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Intervention de Anne Baldassari

Réunion du 9 avril 2009 à 10h00
Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances

Anne Baldassari, directrice du musée national Picasso :

S'il est toujours délicat, pour un musée comme le nôtre, de porter un jugement sur la situation d'autres établissements dont l'histoire est par définition différente, il importe selon moi d'abandonner la logique consistant à raisonner en termes macro-économiques. J'entends parler de « mutualisation », de « gestion directe », de « valeur ajoutée », d' « économies d'échelle », mais les collections sont des objets concrets et nous sommes confrontés à des contraintes élémentaires de fonctionnement qui impliquent une gestion au plus près du terrain.

Sans doute la crise économique que nous connaissons pourrait-elle être l'occasion de repenser les catégories d'analyse de l'économie culturelle de manière à raisonner d'abord à partir du « micro » pour ensuite aller vers le « macro » ; c'est en effet à partir de la proximité physique des oeuvres qu'il convient de penser la gestion.

Comme on disait dans les années soixante-dix, « small is beautiful » : et c'est de cela, paradoxalement, que dépend notre rayonnement européen et international. Toute la jeunesse d'Europe vient étudier au musée Picasso ! Telle me semble être la meilleure « culture d'entreprise » que nous puissions promouvoir !

Par ailleurs, comme l'a dit M. le secrétaire général, nous nous voyons attribuer des personnels de la DMF et de la RMN qui ne nous reconnaissent pas comme étant au sens strict leur employeur et dont les carrières sont administrées parallèlement selon des appartenances et dans des hiérarchies parfois incompatibles les unes avec les autres. Le système de corps ou de filières souvent limités à des plans de carrière déjà obsolètes et formant parfois des « castes », est rarement ancré dans la culture professionnelle des sites de détachement ou d'affectation des agents. Pourtant c'est bien à partir de ceux-ci, précisément, qu'une mobilisation effective des énergies est possible – laquelle, d'ailleurs, conditionne aussi notre travail sur le plan international.

Pour revenir au financement du chantier et à notre politique de recherche de ressources propres, il faut préciser que les 12 millions d'euros dont je vous ai parlé précédemment ne proviennent pas du grand mécénat français mais sont exclusivement dus à notre expertise pour créer des expositions originales et de très haute tenue scientifique et culturelle avec nos partenaires internationaux. En l'occurrence, ils proviennent plus précisément de quatre projets menés en 2008 avec Madrid, Abou Dabi, Tokyo et Brisbane. Nous avons chaque fois travaillé avec les ministères de la Culture et des Affaires étrangères des pays concernés (en Espagne ou aux Émirats Arabes Unis), comme avec de grandes agences gouvernementales (en Australie), ainsi que de grands mécènes privés (notamment au Japon). Les ambassades de France à l'étranger ont joué un rôle essentiel dans ces montages. Nous sommes ainsi intervenus en Espagne à l'occasion des commémorations de l'invasion napoléonienne et au Japon, dans le cadre des célébrations des 150 ans de la présence française.

Pendant la fermeture prochaine du musée, nous organiserons un véritable tour du monde d'environ 200 oeuvres de notre collection - qui se compose de 5 000 oeuvres de Picasso et de 200 0000 pièces d'archives dont des photographies et des manuscrits – témoignant non seulement de l'oeuvre de Picasso mais aussi de la vie artistique et culturelle du XXe siècle, d'Apollinaire à Diaghilev, Stravinski, Massine, Brassaï, Lacan ou Clouzot. Le capital des oeuvres concernées par ce tour du monde oscille selon l'importance des expositions entre 1 et 2 milliards d'euros. Des protocoles de suivi, de restauration et d'encadrement ont été mis en place pour un budget en investissement de 1 million d'euros que nous avons financé sur nos crédits mécénat et qui a, de plus, bénéficié d'une aide exceptionnelle de la direction des Musées de France (DMF).

Nous travaillons actuellement à la mise en place de ce programme international qui commencera à l'Atheneum Museum d'Helsinki au mois de septembre et se poursuivra au Musée Pouchkine de Moscou, puis à la Kunsthalle de Hambourg, au Seattle Art Museum de Seattle, au Museo Oscar Niemeyer de Curitiba (Brésil), au De Young Museum de San Francisco, et à la National Gallery of New South Wales de Sydney. Nous travaillons également à un autre circuit d'expositions en Chine et au Japon autour de projets plus spécifiques. Ces actions nous permettront de recueillir une somme équivalente à celle dont nous disposons déjà et qui garantira la conduite de notre chantier à son terme. Ces prévisions n'exonèrent pas l'État d'apporter la contribution attendue au financement du chantier du musée Picasso.

J'ajoute, enfin, que nous accomplissons ce travail dans le cadre d'une très petite équipe qui compte globalement une vingtaine d'agents scientifiques, administratifs et techniques.

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