Le Comité économique des produits de santé est un petit organisme. Ses services permanents regroupent quatorze personnes à temps plein et le comité, lui-même, qui est collégial, rassemble dix personnes, avec voie délibérative. Outre le président et le vice-président, il comprend quatre représentants de l'État – le directeur de la sécurité sociale ou son représentant, le directeur général de la santé ou son représentant, le directeur général des entreprises au ministère de l'économie, des finances et de l'emploi ou son représentant et le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou son représentant – et, depuis la réforme de l'assurance maladie de 2004, quatre représentants des payeurs : trois représentants de l'assurance maladie obligatoire – deux de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et un représentant commun au régime des agriculteurs, la Mutualité sociale agricole (MSA), et au régime social des indépendants (RSI) – et un représentant des organismes d'assurances complémentaires, délégués par l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire (UNOCAM).
La mission principale du comité est de fixer les prix des médicaments remboursables ou les tarifs des dispositifs médicaux pris en charge par l'assurance maladie. Il est à cette fin organisé en deux sections – une section du médicament et une section des dispositifs médicaux – composées pour une part des mêmes personnes qui se réunissent à des moments différents, avec des ordres du jour différents et une configuration éventuellement différente. La fixation des prix comprend la fixation initiale et également l'évolution des prix : augmentation ou diminution.
De façon secondaire, bien que cela l'occupe pas mal de temps, le comité est chargé par la loi d'une mission générale de régulation – mais il ne s'agit pas vraiment de régulation – du marché du médicament remboursable en conventionnant les entreprises dans le cadre de la contribution de sauvegarde, organisée par la loi, aux termes de laquelle, lorsque les ventes de médicaments ont dépassé, par rapport à l'année précédente, un taux fixé par le Parlement – le taux K –, les entreprises présentes sur ce marché sont astreintes à une contribution dont elles peuvent être exonérées si elles ont passé des conventions avec le comité.
En pratique, toutes les entreprises passent des conventions avec le CEPS et ces dernières donnent lieu au versement de ristournes qui sont la contrepartie de la taxe qui n'est pas payée. Il y a une différence importante entre les deux systèmes en ce sens que la taxe a, comme toute taxe, des règles nécessairement simples pour ne pas dire simplistes, alors que la convention permet de répartir la contribution des entreprises de façon plus conforme aux orientations de la politique du Gouvernement. Par exemple, dans le système conventionnel, on exonère la croissance des génériques car cela paraît idiot de faire payer les entreprises sous prétexte qu'elles ont vendu plus de génériques alors qu'on les y encourage, et on exonère pendant un certain temps les produits les plus innovants en reconnaissance de leur caractère innovant. Le système conventionnel présente d'autres spécificités par rapport à la taxe de droit commun, mais ce sont là les deux principales.
Cette deuxième mission est accessoire par rapport à la fixation des prix, puisqu'elle n'a pas une grosse influence sur les grands équilibres de l'assurance maladie, mais elle alimente un débat conventionnel avec les entreprises, qui présente une certaine utilité.
En couplage avec cette deuxième mission, le comité est chargé d'observer le marché du médicament, de rendre compte au Gouvernement des observations qu'il peut faire et, éventuellement, de l'alerter, sans se mettre, bien entendu, à la place du comité d'alerte, si la situation lui semble appeler des mesures correctrices, y compris réglementaires ou législatives.
Au fil des ans, la loi a dévolu au comité un certain nombre d'autres activités. Il a été chargé, en particulier, de négocier la charte de la visite médicale avec l'industrie pharmaceutique. Celle-ci est maintenant remise entre les mains de la Haute Autorité de santé (HAS), à qui la loi confie le soin de la faire appliquer et de veiller à la certification des entreprises au regard de celle-ci en agréant les organismes certificateurs. La HAS, à partir de la charte, a établi le référentiel de certification qui sert aujourd'hui aux entreprises pour se mettre en conformité avec celle-ci.
Il revient également au CEPS de sanctionner les entreprises dont les publicités ont été interdites par le directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). Le comité a le pouvoir – et le devoir – de prononcer, le cas échéant, des sanctions pécuniaires à l'encontre des entreprises en infraction.
Le comité exerce ses missions en appliquant le code de la sécurité sociale, lequel contient très peu d'indications sur la fixation des prix, mais des indications importantes. Il y est, en particulier, précisé qu'on ne peut pas inscrire un médicament ou un dispositif médical qui n'apporte pas d'amélioration du service rendu s'il n'entraîne pas une économie. Autrement dit, pour inscrire un médicament, il faut ou bien qu'il y ait une amélioration du service rendu – dans ce cas, il peut être aussi cher ou plus cher –, ou bien, s'il n'y a pas d'amélioration, qu'il soit moins cher. C'est une règle de bon sens mais la France est presque le seul pays à l'avoir.
Il est également indiqué, dans le code de la sécurité sociale, que les prix sont normalement fixés par convention entre le CEPS et les entreprises. Ils peuvent être fixés autrement, notamment de façon unilatérale par le comité qui a un pouvoir réglementaire de ce point de vue. Il ne le fait jamais à l'inscription car cela n'aurait pas de sens, puisque personne ne peut forcer une entreprise à commercialiser un médicament. Donc, ou bien on se met d'accord sur un prix et c'est la voie conventionnelle, ou bien on ne se met pas d'accord et le produit n'est pas inscrit. En revanche, la possibilité de fixer les prix de façon unilatérale s'exerce parfois, bien que très rarement, lorsqu'il s'agit de modifier les prix de médicaments ou de dispositifs déjà inscrits au remboursement.
Concrètement, les entreprises qui demandent l'inscription d'un produit déposent un dossier composé de deux parties principales : une partie médico-technique destinée principalement à la commission de la transparence de la HAS et une partie économique destinée au CEPS. Les produits sont d'abord évalués par la commission de la transparence qui se prononce sur le service médical rendu, sur l'amélioration de celui-ci et sur la population ciblée par le médicament, puis le comité désigne ou non un rapporteur, selon la complexité du sujet. Celui-ci peut être soit un agent des caisses d'assurance maladie, soit un fonctionnaire, soit un retraité et doit avoir pour qualités principales d'être indépendant de l'industrie et d'être intéressé par le sujet à la fois sous l'angle pharmaceutique et sous l'angle économique. Il présente le dossier au comité qui vote. Le jeu consiste à réunir à la fois une majorité du CEPS en faveur de l'inscription, ce qui ne va pas de soi, et l'accord de l'entreprise. On considère qu'un prix sur lequel on a réussi à mettre d'accord une majorité du comité, constitué de la manière collégiale que j'ai décrite, et l'entreprise a des chances d'être un bon prix.