La commission des lois n'a malheureusement pu revenir sur votre réforme fiscale. Or c'est cette disposition, qui figurait dans la loi de finances pour 2010, qui aura des conséquences iniques : ce sont 11,8 milliards d'euros qui ne rentreront pas cette année dans les caisses des collectivités territoriales, 6 milliards qui manqueront ensuite chaque année à leurs ressources. Dans ces conditions, vous aviez beau jeu de maintenir en façade la compétence générale puisque, de toutes façons, les collectivités territoriales n'avaient plus les moyens financiers de l'exercer. Telle est la véritable signification de votre réforme.
Les collectivités territoriales vont perdre leur autonomie fiscale, constitutionnellement garantie, et ne bénéficieront plus du droit de lever l'impôt elles-mêmes, celui-ci étant compensé, d'ailleurs imparfaitement, par une contribution économique territoriale directement versée par l'État. C'est donc in fine le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales qui est remis en cause.
Les collectivités territoriales, orphelines de taxe professionnelle mais obligées d'assumer les missions que l'État ne veut plus ou ne peut plus assurer, devront trancher un dilemme cornélien. Deux solutions seulement s'offrent à elles pour compenser ce manque à gagner.
Ou bien le niveau des recettes budgétaires sera maintenu, mais dans ce cas les impôts locaux devront être augmentés et ce sont les ménages qui subiront de plein fouet une nouvelle attaque, un an et demi après le début de la crise économique d'une gravité inédite que nous connaissons et dont les conséquences sociales n'ont pas encore été mesurées dans toute leur ampleur.
Ou bien, alternative tout aussi grave, la qualité des services publics rendus à la population diminuera faute de ressources suffisantes pour entretenir les infrastructures et faire face aux dépenses obligatoires. Dois-je rappeller que les collectivités territoriales réalisent pourtant 73 % de l'investissement public, avec une dette dix fois moins importante que celle creusée par l'État ?