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Intervention de Jean Gaubert

Réunion du 18 mai 2010 à 15h00
Débat sur l'application de la loi relative à la modernisation de l'économie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Gaubert, co-rapporteur de la commission des affaires économiques, pour l'application de la loi :

En effet, monsieur Brottes, on ne peut pas parler de concurrence, et les Parisiens le savent mieux que d'autres – je vois Patrick Bloche opiner du bonnet.

Autre objectif important : la baisse des prix. Le résultat est sujet à débats : l'INSEE estime qu'ils ont augmenté de 0,4 % ; à un moment, le Gouvernement disait qu'ils avaient baissé de 0,65 %, mais vous avez diminué vos ambitions, monsieur le secrétaire d'État, en déclarant hier que la baisse était de 0,2 %. En tout état de cause, je vous rappelle que cela s'est passé dans un contexte pratiquement déflationniste, où les produits agricoles étaient à la baisse, ce qui aurait donc dû aider à tirer vers le bas les prix dans la grande distribution. Or cela n'a pas été le cas.

Nous devons également nous interroger sur le développement des marques de distributeurs. Certes, en développant ces marques, les grandes surfaces ont repris des forces par rapport au hard discount, mais je tiens à attirer votre attention sur un fait, monsieur le secrétaire d'État chargé des PME : plus les marques de distributeurs sont nombreuses, moins le sont les petites PME indépendantes de la grande distribution. En effet, sans marques, une entreprise risque de ne pas vivre très longtemps. Une telle évolution pèse sur l'avenir de ces entreprises, qui se verront déposséder – on l'a déjà vu dans plusieurs cas – de leur process de fabrication au profit de la grande distribution, parfois sous prétexte de contrôle de qualité.

Les contrôles que j'ai effectués avec Jean-Paul Charié – que nous regrettons tous – se sont déroulés dans de bonnes conditions, mais nous avons noté que nous vivons encore, tout autant qu'avant sans doute, dans une atmosphère de suspicion et de peur. Comment qualifier autrement ce que nous avons observé ? Dans le rapport, nous avons signalé que, dans plusieurs départements, des entrepreneurs ont refusé de nous rencontrer avec le préfet, et qu'ils ont appelé leur député pour lui dire qu'ils voulaient bien nous rencontrer, mais pas dans ces conditions, qu'ils refusaient en tout cas que leur nom apparaisse. Cela dépeint l'ambiance ! De même, on nous a montré des factures, mais avec interdiction de les photocopier. J'ai encore en mémoire les en-têtes des distributeurs en cause. Les entreprises concernées n'étaient pas seulement des PME, il y avait aussi des noms très connus. Un groupe international est même venu me voir depuis la fin de ce travail pour me montrer comment s'opèrent les réfactions de prix.

Enfin, nous devons continuer d'avancer sur les règles de la concurrence. Pour être libre et non faussée, il faut que la concurrence soit équilibrée. Or elle ne l'est pas aujourd'hui parce que, en face de quelques grandes centrales d'achats, l'offre est éclatée. Il faudra se poser la question du regroupement de l'offre. À cet égard, il faut être attentif à ce qui se passe autour de nous en Europe. Je ferai deux comparaisons. Quand on a interdit à la production laitière française de continuer de pratiquer les prix de référence, au nom de la concurrence imposée par Bruxelles, on a complètement oublié de regarder ce qui se passait aux Pays-Bas et au Danemark : 80 % du lait aux Pays-Bas et 90 % au Danemark – ainsi que 70 % de la production porcine dans ce denier pays – sont vendus par le même opérateur, ce qui ne semble poser de problème à personne, en particulier pas à la Commission de Bruxelles.

D'autre part, en matière de fruits et légumes, on a constaté que l'Allemagne n'avait pas eu besoin de la directive Bolkestein pour comprendre qu'il est impossible d'appliquer aux salariés étrangers un statut différent de celui du pays où ils travaillent, mais qu'il est possible d'acheter à vil prix des prestations de service dès lors que c'est l'opérateur qui paye les salariés. En ce qui concerne la crise des fruits et légumes, il ne faut pas parler que des différences de salaires en ce qui concerne la concurrence avec l'Allemagne. Il faut aussi évoquer les effets du choix qu'a fait la France en 2003 en matière de répartition des primes dans le cadre de la nouvelle politique agricole commune : en France, nous avons gardé le système « tu en avais, tu en auras » – les céréaliers auront des primes parce qu'ils en avaient déjà –, « tu n'en avais pas, tu n'en auras pas » – les légumiers n'avaient pas de primes, ils n'en auront donc pas. Les Allemands, eux, n'ont pas adopté ce tel système, et leurs légumiers bénéficient de primes européennes, ce qui ajoute aux distorsions de concurrence. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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