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Intervention de général Jacques Mignaux

Réunion du 18 mai 2010 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

général Jacques Mignaux :

Je veux d'abord vous remercier, mesdames et messieurs les députés, pour l'appui et l'enrichissement que vous avez apportés au texte de la loi du 3 août. Il s'agit d'une loi historique – la précédente en la matière remontait à plus de deux siècles – qui, tout en renfermant les éléments constitutifs de la gendarmerie, a confirmé et modernisé nos missions.

Le rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur, qui concerne 100 000 personnes, nécessite pas moins de 150 textes d'application, répartis en quatre volets principaux : « organisation », « ressources humaines », « emploi » et « soutien et finances ». Les décrets et les arrêtés majeurs ont été publiés ou sont sur le point de l'être.

Le rattachement organique a été réalisé par quatre décrets et deux arrêtés. La direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) fait désormais partie intégrante de l'administration centrale du ministère ; l'inspection de la gendarmerie est devenue une inspection générale et a été restructurée pour être en phase avec l'inspection générale de la police nationale (IGPN) et l'inspection générale de l'administration (IGA) ; les attributions des préfets en matière d'ordre public et de police administrative ont été intégrées aux articles du code de la défense relatifs à l'organisation générale de la gendarmerie.

Dans le domaine des ressources humaines, le ministre de l'intérieur est devenu le responsable de la gestion et de l'administration quotidiennes des militaires de la gendarmerie – recrutement, nominations, avancement. Le ministre de la défense reste compétent pour les domaines structurants de l'état militaire que sont la formation initiale et la discipline.

Le 1er janvier 2010, l'entrée en vigueur de douze décrets en Conseil d'État, d'un décret simple et de cinq arrêtés a permis de réaliser complètement le transfert de compétences du ministre de la défense au ministre de l'intérieur pour la gestion des personnels militaires de la gendarmerie nationale. La modification des derniers textes relatifs aux personnels civils est en cours (deux décrets en Conseil d'État sont déjà publiés, un décret simple reste à prendre).

En ce qui concerne l'emploi, le dispositif engagé en 2002 lors du placement pour emploi de la gendarmerie auprès du ministre de l'intérieur sera parachevé par sept décrets (quatre décrets en Conseil d'État et trois décrets simples) et un arrêté.

Plusieurs codes seront modifiés pour transférer les attributions du ministre de la défense au ministre de l'intérieur, à l'exception des dispositions relatives aux missions militaires, qui continuent à relever du ministre de la défense.

En outre, le corpus juridique relatif à l'exécution des missions de maintien de l'ordre sera modifié afin de tirer les conséquences de la disparition de la procédure de réquisition de la gendarmerie par le ministre de l'intérieur. La procédure pour l'engagement des moyens spécifiques, comme les blindés à roues, sera conservée. Le 4 mai, le Conseil d'État a émis un avis favorable sur les quatre projets de décret.

Enfin, dans le domaine du soutien et des finances, après la modification d'une quinzaine de décrets et d'une vingtaine d'arrêtés, le ministre de l'intérieur détiendra une pleine compétence en matière de gestion de la gendarmerie. Deux décrets et deux arrêtés sont d'ores et déjà entrés en vigueur le 1er janvier dernier. Deux projets de textes à caractère statutaire seront soumis à la 82e session du Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM), du 14 au 18 juin : ils concernent l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) et l'hygiène, la sécurité et les conditions de travail (HSCT).

L'application se déroule à un rythme soutenu, sans difficultés particulières. À l'été, plus de 90 % des décrets et des arrêtés nécessaires auront été publiés.

La gendarmerie a pris toute sa place au sein du ministère de l'intérieur. Le cabinet du directeur général a rejoint la Place Beauvau voilà déjà six mois, dans des conditions plus que satisfaisantes. Nous mesurons chaque jour l'intérêt de cette proximité avec le cabinet du ministre, avec le directeur général de la police nationale et avec le secrétaire général de l'administration du ministère ; nous avons gagné en anticipation et en réactivité.

La loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI), qui doit donner aux forces de sécurité les moyens d'accroître leur performance dans la lutte contre l'insécurité, permettra de franchir une nouvelle étape dans la coopération entre les deux forces par l'approfondissement de la mutualisation des moyens logistiques et des capacités de soutien. Cette année, nous devons passer une vingtaine de marchés en commun. À titre d'exemples, je peux citer l'acquisition de véhicules et d'équipements automobiles communs (systèmes de caméras embarquées et de lecture automatisée des plaques d'immatriculation), la mise en place de la nouvelle structure commune de pilotage des technologies et des systèmes d'information dédiés à la sécurité intérieure – structure qui sera dirigée par un gendarme – et, enfin, la logistique des munitions, que la gendarmerie assurera prochainement en outre-mer. Lors des événements survenus aux Antilles l'année dernière, nous avons pu mesurer combien il était important de disposer sur place de soutiens bien organisés pour garantir la continuité de notre action.

Cette convergence des outils et des moyens logistiques est de nature à favoriser la coopération opérationnelle. Les systèmes conçus en commun pour les deux forces permettent d'améliorer encore une interopérabilité déjà importante. Nous devons développer une logique de complémentarité opérationnelle. Depuis mai 2009, c'est–à–dire avant même le vote de la loi, nous avons, dans le respect de l'équilibre et de l'identité des forces, recherché les complémentarités, si bien que nous avons réussi à dégager des solutions de consensus.

Ainsi, la décision de créer une direction de la coopération internationale a été prise. Réunissant en un seul ensemble les outils de la police et de la gendarmerie, elle permettra de renforcer la cohérence et la visibilité de l'action internationale du ministère.

Nous installerons le 1er juin à mon cabinet une unité de coordination pour la lutte contre l'insécurité routière (UCLIR). En toute logique, elle sera dirigée par un colonel de gendarmerie, puisque la gendarmerie nationale est présente sur 95 % du réseau routier et autoroutier.

Une unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun a été installée hier auprès du directeur général de la police nationale (DGPN), Frédéric Pechenard. Compétente sur les réseaux urbains d'Île-de-France, elle interviendra aussi sur les grandes lignes et les réseaux régionaux. Certains épisodes, comme ceux déclenchés par la vente promotionnelle de billets à un euro, nous ont montré l'importance d'une telle coordination pour rétablir rapidement l'ordre public. La commissaire de police qui commandera cette unité aura pour adjoint un chef d'escadron de gendarmerie.

Suite à l'audit sur la force d'intervention de la police nationale (FIPN) et le groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), mené par le général Parayre et le contrôleur général de la police nationale Luc Presson, une unité de coordination des forces d'intervention sera créée. Installée à mon cabinet, elle sera dirigée par le colonel, bientôt général, Cormier, assisté d'un commissaire de police.

Comme l'a précisé la loi, les gendarmes sont des acteurs à part entière du renseignement. Des gendarmes ont été placés au sein de chaque service départemental d'information générale et, au niveau central, à la sous-direction de l'information générale. L'ensemble de nos papiers et analyses porteront les sigles de la police et de la gendarmerie. Il s'agit d'éviter les doublons et de développer les synergies.

En ce qui concerne le caractère militaire de la gendarmerie, je tiens à souligner que la formation initiale, creuset de l'identité militaire, n'a pas vocation à être mutualisée.

Certes, de nombreux rapprochements sont opérés, mais il convient de conserver des spécificités. Il en va ainsi de la formation des officiers, de la participation au Collège interarmées de défense ou au Centre des hautes études militaires. De la même manière, les systèmes liés à l'organisation et à la chaîne de commandement ne sauraient être mis en commun : ces outils doivent se trouver au plus près du responsable de la force, afin que la situation puisse être suivie en temps réel et gérée de la façon la plus réactive possible. Cela n'exclut pas l'existence de passerelles et de liaisons téléphoniques ou radio permanentes.

En outre, la gendarmerie poursuit ses engagements aux côtés des autres forces armées, notamment dans les opérations extérieures (OPEX). En Afghanistan, nous sommes déployés sur la zone de Kapisa-Surobi, dans le cadre d'un dispositif militaire robuste et solide. Nous intervenons également en Haïti. En Géorgie, les gendarmes sont les seuls représentants des forces armées françaises. En retour, ces expériences nous permettent d'améliorer nos interventions en matière de sécurité intérieure : certains engagements difficiles, comme l'opération Harpie contre l'orpaillage illégal en Guyane, ont ainsi bénéficié du vécu de nos gendarmes.

La première force de la gendarmerie résidant dans son personnel, la cohésion est une condition essentielle, sinon la condition essentielle, de son efficacité. Afin de garantir l'équilibre, d'éviter les interrogations, voire les tensions, il convient de veiller à la notion de parité globale entre la police et la gendarmerie : sur l'ensemble d'une carrière, à responsabilités équivalentes, le traitement d'un policier et celui d'un gendarme doivent être globalement identiques. L'objectif est d'atteindre cette parité en 2012, grâce au plan d'adaptation aux responsabilités exercées (PAGRE) lancé en 2005 et devant se terminer fin 2012, et à la nouvelle grille indiciaire des militaires, dont les gendarmes viennent de bénéficier pour l'annuité 2010. Un premier constat en 2008 et un autre cette année ont montré qu'il y avait un progrès en la matière.

La rénovation du dispositif local de concertation au sein de la gendarmerie doit permettre de faire vivre le dialogue interne à tous les échelons, dans le respect du statut militaire. Que le ministre de la défense et le ministre de l'intérieur reçoivent successivement les représentants des gendarmes ou que le Président de la République, après les représentants des syndicats de police, reçoive le directeur de la gendarmerie accompagné de membres du Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG), confère une plus grande crédibilité à notre système de dialogue interne.

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