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Intervention de Luc Chatel

Réunion du 22 juin 2010 à 18h00
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement :

Concernant le projet de loi de règlement, vous m'interrogez sur l'écart entre prévision et réalisation. La construction du projet de loi de finances initial ne comportait pas le financement de l'impact du point de la fonction publique, qui a été augmenté à l'issue d'une négociation avec les organisations représentatives des personnels. L'écart tient aussi au coût de l'exonération des cotisations sociales au titre des heures supplémentaires. Y a-t-il eu sous-consommation ou surconsommation en la matière ? En 2009, le plafond d'emplois ministériels, qui s'élevait à 977 876 équivalents temps plein, a été consommé à hauteur de 976 902. Il a par conséquent été respecté : le taux de consommation s'élève à 99,9 %. En revanche, le schéma d'emploi à la rentrée de 2009, qui prévoyait la suppression de 13 500 postes, n'a été réalisé qu'à hauteur de 9 989 équivalents temps plein, soit 3 511 équivalents temps plein de moins que prévu, conséquence d'un nombre de départs en retraite nettement inférieur aux prévisions, notamment dans le premier degré.

Vous m'avez également interrogé sur l'impact de la mastérisation sur l'enseignement privé, laquelle n'entrera en vigueur qu'à la rentrée 2010, et n'a donc pas d'impact sur l'exercice 2009. Pour le programme 140, qui concerne les enseignants du premier degré, 9 182 emplois de stagiaires sont restitués ; ils sont 6 733 pour le programme 141, qui porte sur l'enseignement du second degré ; 411 pour le programme 230 relatif aux personnels d'éducation ; 1 876 pour le programme 139, qui traite des enseignants de l'enseignement privé.

La question du remplacement m'a beaucoup mobilisé, car, au-delà de la mastérisation, le système, trop rigide, fonctionne mal. Les TZR sont affectés à une académie, de sorte que, même lorsque des titulaires remplaçants sont disponibles dans une académie quand on en manque dans l'académie voisine, on ne peut faire appel à eux. Il faut apporter au dispositif plus de souplesse, ce qui sera fait à la rentrée prochaine. Il faut aussi le rendre plus réactif. Dans le second degré, le délai de carence est de quatorze jours, pendant lesquels l'établissement d'enseignement est en charge du remplacement, de sorte que celui-ci ne peut être assuré que si le proviseur a dans son équipe pédagogique un professeur qui accepte de le faire au pied levé. Il ne peut procéder à un recrutement qu'après un délai de deux semaines. Désormais, il interviendra dès le premier jour auprès des services de l'académie, qui comporteront un responsable du remplacement chargé de gérer un vivier composé de titulaires remplaçants, mais aussi de contractuels.

La répercussion de l'information concernant les compétences du socle commun est individuelle. Les enseignants répercutent l'évaluation auprès de chaque famille. Ils peuvent alors leur proposer un recours à l'aide personnalisée si leur enfant a un niveau inférieur à la moyenne académique.

Vous avez évoqué les différends qui peuvent surgir entre l'Éducation nationale et les collectivités locales, à propos de la prise en charge des enfants handicapés. La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) est l'instance de recours qui permet aux élus de défendre un dossier dans leur département ou d'obtenir des informations que les parents n'osent pas toujours demander. Par ailleurs, dans chaque académie, un inspecteur référent spécialisé, inspecteur pédagogique régional ou inspecteur de l'Éducation nationale, promeut l'intégration et apporte des solutions locales aux différends de ce type. L'État consacre des moyens importants à l'accueil des enfants handicapés, dont 185 000 sont aujourd'hui scolarisés, soit 10 000 de plus que l'an dernier. Nous comptons en accueillir 10 000 de plus à la rentrée prochaine grâce à la création de 200 nouvelles unités pédagogiques d'intégration, ce qui en portera le nombre à plus de 2 000 au niveau national.

Je suis assez favorable à une contractualisation pluriannuelle avec les établissements, d'autant que l'Éducation nationale travaille elle-même dans un tel cadre, avec le projet de loi de finances et sa programmation triennale. Cependant, cette programmation n'est pas encore déclinée académie par académie et établissement par établissement. Étant entendu que cela ne doit pas conduire à figer les choses pendant trois ans, je pense toutefois que nous aurions intérêt à aller dans ce sens, pour donner davantage de visibilité aux équipes locales et aux établissements.

Quant à la mutualisation entre le public et le privé, elle est tentante sur le papier, mais il est déjà si difficile de mutualiser entre deux établissements publics ! On peut toutefois envisager de l'expérimenter, comme vous le suggérez, monsieur le président.

Vous m'avez interrogé sur la coordination entre le ministère de l'Éducation nationale et celui de l'Agriculture pour l'enseignement agricole. Lors de l'examen de la dernière loi de finances, j'ai observé que des amendements visaient à opérer des transferts de crédits et d'emplois de programmes relevant de mon ministère vers le programme de l'Enseignement technique agricole. Je me suis alors interrogé sur la pérennité d'un tel fonctionnement, souhaitant que l'on adopte une structure budgétaire différente. Dans le cadre des travaux préparatoires au projet de loi de finances pour 2011, un changement de maquette de la mission Enseignement scolaire a été proposé afin de rattacher le programme Enseignement technique agricole à une mission relevant du ministère de l'Agriculture. J'observe qu'aujourd'hui, un système comparable s'applique avec le ministère des Affaires étrangères pour les lycées français à l'étranger, avec celui de la Défense pour les lycées militaires et avec celui du Développement durable pour les lycées maritimes. Avec le ministre de l'Agriculture, nous sommes prêts à nous concerter suffisamment tôt pour que des moyens suffisants soient dégagés en faveur de l'enseignement agricole, mais il paraît impossible de maintenir un système dans lequel, à chaque loi de finances, on venait à « piocher » dans une mission.

Votre dernière question porte sur l'affectation des jeunes enseignants. Gardons-nous de la vision caricaturale selon laquelle on enverrait uniquement de jeunes professeurs peu expérimentés dans les établissements des réseaux « Ambition réussite », ce qui déstabiliserait les équipes. Au cours de nombreux déplacements, j'ai rencontré dans des établissements de l'éducation prioritaire de jeunes enseignants qui avaient choisi leur poste et faisaient très bien. Cela dit, il faut faire preuve de discernement dans l'affectation des enseignants, par exemple en les recrutant sur profil en fonction de leur motivation et d'un projet d'établissement défini en fonction des spécificités locales. C'est ainsi que nous pourrons motiver de jeunes équipes pédagogiques.

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