« Le visage est l'image de l'âme », écrivait Cicéron au Ier siècle avant Jésus-Christ. En tout temps et en tous lieux, priver un homme ou un groupe d'hommes de son image, de son visage, n'a jamais conduit à autre chose qu'à l'exclure de la communauté humaine.
Substituer une étoile, un triangle ou un matricule à un visage n'est pas autre chose que vouloir détruire l'identité de l'homme. Masquer son visage à l'autre, c'est s'exclure de ses semblables.
Privez-moi de ce visage et je ne serai rien. Privez l'enfant du visage de sa mère dans la rue et il devient orphelin à côté d'une ombre.
Notre société a mené un dur combat durant tout le XXe siècle en faveur de l'émancipation des femmes, pour faire évoluer leur condition et coller à la réalité de l'égalité, une des valeurs cardinales de notre République.
Ma grand-mère, ma mère, moi-même, nous nous sommes réjouies des progrès accomplis. Or, alors que j'espère, pour mes filles et mes petites-filles, un monde plus juste encore, voilà que s'impose aujourd'hui de débattre ici, dans la plus sacrée de nos enceintes, du voile intégral.
Certains nous accusent de stigmatiser, d'exclure, d'attenter à la liberté de conscience. Ne croyez-vous pas au contraire, mes chers collègues, que, au nom de la tolérance – en réalité, une faiblesse laxiste –, en ne réagissant pas, nous contribuerions à stigmatiser, à renier les acquis des femmes ?
Aurions-nous la mémoire courte ? Rappelez-vous qu'Élisabeth Badinter a débuté son audition par ces mots : « Je commencerai par rappeler un souvenir […] : le choc ressenti la première fois que nous avons vu à la télévision, il y a à peine dix ans, les femmes fantômes d'Afghanistan. L'image de ces femmes enfermées dans leur burqa, un mot qui nous était à l'époque inconnu, est à tout jamais liée aux talibans, à la lapidation, à l'interdiction de l'école pour les fillettes, en bref, à la pire condition féminine du globe – et, en ce domaine, la concurrence est féroce. »