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Intervention de Henri Nayrou

Réunion du 27 mai 2010 à 9h30
Réforme des collectivités territoriales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHenri Nayrou :

…ce qui pourrait déboucher sur des réunions plénières au Stadium de Toulouse ! Onze autres régions verraient leurs effectifs doubler : l'Aquitaine, la Bourgogne, la Bretagne, le Centre, la Franche-Comté, le Languedoc-Roussillon, le Limousin, la Basse-Normandie, le Poitou-Charentes, les régions PACA et Rhône-Alpes. « Tout ça pour ça ? », a-t-on envie de vous demander.

Je vais à présent m'exprimer au nom de l'ANEM, l'Association nationale des élus de la montagne, au sein de laquelle s'expriment au mieux les inquiétudes et au pire la colère. Il est clair que, pour les élus de la montagne, le compte n'y est pas, et je ne sais quelle frénésie de verrouillage gouvernemental a même fait passer à la trappe les promesses du Premier ministre, lesquelles, sur le fondement de l'article 8 de la loi « montagne » de 1985, reconnaissaient à nos territoires le droit à la spécificité et à l'expérimentation.

Au nom de cet engagement du 3 novembre dernier, l'ANEM avait exprimé certaines exigences de bon aloi et de bonne gouvernance pour les zones de montagne : pas de seuil minimum de population pour créer une intercommunalité ; création de collèges de montagne dans les communautés de communes de grand volume ; aménagement, au nom de la solidarité territoriale et sociale, de la clause générale de compétences afin que les départements puissent se porter au secours des collectivités de montagne ; enfin, fixation d'un seuil réaliste pour les communes aux faibles ressources dans le cadre des financements croisés.

Toutes ces demandes ont été rejetées par la commission des lois et le rapporteur, tout comme les maigres avancées obtenues au Sénat. Pire, le sinistre article 35, tel qu'il a été réécrit, signe l'arrêt de mort des petits territoires en interdisant les chevauchements et le cumul des financements entre région et département – sauf pour Sa Majesté l'État – et en fixant, pour les maîtres d'ouvrage publics, des pourcentages d'intervention si élevés qu'ils vont stopper tout investissement. Du Bercy pur sucre ! Vous comprendrez donc aisément pourquoi l'ANEM a fait part de son insatisfaction dans un récent communiqué, et que les députés de la montagne, de droite comme de gauche, aient exprimé les mêmes sentiments, comme nous venons de l'entendre avec M. Vannson. Alors, feu sur l'article 35 !

Mais le pire est à venir. Même si le texte ne le mentionne nulle part, la messe est dite : c'est la mort des faibles, la fin d'une représentation crédible des zones rurales et de montagne de faible densité, la fin de la solidarité et de la péréquation, la disparition par effacements successifs des départements, la mort des territoires ruraux par asphyxie financière, la fin de l'aménagement du territoire, bref, de la diversité à la française. Votre carte de France, après la réforme, monsieur le secrétaire d'État, ce sont des déserts entre deux métropoles.

J'entends d'ici vos complaintes : vous critiquez, nous reprocherez-vous, et ne proposez rien. Eh bien, s'il faut une réforme, je vous en soumets une, plus logique, plus efficace et plus en harmonie avec la réalité des territoires. Il faut, non pas fusionner conseillers régionaux et généraux, mais conseillers généraux et délégués d'intercommunalité. Pour en être convaincu, monsieur le secrétaire d'État, il suffit de regarder notre paysage institutionnel. Les cantons ont deux cents ans d'âge : dessinés à angles droits sur certains plans de villes, ils sont même, dans le monde rural, dépassés en légitimité par les communautés de communes, lesquelles ont sur eux l'avantage d'être des territoires neufs, définis selon des critères récents, et plus axés sur la logique du développement que sur celle du guichet.

Convenez que, si les conseillers généraux sont aussi très souvent des présidents ou des membres d'exécutif d'intercommunalité, c'est tout simplement parce qu'ils oeuvrent sur le même créneau, celui de la proximité. Cette cohérence a la clarté de l'eau de roche, alors que la vôtre… Tout cela pour vous dire que les départements, dont je reste un chaud et lucide partisan, assureraient mieux leur avenir en fédérant leurs communautés de communes qu'en se diluant dans les régions.

Je m'en voudrais enfin, monsieur le secrétaire d'État, de ne pas évoquer les conséquences de la réforme sur la délimitation des territoires électifs de 2014 : un tel choix, dans mon plan B, était confié aux élus de terrain, lesquels ont d'ailleurs déjà tracé les grandes lignes de ces territoires au fil de l'action communautaire. Dans votre réforme, la décision reviendra aux ciseaux de Beauvau. Inutile de vous faire un dessin… (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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