Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, après les travaux de la commission Champsaur, après la proposition de loi sur la réversibilité des tarifs et la prolongation nécessaire du TARTAM jusqu'au 31 décembre 2010, je me félicite, au nom du groupe UMP, de la présentation de ce projet de loi dit NOME : nouvelle organisation du marché de l'électricité.
Il nous faut, en effet, trouver une voie de passage entre deux écueils : le contentieux avec la Commission européenne et l'élimination de toute régulation des prix, en amont et en aval.
Il nous faut renforcer la lisibilité de notre système tout en respectant nos obligations européennes, M. le ministre d'État l'a parfaitement exprimé.
Nous devons aussi assurer aux acteurs du marché de l'électricité, qu'ils soient consommateurs industriels ou individuels, producteurs ou distributeurs, une réelle prévisibilité, une réelle sécurité en sortant de la situation actuelle insatisfaisante tout en préservant notre système français.
Notre situation n'est en effet pas satisfaisante, même si elle a préservé des régimes de prix en lien avec les coûts de production. Elle n'est pas satisfaisante car elle est instable depuis l'ouverture des marchés qui, je le rappelle, date de l'année 2000 avec une loi qui, bien que modifiée sept fois, n'est pas aboutie car fondée sur des dispositifs transitoires. De plus, comme je l'ai déjà précisé, elle est critiquée par la Commission européenne.
Le cadre manque ainsi de la lisibilité nécessaire aux objectifs fondamentaux de la politique énergétique : l'incitation aux investissements tant du côté production que du côté consommateur.
Pour autant, la France a légiféré et réglementé afin que les prix restent liés aux coûts du parc nucléaire, heureux héritage du Général de Gaulle ; M. le président de la commission l'a rappelé. Cet objectif demeure pour nous incontournable. Les consommateurs français payent l'électricité environ 30 % moins cher qu'ailleurs en Europe. Notre parc de production est en effet plus compétitif que le parc moyen européen, donc que les prix de marché.
Nous partageons donc pleinement les objectifs de ce projet de loi.
En premier lieu, il s'agit de passer d'une régulation en aval, portant sur le consommateur, à une régulation en amont, exercée sur la production, et de favoriser le développement de la concurrence et de l'intelligence des réseaux.
En deuxième lieu, il s'agit, par la construction des prix et la régulation en amont, de permettre le maintien des tarifs correspondant aux performances passées et à venir du système, tout en garantissant une visibilité.
En troisième lieu, il s'agit de demander, voire d'imposer, aux différents opérateurs de réduire l'ampleur des pointes par des moyens d'effacement et de production. Je me félicite, au nom du groupe de travail, que le ministre d'État Jean-Louis Borloo m'a demandé de présider, avec le sénateur Bruno Sido, que cette mesure plutôt novatrice figure dans ce projet de loi.
Pour ce qui est de la composition de la CRE, il s'agit d'instaurer une autorité composée de membres siégeant à temps plein dans la plus totale indépendance, le nombre de sièges faisant encore discussion parmi mes collègues.
Je sais, monsieur le secrétaire d'État, que le texte proposé aujourd'hui par le Gouvernement est le résultat d'une négociation difficile mais approfondie avec la Commission européenne, Il définit un prix dit ARB – accès régulé à la base – qui est une disposition fondamentale du projet et que la commission des affaires économiques a fait évoluer en ARENH comme l'a souligné notre rapporteur Jean-Claude Lenoir.
Ce prix comprend toutes les charges du parc nucléaire historique, ni plus ni moins, notamment les investissements d'allongement de durée de vie des centrales existantes, le traitement des déchets et le démantèlement, mais pas le financement du renouvellement du parc qui, lui, sera examiné dans cinq ans.
Les concurrents d'EDF pourront acquérir, à ce prix, l'électricité de base nécessaire à l'approvisionnement de leurs clients en France sans pour autant s'enrichir « sans cause » par la revente sur les marchés européens.
Le système sera étroitement contrôlé, limité en temps – quinze ans –, en volume – consommation de base des clients alternatifs –, plafonné, de l'ordre de 25 % de la production du parc nucléaire historique, soit environ 120 TWh dont 20 TWh pour RTE, et révisé régulièrement.
Je pense que la mesure est proportionnée tant pour EDF que pour la concurrence. J'ajoute que des accords industriels entre EDF et ses concurrents pourront se substituer à l'accès régulé, celui-ci étant « un produit directeur ».
Les tarifs réglementés sont explicités, confortés et pérennisés pour tous les petits clients – ménages et professionnels –, ce qui n'était pas évident vis-à-vis de Bruxelles. Pour les gros clients, ils s'éteindront fin 2015 avec le marché. Précisons pour nos collègues de Corse et d'outre-mer que les tarifs réglementés demeureront dans les zones non interconnectées.
Je ne reviendrai pas sur l'obligation de capacité que j'ai mentionnée dans mon introduction si ce n'est pour dire qu'aujourd'hui les fournisseurs n'ont aucune obligation de concourir à la sécurité d'approvisionnement alors que les investissements sont requis en semi-base ou en pointe, que ces investissements ne me paraissent pas rémunérés à leur juste valeur et que la pointe de consommation est chaque année plus difficile à passer.
Cette disposition demandera du temps pour une application effective. Vous proposez cinq ans, ce qui me paraît raisonnable tout en rappelant que les acteurs eux-mêmes ont décidé de se mettre autour d'une table sous l'animation de RTE pour faire des propositions et j'ai proposé dans mon rapport que, en cas de non-entente, soit mise à l'étude une obligation d'effacement.
Je ne reviendrai pas non plus sur la CRE, si ce n'est, au-delà de sa composition, pour dire qu'à nouvelle régulation, nouveau régulateur. Ses pouvoirs sont fort justement étendus, sachant aussi que le conseil supérieur de l'énergie donnera son avis sur les textes les plus structurants.
Mes chers collègues, le vote de ce projet de loi, avec mise en place dans les plus brefs délais, est absolument nécessaire, tant pour répondre aux contentieux de la Commission européenne – transposition de directive et aide de l'État – que pour une stabilité et une bonne lisibilité de notre marché intérieur avec la spécificité que nous défendons.
Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, de saluer le président de la commission économique, Patrick Ollier, qui s'est beaucoup impliqué dans la préparation de ce projet de loi…