Cet amendement est soutenu par de très nombreux collègues, notamment Hervé Gaymard, Marcel Saddier, Jean Lassalle et de nombreux élus de territoires de montagne. Il arrive au bon moment, puisque viennent de se tenir les états généraux de l'industrie, qui ont permis de mettre en évidence qu'il y avait encore en France 80 000 salariés dans ce que l'on appelle les industries électro-intensives. Nous sommes l'un des derniers pays européens qui ait encore des industries électro-intensives, parce que nous avions un coût de l'énergie qui était favorable, au travers de contrats longue durée qui permettaient de prévoir les investissements et leur amortissement dans la durée. L'évolution du marché de l'énergie a provoqué un certain nombre de bouleversements, et il faut que l'on puisse adapter les conditions pour ces industries électro-intensives en conformité avec les réglementations européennes, comme l'ont fait d'autres pays européens.
Cet amendement vise les consommateurs électro-intensifs déjà implantés à proximité des centrales électriques. Il permettrait des économies d'énergie significatives par la réduction des pertes en ligne. Ces pertes en ligne s'élèvent à 6% sur l'ensemble du réseau électrique français.
L'amendement tel qu'il est présenté ne porte pas atteinte au principe de péréquation tarifaire pour le transport de l'électricité, puisqu'il ne corrige qu'une anomalie tarifaire pour les situations dites de « ligne directe ». Il permettra d'atténuer les handicaps sévères, notamment sur le plan logistique, de certains sites électro-intensifs implantés à proximité des centrales hydroélectriques pour des raisons historiques, dans des zones de montagne qui ont l'inconvénient aujourd'hui d'être éloignées de leurs fournisseurs et de leurs débouchés commerciaux.
Cet amendement leur permettra également de retrouver une certaine compétitivité dans un environnement de concurrence internationale féroce. Pour les industries électro-intensives, le coût de l'énergie peut représenter jusqu'à 40% du prix de revient, notamment pour les alumineries. Le coût de transport électrique, qui fait l'objet de cet amendement, peut représenter jusqu'à 8% du prix de revient desdites industries.
Nous vous proposons de faire ce que viennent de faire les autorités allemandes par un texte de loi dont j'ai un peu de mal à dire le nom, n'étant pas germaniste, mais je pourrais le transmettre par écrit à ceux qui seraient intéressés. Cet amendement permettrait de préserver, comme en Allemagne, plusieurs milliers d'emplois.
En matière d'électricité, je précise que la livraison physique est sans rapport avec la relation contractuelle : les électrons consommés proviennent de la centrale la plus proche, et pas forcément du fournisseur choisi. Ajoutons de plus que si la relation contractuelle était nécessaire entre le site de production et le consommateur qui demanderait le tarif de ligne directe, l'effet indirect et non désirable serait de créer des zones de clients captifs autour de certains sites de production, ce qui n'est pas l'esprit de la directive européenne. Ce tarif de ligne directe doit donc s'appliquer indépendamment de la situation contractuelle de la fourniture d'électricité.
Il est prévu de limiter ce tarif de ligne directe aux quantités effectivement produites par la centrale la plus proche, ce ne sera donc pas nécessairement ce qui aura été consommé par l'établissement industriel. Le tarif de ligne directe n'entraînera pas la gratuité du transport mais une réduction par rapport aux tarifs publics du gestionnaire de transport. Enfin, la notion de ligne directe existe déjà dans la directive européenne ainsi que dans la loi française et le décret relatif au tarif de transport, puisque ce tarif spécifique de transport en ligne directe pourrait s'inspirer de l'annexe à l'article 28 de la concession du réseau d'alimentation générale du 27 novembre 1958
Enfin, pour être tout à fait précis, l'impact d'un tel tarif de transport en ligne directe sera marginal, environ 1,5 %, sur les recettes et sur la tarification de RTE, qui ne va donc pas s'effondrer à cause de cet amendement. Compte tenu du faible nombre de sites consommateurs raccordés au réseau à un niveau de tension HTB, c'est-à-dire supérieur à 42 000 volts, et en situation de mitoyenneté ou de très grande proximité avec une centrale électrique, nous n'avons donc pas de risque de contagion, ou de contamination par rapport à une telle disposition. Elle permettrait, sur vingt sites industriels français représentant une consommation annuelle totale d'environ 20 TWh, soit moins de 5% de la consommation française, d'avoir un impact significatif au bénéfice de l'industrie, et donc de traduire en actes les discours des états généraux de l'industrie.