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Intervention de Jérôme Chartier

Réunion du 31 mai 2010 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2010 — Reprise de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Chartier :

Je regrette, mon cher collègue, mais je ne le ferai pas. Je suis sûr que vous vous en chargerez vous-même, et beaucoup mieux que moi ; je vous écouterai donc avec attention ! (Sourires.)

Pour en venir au présent texte, le groupe UMP tient à souligner qu'il le soutient, comme ont pu le faire jusqu'à présent certains de nos collègues d'autres groupes. En effet, chacun en convient, face à la récente crise financière – la plus grave que l'euro ait connue depuis sa création – et à l'heure où l'Europe est au pied du mur, il fallait organiser ce que j'appellerais une riposte contre les marchés et contre celles et ceux qui ont pris la zone euro comme cible de leurs spéculations. Face à cette agression, il était urgent de prendre des décisions et d'apporter une réponse politique à la hauteur des enjeux, c'est-à-dire assurer la stabilité monétaire, garantir l'unité de la zone euro et, bien sûr, envoyer un signal très fort aux marchés, ce qui fut fait dès le lundi 10 mai.

Avant d'entrer dans le détail de ce projet de loi, je vais revenir quelques instants sur ce qui s'est passé durant le mois de mai. Je retiendrai trois éléments importants.

Première observation : l'acceptation du plan d'aide à la Grèce n'a pas permis d'arrêter la spéculation massive sur les marchés, qui sont finalement passés à autre chose. Tous les pays d'Europe du Sud – je pense à l'Espagne, un peu aussi à l'Italie, mais surtout au Portugal et bien sûr à la Grèce – ont vu leur taux souverain à deux ans se tendre progressivement de plus en plus. Surtout, ces tensions indiquaient que le marché testait désormais la cohésion de la zone euro, bien au-delà du seul cas grec. C'est le signe, mes chers collègues, qu'il s'agit bien d'un problème politique posé par la zone euro, et non d'un problème économique stricto sensu, lié à la monnaie. Le taux souverain moyen de refinancement à dix ans est quant à lui globalement stable, ce qui montre bien que c'est l'envie de spéculation qui sévit actuellement dans la zone euro.

Deuxième observation : les tensions sur le marché obligataire ont inquiété les régulateurs, car elles pouvaient être le vecteur de la contagion à travers les systèmes bancaires. Plus que l'accès à la liquidité par les États, ce sont les craintes de contagion à travers l'ensemble du système bancaire européen qui ont fait trembler les marchés. La réussite des récentes émissions souveraines en Espagne et en Italie montre que les États ont toujours accès à la liquidité. Ce principe n'est pas remis en cause, dès lors – bien sûr – qu'ils en payent le prix. Comme en Grèce, la peur s'est diffusée via le système bancaire, du fait notamment des expositions croisées entre les banques nationales.

Troisième observation : le cas grec a modifié le paradigme de perception mondiale du risque souverain, indiquant que, de ce point de vue, la frontière entre pays développés et pays émergents n'est plus aussi nette, et il en va de même de celle entre les dettes souveraines et les dettes privées. Les défauts vécus dans les dernières décennies avaient jusqu'à présent épargné les pays dits développés. L'attaque actuelle contre la zone euro montre qu'aujourd'hui aucune région, fût-elle développée, n'est à l'abri d'un tel stress.

Mes chers collègues, je reviens au paquet qui a été adopté le dimanche 9 mai.

Sans la volonté du Président de la République, de Christine Lagarde, du ministre chargé des comptes publics et, plus généralement, de l'ensemble du Gouvernement, nous ne serions pas en train d'observer une certaine stabilité financière de la zone euro.

Deux éléments essentiels ont vu le jour.

Le premier est la constitution d'un fonds de stabilisation qui est – chacun en conviendra – de très grande ampleur. Ce fonds va bien sûr dans le bon sens ; il est nécessaire ; il est utile pour créer à la fois de nouveaux moyens de financement dans la zone euro, mais aussi de nouveaux moyens de protection pour celle-ci.

Il est constitué de trois étages : un premier étage de prêts bilatéraux à hauteur de 440 milliards d'euros, avec une garantie des membres de la zone ; un deuxième étage avec un fonds de stabilisation communautaire à hauteur de 60 milliards d'euros ; enfin un troisième étage de facilités de paiement du Fonds monétaire international à hauteur de 250 milliards d'euros, soit, au total, un engagement possible de 750 milliards d'euros, en espèces sonnantes et trébuchantes ou en garanties.

La BCE prendra également part à la solution, en intervenant sur les marchés obligataires ; elle le fait d'ailleurs déjà depuis plusieurs jours. Elle a ainsi annoncé qu'elle interviendrait sur les marchés obligataires de la zone euro pour en garantir non seulement la liquidité, mais aussi la stabilité et le fonctionnement, qui deviennent, à court terme en tout cas, des objectifs. Elle n'a pas précisé de montant maximal d'achat, mais chacun a pu lire que celui-ci s'élevait à 26 milliards d'euros pour les interventions sur le marché secondaire obligataire. En parallèle, elle va remettre à disposition des banques des liquidités en dollars, en coordination avec les principales banques centrales mondiales.

Les moyens mis sur la table sont de nature à restaurer la confiance des investisseurs et la stabilité des marchés obligataires, mais, au-delà des mesures d'urgence, il faudra aller plus loin à l'issue de cette crise et en tirer toutes les leçons. De quelle manière pouvons-nous organiser, à l'échelle européenne, la convergence des politiques économiques ? Ce gouvernement économique devra reposer sur plusieurs principes essentiels : le renforcement de la surveillance économique et de la coordination des politiques économiques dans la zone euro ; la révision du Pacte de stabilité et de croissance pour renforcer les sanctions en cas de manquement répété aux règles ; enfin, la mise en place, au niveau européen, d'un mécanisme de management de crise pour l'avenir, avenir que l'on souhaite bien sûr le plus lointain possible.

Enfin, je tiens à souligner que l'octroi de la garantie de l'État n'a pas d'incidence sur le solde budgétaire.

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