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Intervention de Jean Parrot

Réunion du 6 décembre 2007 à 9h00
Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Jean Parrot :

Je précise que l'Ordre des pharmaciens ne fait pas partie de la chaîne économique du médicament. Un certain nombre d'éléments relatifs à l'économie du médicament sont de la responsabilité des syndicats pharmaceutiques ou des autres acteurs de la chaîne du médicament. Cela étant, ayant la responsabilité de l'éthique et de l'ensemble de la gouvernance de la profession, nous sommes en mesure d'apporter un éclairage professionnel sur la question que vous soulevez.

L'application d'une franchise sur les boîtes de médicaments peut inciter les patients à réduire leur consommation, tout en sachant que ces derniers, comme les pharmaciens d'officine, ne sommes pas les prescripteurs. C'est le médecin qui est l'arbitre de la quantité de boîtes qui résulte de son ordonnance.

On pourrait penser que, si l'on propose une boîte de 90 unités de médicament, une seule franchise s'appliquera au lieu de trois pour trois boîtes de 30, mais cette approche est biaisée par de nombreux facteurs qui n'ont pas été perçus par les parlementaires au moment où la mesure a été présentée à l'Assemblée nationale.

Premièrement, les boîtes de 90 ne sont pas aujourd'hui réellement mises sur le marché pour la totalité des molécules destinées au traitement des maladies chroniques. Par ailleurs, il arrive aujourd'hui que les génériques présentés en boîtes de 30 soient moins chers pour l'assurance maladie que la boîte de 90 de génériques. En outre, souvent, seul le médicament princeps est vendu en boîtes de 90. Cela est très pervers car le pharmacien doit, théoriquement, telle que la loi a été votée, délivrer la boîte de 90. Or, s'il le fait, cela ne sera pas source d'économies pour l'assurance maladie puisque le prix de la boîte de 90, qui est la boîte de princeps, sera, en fin de compte, plus chère que trois boîtes de génériques du produit équivalent. C'est un premier biais par rapport au but économique recherché.

Nous en voyons un autre, dont nous avons informé les membres des commissions des affaires sociales des deux assemblées – et Mme la rapporteure, en tant que confrère en activité, y sera sensible – : sur l'ordonnance d'un patient chronique, la totalité du traitement, ne pourra pas toujours être donnée pour trois mois. Dans le cadre de l'observance et du suivi que les pharmaciens font, au mois le mois, pour accompagner les patients dans la prise de leur traitement chronique et vérifier qu'ils séquencent bien la totalité de leurs médicaments et ne « font pas leur marché » dans l'ordonnance en prenant un médicament et pas l'autre, cela leur compliquera encore plus la tâche.

Nous avons souhaité – et la profession, dans son ensemble, est très demanderesse – la mise en place du fameux dossier pharmaceutique – DP – qui est en expérimentation, depuis six mois, dans six départements. Grâce au dossier pharmaceutique, le pharmacien pourra désormais connaître, au moment de la dispensation, tous les médicaments que le patient a pris, toutes pharmacies confondues, dans les quatre mois précédents ; ainsi le biais lié au recours aux boîtes de 90 disparaîtra.

Lors de la mise en place du DP, nous avions prévu de faire uniquement le relevé de trois mois de traitement. A cause des boîtes de 90, nous avons porté ce délai à quatre mois pour bénéficier d'un mois supplémentaire, afin d'être sûrs que ne nous échappe pas la dispensation d'une boîte de 90.

Comme vous le voyez, madame la rapporteure, les réponses à votre question peuvent être multiples. C'est seulement après un temps d'application d'une, deux, voire trois années, que nous saurons si le but recherché, qui est de davantage responsabiliser le patient, sera atteint.

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