acquisition amiable », précisant dans sa lettre : « au prix du marché avant la tempête ». Puis il ajoute : « Ainsi que l'a indiqué le Gouvernement, vous pouvez ne pas souhaiter souscrire à cette offre d'acquisition amiable. Une déclaration d'utilité publique, pour raisons de sécurité, sera alors mise en oeuvre, dans le cadre de laquelle sera effectuée une expertise […] de chaque parcelle,… »