Seulement si l'on peut comparer la facturation à l'activité médicale. Mais un autre de nos problèmes spécifiques était justement, jusqu'à une période récente, une informatique complètement défaillante et en tout cas utilisée uniquement pour la gestion et non pour l'activité médicale. Cette situation, ajoutée à l'organisation des services qui permettait donc aux gens de se rendre à un rendez-vous et de repartir sans payer, sans aucun circuit organisé qui les enregistre pour tel ou tel acte, nous a valu pendant des années d'approuver des listes impressionnantes de créances abandonnées faute de pouvoir les recouvrer. Je ne saurais vous en dire le montant global, mais cela peut se retrouver.
À ce problème de gouvernance s'est ajouté un autre facteur : au moment de la fusion, les deux hôpitaux étaient sensiblement de la même taille. Celui de Poissy était un peu plus dynamique, avec des chefs de service un peu plus jeunes, ceux de Saint-Germain étant plutôt des notables – de qualité. Le budget était équilibré à Saint-Germain et déficitaire à Poissy. Les chefs de service et le personnel hospitalier de Saint-Germain étaient largement employés à temps partiel, ceux de Poissy à temps plein. Or, les emplois à temps partiel n'étaient pas pris en considération dans le vote pour la constitution de la commission médicale d'établissement initiale. Dès le départ donc, le pouvoir médical s'est trouvé totalement pisciacais, avec seulement un président de la commission médicale d'établissement saint-germanois les deux ou trois premières années. Pour résumer la situation, il y avait un pouvoir politique plus fort à Poissy qu'à Saint-Germain, un directeur complètement acquis à l'idée de tout regrouper à Poissy – certainement, de son point de vue, pour des raisons de bonne gestion et d'efficacité médicale – et une commission médicale d'établissement totalement acquise à cette thèse. Les problèmes généraux de gouvernance, d'informatique ou d'organisation physique des locaux ont été occultés, dans les faits, par la bataille qui a pendant dix ans opposé les deux sites qui, décidément, ne se trouvaient rien en commun.
Dix années pendant lesquelles les pouvoirs publics ont d'ailleurs changé quatre fois de position, hésitant sans cesse entre le site unique et les deux sites. Lorsqu'ils s'étaient décidés pour le site unique, M. Masdeu-Arus, M. Buisson et le président de la commission médicale d'établissement pesaient pour qu'il soit installé à Poissy, mais les Saint-Germanois se précipitaient chez le ministre et il était finalement décidé d'en revenir à deux sites. Et, dans cette autre optique, le pouvoir dominant pisciacais décidait de consolider une toute petite partie de Saint-Germain et de transférer le reste à Poissy – ce qu'ils appelaient d'ailleurs « restructuration du site de Poissy » en public, mais « centre hospitalier de Poissy-Saint-Germain à Poissy » dans leurs dossiers.
Jusqu'à ce que s'impose finalement l'idée que j'avais défendue avec Dominique Coudreau, premier patron de l'agence régionale de l'hospitalisation d'Île-de-France : si site unique il doit y avoir, qu'il se fasse ailleurs, sans quoi on n'y arrivera jamais. Mais il a fallu notamment convaincre Pierre Morange d'accepter l'idée de l'implanter à Chambourcy, seul endroit où des terrains étaient disponibles, alors que la commune avait bien d'autres idées que d'accueillir un centre hospitalier qui ne paye pas de taxe professionnelle.