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Intervention de Jean-Paul Bacquet

Réunion du 7 mai 2009 à 10h00
Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Bacquet, maire de Coudes :

Monsieur le président, vous avez raison : le sujet des sapeurs-pompiers est un sujet passionnel.

La départementalisation était nécessaire, en raison des inégalités territoriales. Toutefois, elle est devenue très rapidement une centralisation compétitive d'un département à l'autre, s'agissant des jours de garde et de travail, des investissements, etc. Il suffit d'assister à un congrès de sapeurs-pompiers pour s'en rendre compte et pour apprécier les conséquences que peut avoir cette compétition sur les bons de commande.

N'oublions pas que ceux qui paient ne décident pas. Pour autant, cela ne remet pas en cause notre engagement de fournir à nos concitoyens le service d'incendie et de secours le plus efficace possible. Il n'en reste pas moins que cette situation soulève la question de la responsabilité politique de celui qui paie alors qu'il n'est pas le décideur.

N'oublions pas que les communes paient, même si leur contingent a été gelé – ce gel est d'ailleurs relatif, dans la mesure où le contingent varie en fonction de l'inflation. On s'est du reste demandé s'il ne fallait pas remplacer le contingent des communes par une réduction de leur dotation globale de fonctionnement, la DGF. En tout cas, les maires deviennent souvent des otages dont on se sert pour empêcher que le service passe sous la coupe du conseil général. Les maires ont-ils pour autant le droit de s'exprimer ? Non, ils n'ont pas droit à la parole, et là est le véritable problème.

On a parlé de la sécurité sociale ; on peut aussi évoquer les assurances – il s'agit de serpents de mer qui ressortent tous les vingt ou trente ans. La question qui se pose n'est pas de savoir si l'on transfère une charge du contribuable départemental ou communal au contribuable assuré social, mais de savoir si l'ensemble des dépenses est justifié. C'est en cela que je m'associe à votre démarche responsable.

Je ne connais pas de maire qui dise qu'il faut supprimer les sapeurs-pompiers... encore que certains maires de grandes villes seraient tentés si, demain, l'offre existait, de privatiser les services de sapeurs-pompiers. Cela se fait déjà à l'étranger : Véolia intervient dans d'autres pays sur des sites industriels. Quoi qu'il en soit, vous avez raison, monsieur Ginesta, le payeur n'est pas le décideur.

Comme je suis médecin, je me sens visé lorsque l'on parle de la désertification médicale. Mais les élus gagneraient à être un peu plus responsables – et ce sera ma seule allusion politique : quand je dépose un amendement coercitif, la droite comme la gauche le refusent. Que chacun assume ses responsabilités !

Qui définit la réglementation ? La Fédération. Je siégeais au sein d'une commission, mais je n'y vais plus parce que ce n'est plus la peine. Les décisions prises sont sûrement toutes justifiées, mais on n'en analyse jamais les conséquences financières et juridiques. Actuellement, l'Association des maires de France étudie le projet de référentiel national de défense contre l'incendie, ce qui suppose la définition d'une nouvelle assise juridique de la réglementation. Eh bien, il faut s'attendre à ce que demain se retrouvent devant les tribunaux des élus qui n'auront pas répondu à un projet de référentiel qu'ils n'auront pas élaboré !

L'association des maires du département du Puy-de-Dôme a appris que le Puy-de-Dôme était représenté au sein de cette commission. Personne ne le savait, pas plus les conseillers généraux que président du conseil d'administration du SDIS. Pourtant, nous faisons partie des départements témoins. Nous avons tout de même de quoi nous interroger sur la façon dont nous pouvons assumer nos responsabilités politiques !

Par ailleurs, en quoi un SDIS a-t-il besoin d'un architecte, d'un service de communication, de photographes ?

J'évoquerai maintenant l'évolution des carrières. J'ai été président du SDIS de mon département. En fonction de l'effectif, il y a eu un colonel, puis deux, puis trois… Que fera-t-on lorsque l'on n'aura promu que des colonels âgés de 42 ans ? On va créer le grade de général ? Cela a été demandé à l'Assemblée nationale, il y a quelques mois.

La gouvernance est le vrai problème. Il y a deux ans, avant les élections de 2007, les sapeurs-pompiers avaient manifesté dans la rue en tenue et avaient frappé des policiers en tenue : double faute, mais aucune peine ! Mon ami Jean Proriol et moi-même avons dit notre indignation au président Sarkozy, qui était alors ministre de l'Intérieur. Avant cette entrevue, j'avais tenu les propos suivants au nouveau directeur de la Sécurité civile : « Monsieur le préfet, vous ferez comme vos collègues : pendant six mois, vous allez vouloir réformer et au bout de six mois, vous aurez compris que c'est une telle poudrière que vous vous dégonflerez et vous compterez les jours en attendant que votre mandat se termine pour ne pas brûler votre carrière ». En fait, il faudrait nommer un préfet en fin de carrière, qui, lui, au moins, pourrait prendre les décisions qui s'imposent.

J'ai déposé une proposition de loi visant à faire passer les sapeurs-pompiers professionnels dans la fonction publique d'État – ce qui m'a valu un succès extraordinaire lors d'un certain congrès des sapeurs-pompiers. Cela permettrait de disposer d'une grille salariale claire, et de savoir qui embauche et sur quels critères. En effet, d'un département à l'autre, les inégalités sont encore plus criantes qu'avant la départementalisation.

Les sapeurs-pompiers volontaires donnent une image forte. Toutefois, même en cas de recrutement, la durée de leur engagement diminue. Il y a là de quoi nous inquiéter.

Enfin, si les conseils d'administration donnent lieu à des débats très animés, il n'en reste pas moins que l'on sait à l'avance ce qui sera voté. Dans ces conditions, où est le débat démocratique ? Il y a d'un côté ceux qui ont un langage technique, voire technocratique, qui cherchent à culpabiliser ceux qui ne voudraient pas voter les crédits, et, de l'autre, des gestionnaires sains, responsables malgré les menaces auxquelles ils sont soumis.

Monsieur Derosier, je vous rappelle que c'est un de vos concitoyens qui a organisé à Marseille le premier congrès national des présidents de SDIS. Alors que j'avais fait remarquer que, dans la salle, il y avait plus de colonels que d'élus, on m'avait répondu qu'il s'agissait d'« experts ». Et, en définitive, ce sont les colonels qui ont décidé ce que nous devions décider.

J'ai entendu parler d'« injonctions » de l'État. Mais lesquelles ? Quand il faut que le président Doligé réunisse les élus des conseils d'administrations des SDIS avant le conseil d'administration de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, je me dis qu'il y a un dysfonctionnement.

Encore une fois, le problème est lié à un manque de responsabilité politique. Nous n'assumons pas notre responsabilité politique, que ce soit au niveau de l'État ou ailleurs. Qu'on le veuille ou non, tant que le pouvoir politique ne sera pas assumé, nous ne pourrons pas avancer.

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