Nos débats sont surréalistes : nous ne voulons pas affronter la réalité. Comment l'État grec pourra-t-il rembourser une dette représentant 120 % de son PIB ? Si la Grèce tient son plan de retour non pas à l'équilibre mais à un déficit limité à 3 % du PIB, elle va tangenter les 140 % ou 150 %. Comment rembourser une dette correspondant à un tel pourcentage de la richesse nationale ? Le capital d'emprunts conclus sur quinze ans devra être remboursé à hauteur de 6 % ou 7 % par an. C'est 10 % du PIB chaque année. En considérant que le budget de l'État grec correspond à 20 % du PIB de ce pays, c'est la moitié de celui-ci qui devra être consacrée au remboursement du capital – sans parler des intérêts. C'est impossible.
Comme je le répète sans cesse, la seule solution est donc non pas l'annulation – bien sûr – mais le rééchelonnement des dettes, à l'instar de ce qui a été fait pour l'Allemagne lors de son effondrement financier après la guerre de 1914-1918 – les Russes ayant, quant à eux, annulé leur dette. Sauf rééchelonnement sur vingt ou vingt-cinq ans, la charge est insupportable.
Selon Mme la ministre – si j'ai bien compris – les prêts mis en place en application du nouveau dispositif pourraient être de cinq ans, dont trois de différé. C'est insoutenable ! Comment la Grèce pourra-elle rembourser en deux ans ? Il n'est pas besoin de dire aux marchés que c'est impossible ; ils le savent pertinemment, et jouent contre ! Au contraire, ils seraient rassurés par un rééchelonnement sérieux, permettant aux États en difficulté de rembourser effectivement leur dette au regard de leurs capacités. Il est déraisonnable d'annoncer des prêts de cinq ans ; ils seront retransformés.
En réalité, aujourd'hui, nous continuons à protéger les banques. Elles sont les grandes gagnantes. Sur les 110 milliards d'euros en cours de prêts à la Grèce, 55 au moins, une bonne moitié, va servir à rembourser des dettes privées.