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Intervention de Bernard Accoyer

Réunion du 18 mai 2010 à 18h00
Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Accoyer, Président :

Une menace potentielle est parfois plus angoissante qu'un risque avéré : pour avoir exercé pendant trente ans la chirurgie, je ne peux que confirmer vos dires, monsieur Tourtelier !

Si l'on veut apaiser une anxiété, il faut expliquer, préciser, dédramatiser. La mort fait peur, parce que l'on ignore tout d'elle. La peur, c'est l'inconnu, et l'inconnu qui fait peur a trait à notre santé, à notre bien-être, à notre vie. Voilà le problème que pose le principe de précaution et qui explique qu'il soit souvent appliqué à des problèmes de nature sanitaire.

Il n'est pas question, et je m'en félicite, de revenir sur le principe lui-même, qui est une chose acquise ; en revanche, s'ouvre à nous la perspective d'en encadrer les applications. À titre personnel, je trouve que son interprétation erronée a eu des conséquences considérables dans deux domaines dont les implications technologiques et industrielles sont fondamentales.

En premier lieu, la recherche française en biotechnologies est menacée de mort. La France, qui a découvert les grands principes de la génétique et qui fut, jusqu'à récemment, leader dans ce secteur, menace de perdre pied. Aujourd'hui, les jeunes se détournent des biotechnologies, qui sont pourtant le moyen qu'a l'homme de relever les défis de l'alimentation et de la ressource en eau.

Les nanotechnologies sont également essentielles pour notre avenir, que ce soit en pharmacologie, en science des matériaux ou dans d'autres domaines d'application. Pourtant, là aussi, montent des peurs nouvelles, avec un glissement de la sphère de l'environnement à celle de la santé.

Si les grandes entreprises se sentent si peu concernées par le principe de précaution, c'est que, pour développer leurs activités dans les biotechnologies ou les nanotechnologies, elles s'implantent à l'étranger. Les PME, en revanche, qui n'ont pas cette possibilité, admettent que certains domaines leur sont interdits parce que, par nature, ils ne sont pas assurables – ce que confirme la Fédération française des sociétés d'assurance. Or personne ne peut agir aujourd'hui sans assurance. Cela signifie que ces activités quittent, plus ou moins vite, le territoire, et que les jeunes chercheurs ne s'orienteront pas vers elles s'ils souhaitent rester dans l'Hexagone. La compétitivité de notre pays est en jeu.

Il est préoccupant que quelques applications imprévues du principe de précaution, en particulier dans le domaine sanitaire, aient de telles conséquences. Auparavant, le régime était le même en France que dans les autres États membres de l'Union européenne, et l'attention générale était beaucoup moins focalisée sur la question.

Je remercie par conséquent nos rapporteurs qui, avec lucidité et courage, ont cerné des problèmes décisifs pour l'avenir de notre pays.

Nous avons un programme de travail chargé, et le séminaire parlementaire du 1er juin sera une étape très importante. Je souhaite que nous travaillions de manière consensuelle, en progressant dans la concertation et en veillant à ce que les associations, notamment environnementales, puissent s'exprimer ; c'est le meilleur moyen de dissiper les inquiétudes et de préciser le cadre dans lequel doit s'appliquer le principe de précaution.

Ce document de travail remarquable sera transmis aux parlementaires, ainsi qu'à ceux qui souhaiteront participer au séminaire, de manière à servir de base à nos discussions.

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