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Intervention de Nora Berra

Réunion du 24 juin 2010 à 15h00
Débat sur la rupture conventionnelle du contrat de travail

Nora Berra, secrétaire d'état chargée des aînés :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, vous avez souhaité discuter aujourd'hui du dispositif de rupture conventionnelle, procédure introduite par la loi de modernisation du marché du travail du 25 juin 2008, à la suite de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008.

En introduction, et sans vouloir anticiper sur les propos qui seront tenus dans cet hémicycle, je voudrais partager avec vous quelques constats... cinq précisément.

Le premier est de l'ordre du rappel, mais il est essentiel. C'est le constat que ce dispositif constitue l'un des symboles de notre maturité politique. En effet, la rupture conventionnelle est le fruit d'un accord signé par la quasi-unanimité des partenaires sociaux, au terme de seize réunions de négociation. Cet accord a été le premier résultat tangible de la procédure instituée par la loi de modernisation du dialogue social. Ce sont donc les partenaires sociaux eux-mêmes qui ont initié ce nouveau mode de rupture des contrats de travail à durée indéterminée. Pour sa part, le Gouvernement a répondu aux attentes exprimées. Il a proposé un projet de loi, afin de rendre effectivement applicable cette procédure. Nous avons également répondu à la demande des partenaires sociaux pour que les ruptures conventionnelles soient soumises au contrôle d'homologation des directions départementales du travail. Nous avons aussi animé un groupe de travail tripartite, afin de bâtir le modèle de document à utiliser, comme ils nous l'avaient demandé.

Le second constat que je voudrais partager avec vous, c'est que la possibilité de rompre « à l'amiable » le contrat de travail existait avant la loi du 25 juin 2008, mais sans cadre juridique clair. C'était le juge qui précisait, au gré des affaires qui lui étaient soumises, si la volonté commune des parties pouvait défaire le contrat de travail qu'elles avaient noué des années auparavant. Cette situation n'était satisfaisante ni pour le juge, alors contraint de pallier la lacune des textes, ni pour les parties au contrat de travail, souvent conduites à maquiller une rupture réciproquement souhaitée en une fausse démission ou un faux licenciement... À cette impasse juridique, la procédure de rupture conventionnelle a apporté une réponse, un cadre juridique clair, limité, précis dans ses conditions autant que dans ses effets et assorti de nombreuses garanties.

Avec presque deux années de recul – et c'est mon troisième constat – il faut souligner que ce dispositif a trouvé sa place et qu'il a démontré sa pertinence. En effet, depuis 2009, le recours à cette procédure est globalement en train de se stabiliser : un peu moins de 50 000 ruptures conventionnelles homologuées chaque trimestre en 2009 ; un peu plus de 50 000 ruptures conventionnelles homologuées sur le premier trimestre 2010. Cette stabilisation se constate aussi du coté des refus d'homologation : ce taux, de 14 % au premier semestre 2009, est descendu à 12 % au second, pour se stabiliser autour de 10 % depuis le début de l'année. Je ne détaillerai pas tous les chiffres ici, mais je retiendrai de cette stabilisation que le dispositif de rupture conventionnelle a effectivement acquis une place à part entière dans les modes possibles de rupture des CDI.

Ces chiffres, comme je viens de le souligner, illustrent aussi la pertinence de ce mode de rupture et démentent, du même coup, les polémiques et les craintes de toutes sortes qui avaient pu naître. On disait que « la rupture conventionnelle siphonnerait le droit du licenciement ». C'est faux : les ruptures conventionnelles sont cinq fois moins nombreuses que les licenciements. On disait également que « la rupture conventionnelle serait une nouvelle porte ouverte vers le contentieux ». Là aussi, c'est faux. À ce jour, on dénombre moins d'une centaine de contentieux se rapportant à la rupture conventionnelle, à comparer aux quelque 200 000 contentieux qu'occasionnent chaque année les ruptures des contrats de travail. On disait, enfin, que « la rupture conventionnelle deviendrait le lot commun, un peu obligé peut-être, de la rupture des CDI ». C'est également faux. Les démissions sont les plus fréquentes – 56 % – devant les licenciements – 37 % – alors que les ruptures conventionnelles ne représentent que 8 % des cas de fin de CDI.

Doit-on pour autant considérer que ce dossier est clos, que cette procédure est définitivement figée et que l'attention et le suivi ne sont plus de mise ? La demande du groupe GDR de tenir cette discussion tend à prouver le contraire. Sans doute « ce pas » vers plus de maturité dans les relations individuelles de travail doit-il être mieux assuré.

C'est mon quatrième constat : la vigilance est encore de mise. Vigilance pour que cette procédure soit comprise et utilisée dans les cas imaginés par les partenaires sociaux et seulement dans ceux-là : c'est ce que la circulaire du 17 mars 2009 avait pris soin de préciser. Vigilance, encore, pour que cette procédure ne permette pas, par exemple, de contourner le régime juridique des plans de sauvegarde de l'emploi, lorsqu'ils doivent être mis en place. C'est ce que rappelle, à toutes fins utiles, l'instruction de la Direction générale du travail du 23 mars dernier.

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