Plus de mandats, mais moins de femmes : la question de la parité a déjà été largement abordée, mais j'y reviens parce que les réponses du Gouvernement sont tout, sauf satisfaisantes.
Si je fais la synthèse de ce qui a été dit par M. Hortefeux et M. Marleix, de quoi nous plaignons-nous ? À les écouter, en effet, la régression majeure que la création du conseiller territorial fera subir à la parité dans les assemblées locales est largement compensée. Nous voilà sommées de nous réjouir que des scrutins de liste paritaire s'appliqueront désormais aux communes de plus de 500 habitants, et non plus de 3 500, comme c'est le cas aujourd'hui. Dont acte. En outre, je cite M. Marleix : « Sur la base des simulations effectuées, notamment à partir des résultats des dernières élections régionales, le mode de scrutin envisagé pour le conseiller territorial aurait ainsi donné plus de sièges aux petites formations, tout en assurant un minimum de parité entre les élus, largement au-dessus de 20%. » Largement au-dessus de 20% : c'est trop d'honneur, monsieur le ministre ! Je vous rappelle que le « minimum de parité », cela n'existe pas et qu'aujourd'hui, la définition de la parité, c'est l'égalité entre les personnes. Il semble qu'en la matière, certains soient plus égaux que d'autres, en tout cas que certaines soient moins égales que certains…
En vérité, le conseiller territorial qui figure à l'article 1er A est le croque-mort de la parité, tant au niveau départemental que régional. Vous ne savez pas comment vous dépêtrer de cette affaire et vous préférez esquiver la question, comme M. Marleix il y a peu, la vraie question qui est celle du respect de la Constitution. Votre texte ne favorise pas l'égal accès des femmes et des hommes aux fonctions et aux mandats électifs. Il fera chuter la proportion des femmes dans les assemblées locales, comme l'a très bien dit M. Grand tout à l'heure.
Vous vous êtes d'ailleurs bien gardé d'insister sur les conséquences dans les études d'impact portant sur le texte de votre prétendue réforme. Car l'étude d'impact du présent texte ne dit pas un mot des conséquences sur la parité ! Quant à celle portant sur le texte du mode d'élection des conseillers territoriaux, elle n'évoque la parité que pour se réjouir de cette évolution des seuils sur les listes, j'allais dire « dans les élections communales ». Les projections sont unanimes sur les conséquences de ce mode d'élection des conseillers territoriaux. D'ailleurs, vous les reconnaissez vous-même !
Vous avez trouvé une dernière parade : la proposition de loi de notre collègue Chantal Brunel, proposition qui n'est toujours pas à la distribution. Vous nous la servez à toutes les sauces pour évacuer le sujet de fond, mais elle ne vous protège en rien de la censure du Conseil constitutionnel. En outre, nous n'avons aujourd'hui aucune idée de l'impact que pourrait avoir cette proposition de loi si d'aventure elle était inscrite à l'ordre du jour, voire adoptée en l'état et appliquée.
Vos déclarations successives sont d'une hypocrisie pour le moins étonnante. J'ai posé une question à M. Hortefeux, qui m'a répondu : « N'essayez pas de faire croire aux Français que ce texte entraînerait une régression sur un sujet aussi essentiel que celui de la parité ! » On m'avait alors assuré que la réciprocité du genre entre titulaire et suppléant était une garantie suffisante. Je ne sais pas de qui l'on se moque, mais c'est une véritable honte de réagir ainsi !
Dix ans après la loi du 6 juin 2000, qui a permis d'améliorer la représentation des femmes au sein de toutes les assemblées élues au scrutin de liste, vous ne trouvez rien de mieux dans ce texte que de porter un très mauvais coup à la parité, afin de mieux servir vos calculs électoralistes. La France a été l'un des derniers pays d'Europe à accorder le droit de vote aux femmes. Mme Guigou a rappelé combien nous étions mal classés au plan international pour ce qui est de la place des femmes dans la vie politique. Nous arrivons en effet après le Rwanda, l'Afrique du Sud ou Cuba. Il y a quelques jours, une loi a institué la parité absolue dans les élections législatives au Sénégal, avec 50% d'hommes et 50% de femmes en 2012. Nous en sommes encore très loin, et, avec ce texte, vous allez nous éloigner encore plus de la parité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)