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Intervention de Henri Nayrou

Réunion du 15 juin 2010 à 18h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHenri Nayrou, rapporteur spécial de la Commission des finances :

Madame la secrétaire d'État, je vous donne acte des éléments chiffrés du rapport annuel de performances (RAP), qui sont, hélas ! conformes à la réalité. De fait, la mission Sport, jeunesse et vie associative se caractérise par le désengagement programmé et assumé de l'État, qui se poursuit depuis plusieurs années. Ce n'est d'ailleurs pas fini, car M. Daubresse, ministre de la Jeunesse et des solidarités actives, nous a annoncé tout à l'heure des chiffres peu plaisants, qui seront prochainement confirmés par le Premier ministre : une diminution de 5 %, puis de 10 % en 2013, du budget des ministères.

La mission Sport, jeunesse et vie associative reste l'une des plus petites du budget de l'État avec 0,22 % des dépenses du budget général. En outre, cette mission est dotée de satellites, hors budget. Heureusement, sa dotation budgétaire ne résume pas les enjeux qui y sont associés.

Le RAP 2009 est, une fois encore, décevant. De fait, ce document, qui devrait être un outil pertinent d'analyse et d'évaluation des politiques publiques, reste encore trop largement perfectible.

Ma première question portera sur l'architecture de la mission.

Le programme 219, Sport, dit « pilote », est cohérent et pertinent. Le programme 163 Jeunesse et vie associative est hétérogène, avec des actions qui ne couvrent qu'une faible partie des deux champs indiqués dans son intitulé.

Le choix a été fait dès la mise en oeuvre de la LOLF de rattacher l'ensemble du titre 2 à un programme soutien non-prestataire de service et surdimensionné, le programme Conduite et pilotage. Ce programme 210 constitue une entorse à la LOLF car il regroupe l'ensemble des crédits de personnel et de fonctionnement de la mission, comme l'atteste le rapport de la commission interministérielle d'audit des programmes, ainsi que divers rapports parlementaires et de la Cour des comptes. La lisibilité et le pilotage des programmes opérationnels 163 et 219 composés essentiellement de dépenses d'intervention, en pâtissent – c'est là une question que j'ai évoquée avec M. Daubresse.

Une évolution de la maquette budgétaire et des structures est annoncée pour le projet de loi de finances pour 2011, liée notamment à la mise en oeuvre des décisions prises dans le cadre de la RGPP et aux changements de périmètres ministériels, depuis la création du Haut commissariat à la jeunesse en janvier 2009. Qu'en est-il de ces améliorations ?

Ma deuxième observation portera sur la réforme des collectivités territoriales. Je rappelle qu'en 2007 la dépense nationale liée au sport a atteint 33 milliards d'euros, dont 50 % pour les ménages, 33 % pour les collectivités locales, 10 % pour l'État et 7 % pour le privé.

Les projets portés dans le domaine du sport font fréquemment l'objet de financements croisés, que rend précisément difficiles l'article 35 de la loi sur la réforme des collectivités territoriales votée la semaine dernière par notre assemblée, la norme étant désormais l'interdiction du cumul de subventions des régions et des départements. Avec les députés de la montagne, nous avons pu faire adopter un amendement atténuant les effets de cette mesure pour les communes de moins de 3 500 habitants et les intercommunalités de moins de 50 000 habitants.

Je poserai trois questions à ce propos : quelles compétences, pour quelles collectivités ? Avec quelles conséquences pour le financement du sport ? Quels sont désormais les mécanismes visant à garantir l'accès du mouvement sportif aux aides des collectivités territoriales ? Peut-être nos collègues sénateurs seront-ils plus avisés que le rapporteur de l'Assemblée nationale…

Ma troisième observation portera sur l'Euro 2016 de football et les équipements sportifs pour tous. Malgré le volontarisme de l'État, son intervention ne se soldera que par 150 millions d'euros sur le montant de 1,7 milliard d'euros qui devra être englouti par le chantier des stades, le reste étant à la charge des collectivités et des investisseurs privés. Pouvez-vous faire le point sur le montage financier de cet événement. Qui, de l'État, de la Fédération, des collectivités ou du privé, pilotera les opérations et en assurera le suivi financier ? Nul n'ignore en effet que des collectivités se sont retirées de la course avant même que ne soit prise la décision, qui, du reste, me ravit personnellement.

Que vont devenir les équipements dédiés au « sport pour tous », pour l'entretien desquels 10 millions d'euros seulement sont prévus, sachant que 45 % de ces équipements de base ont plus de vingt ans et 22 % plus de trente ans ?

Je tiens à redire mon regret, partagé par nombre de mes collègues sur tous les bancs de cette assemblée, que le grand emprunt n'ait pas jugé bon de prendre en compte la remise à niveau de ces équipements. Celle-ci aurait eu un excellent effet d'entraînement et les collectivités auraient eu tout naturellement vocation à en être les maîtres d'ouvrage.

Comment transformer une candidature réussie à l'Euro 2016, faite par les clubs « pros » pour les clubs « pros », en une organisation du championnat d'Europe des nations de football pour tout le monde ?

Ma quatrième observation concernera l'Agence française de lutte contre le dopage. Chacun reconnaît la nécessité de la lutte contre le dopage et la qualité des actions de l'AFLD, d'autant plus nécessaires qu'avec l'arrivée des entrants dans le cadre des paris en ligne, de nombreux garde-fous seront nécessaires pour respecter la morale du sport et l'exacte vérité des performances sportives.

Vous avez déclaré que l'Agence serait intégralement financée par le budget du ministère de la Santé et des sports et que vous dévoileriez le détail des mesures permettant de dégager ce financement supplémentaire, qui s'élève à 8,4 millions d'euros, dont 3,2 millions ont été déjà accordés. Le reste, soit 5,2 millions d'euros, devrait être fourni avant la fin juin. Je n'ai pas apprécié les changements de pied auxquels nous avons assisté à propos de ce financement, pour lequel ont été envisagés tout à tour une surtaxe des licences, heureusement annulée, et le détournement des objectifs premiers de la « taxe Buffet ». Quel financement pérenne envisagez-vous donc pour le budget de l'Agence ?

Ma cinquième observation touchera au droit à l'image collectif. Au-delà de mon rôle de député et de rapporteur spécial, le psychodrame qui s'est joué à ce propos m'attriste aussi comme sportif et comme citoyen. En la personne de M. Woerth, le Gouvernement, je le rappelle, a accepté en 2009 ce qu'il m'avait refusé en 2008, signifiant ainsi la fin du DIC. Il a fallu un déjeuner à l'Élysée, en décembre dernier, pour rayer d'un trait de plume le financement de l'AFLD provenant de la taxe Buffet, que je viens d'évoquer. Je regrette que le Président de la République ait eu l'occasion de dire en décembre dernier que la suppression du DIC était une mauvaise manière faite au football français et que ce qui avait été supprimé au niveau du droit à l'image collectif serait rétabli dans le cadre d'une autre loi. Sans être foncièrement opposé à ce que les clubs français jouent à armes égales avec d'autres clubs européens, je souhaite que cette affaire n'ait pas d'impact sur le budget du sport. Qu'est-il prévu au titre de la loi sur le commerce ou sur les sociétés sportives ? Un nouveau système de compensation est-il envisagé ? À défaut, qu'en est-il des recours des clubs devant les tribunaux administratifs ?

Le rapport annuel de performances précise que 1'ACOSS a réévalué ses prévisions quant au coût réel du DIC pour l'exercice 2009 à 39,8 millions d'euros, loin donc des 26 millions d'euros d'évaluation initiale, et même des 32 millions d'euros. Quand ce regrettable feuilleton prendra-t-il fin ?

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