Monsieur le président, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, d'emblée, je féliciterai les auteurs du rapport, dont les conclusions recueillent notre accord et qui vient à point nommé, dans un contexte européen que vous avez rappelé, mais aussi à quelques jours du sommet France-Afrique invité par le Président de la République à la fin de ce mois.
Vous avez tout dit. Je me contenterai donc de rappeler que les APE avaient été, à l'origine, conçus autour de quatre principes : ces accords devaient être asymétriques, être liés au développement, favoriser l'intégration régionale et entrer dans le cadre multilatéral de l'OMC.
Je reprends à mon compte le terme d'échec, employé par Hervé Gaymard notamment. Ce n'est pas simplement un échec du point de vue du calendrier et du faible nombre d'accords signés – en fait, un seul ! – ou même paraphés. Le plus grave, vous l'avez tous dit, c'est le climat d'incompréhension, de défiance, de malaise que ces accords ou projets d'accord ont suscité, notamment en Afrique. J'ai pu m'en rendre compte moi-même lors de mes nombreux voyages dans des pays très différents.
Monsieur Fruteau, avec d'autres, vous avez dit les raisons pour lesquelles la situation est aussi déplorable, la principale étant sans doute que l'Union européenne a abordé ces négociations dans un esprit excessivement, voire exclusivement, commercial. Ce n'était pas une mauvaise idée, au départ, de parler d'accords de partenariat économique. D'ailleurs, l'économique ne recouvre pas que le commercial. D'autres sujets que l'abaissement des barrières tarifaires sont d'un grand intérêt. Je pense à la facilitation de l'investissement dont l'Afrique et les pays ACP ont tant besoin ; à toutes les dispositions permettant d'améliorer le climat des affaires dans ces pays, aussi bien pour les investisseurs locaux que pour des investisseurs étrangers. J'ai en tête, évidemment, le discours du Cap du Président de la République, concernant le développement de l'Afrique par le secteur privé. Mais, encore une fois, les APE sont passés de l'économique au commercial.
Vous avez rappelé que les contraintes liées à l'intégration régionale ont été sous-estimées. Honnêtement, à voir le temps qu'il a fallu à l'Europe pour réussir une intégration régionale, nous aurions pu être plus patients et compréhensifs à l'égard des pays ACP, qui doivent fournir les mêmes efforts. Une autre cause de l'échec est la sous-estimation, encore, des capacités humaines de négociation de ces pays. Et puis, il aurait fallu mieux lier les mesures d'accompagnement aux besoins résultant de l'ouverture commerciale. Cela aurait nécessité une approche de cet accompagnement plus qualitative que quantitative.
De ce point de vue, Alain Joyandet et moi-même travaillons à faire évoluer l'utilisation des fonds du FED. J'ai été très intéressée par les idées d'Hervé Gaymard pour la mobilisation de ces ressources autour d'un certain nombre de priorités.
Dans le même esprit, je suis intéressée, et je sais que vous l'êtes également, par les progrès récents de la coordination entre les agences de développement des différents pays européens en Afrique. De ce point de vue, l'Agence française de développement joue un rôle moteur.
À propos d'accompagnement, je souhaite souligner le rôle de l'aide au commerce, pour laquelle la France s'est dotée, en juin 2009, d'une nouvelle stratégie. Cette aide vise à faire du commerce un moteur de développement avec, de la part de la France, des engagements chiffrés, qu'elle souhaite voir repris à l'échelle européenne et qui accompagnent, là encore, la mise en oeuvre, si elle peut avoir lieu, des APE.
Cette stratégie sur l'aide au commerce se décline en deux axes d'intervention prioritaire : le premier est l'appui au développement de politiques commerciales régionales, le B-A-BA en quelque sorte de l'intégration régionale ; le second est le développement d'une offre compétitive, aussi bien en matière agricole qu'en matière industrielle.
Nous avons fixé un objectif collectif d'augmentation des efforts financiers français de plus de 50 % par rapport à la période 2002-2005, pour porter l'aide au commerce à 850 millions d'euros par an à partir de 2010. Concrètement, vous et moi l'avons vu sur le terrain, ces fonds permettent de renforcer les capacités des acteurs publics et privés, de les aider à être plus productifs, plus compétitifs, tant en matière d'infrastructures que de produits exportables.
Partant de ce malaise politique et de cet échec, vous m'avez interrogée sur les initiatives qui peuvent être prises par la France en particulier. Alain Joyandet et moi-même avons proposé à la Commission européenne, tant au commissaire au développement qu'au commissaire au commerce, de refonder de manière structurante les négociations des APE. Je reprends complètement à mon compte les termes d'imagination et de volontarisme employés par Hervé Gaymard.
En fait, la plupart des propositions sont contenues dans le rapport. Nous y avions d'ailleurs un peu travaillé. (Sourires.) Sans les reprendre dans le détail, j'en indiquerai les principaux axes.
S'agissant de l'aspect commercial, nous proposons de mieux prendre en compte le niveau de développement des pays ACP en offrant davantage de flexibilité. Concrètement, nous suggérons d'accroître le niveau d'asymétrie dans l'ouverture commerciale en faveur des pays ACP, en abandonnant la référence a priori à une limite de 80 % de la part de nos partenaires. Aucun texte, aucune jurisprudence ne nous l'impose.