Je vous remercie, monsieur le président, de me donner la parole. Au risque de manier le paradoxe, ces rappels au règlement nous ont permis de beaucoup progresser dans la définition de la vraie nature de votre démarche.
Nous avons, grâce à votre accord, obtenu une suspension de séance pour réunir notre groupe et nous avons longuement débattu. Nous sommes arrivés à la conclusion que, sous couvert de prétendre revaloriser le rôle du Parlement et d'accroître les pouvoirs de l'opposition, en réalité, pied à pied, millimètre par millimètre, vous n'avez qu'un objectif : augmenter les pouvoirs de la majorité.
Nous aurons l'occasion de voir, notamment sur les dispositions relatives aux résolutions, que le texte attribue en quelque sorte un droit de veto au Premier ministre sur les projets de résolution. Nous avons compris qu'en contrepartie d'une limitation de façade du recours au 49-3, qui n'est, dans la pratique, jamais utilisé qu'une fois par session, vous allez porter atteinte au droit d'amendement.
En réalité, vous souhaitez instaurer une sorte de 49-3 permanent. Et vous utilisez, dès ce soir, pour porter atteinte à nos capacités d'amendement, des procédures dont nous avons abondamment démontré – et le Conseil constitutionnel en fera son miel – qu'elles ne tiennent pas.
Vous avez notamment invoqué l'article 127, alinéa 3, de notre règlement. Or nous avons fait la démonstration qu'il ne s'appliquait pas, sauf à considérer que l'ensemble du projet de loi, en tout cas une bonne partie de celui-ci, notamment celle qui prévoit que les amendements doivent être déposés par écrit, etc., ne relève pas d'une loi organique. Par conséquent, l'argument ne tient pas.
Le parallèle établi par le président Warsmann entre la procédure d'irrecevabilité au titre de l'article 40 de la Constitution et celle que vous avez tenté d'utiliser ce soir pour balayer un millier de nos amendements ne tient pas non plus.
Monsieur le président, nous vous avons demandé de citer d'autres cas dans l'histoire parlementaire où des milliers d'amendements auraient été écartés au titre de l'article 127, alinéa 3, de notre règlement. Vous n'avez pas été en mesure de le faire.
Nous vous avons demandé quels étaient les critères objectifs, jurisprudentiels notamment, sur lesquels vous vous étiez appuyé pour appliquer de façon drastique – industrielle dirai-je – cet article 127, alinéa 3. Vous n'avez pas été en mesure de nous en présenter, pas plus que le Gouvernement, pas plus que le président de la commission des lois.
Par conséquent, nous constatons que nos arguments étaient fondés, que vous n'avez répondu à aucune de nos questions. Dès lors, nous sommes encore plus fondés à vous demander de revenir sur votre décision et de remettre en discussion, en séance publique, les amendements que vous prétendez écarter et qui ont été présentés, discutés et mis aux voix en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)