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Intervention de Daniel Paul

Réunion du 6 mai 2010 à 15h00
Engagement national pour l'environnement — Article 21

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Paul :

L'article 21 aborde le volet financier. Il s'agit d'une des principales carences de ce texte, ce qui justifie certainement le peu d'heures consacrées à ce débat. À quoi bon y passer trop de temps s'il n'y a pas les financements pour mettre en place les mesures envisagées ?

Le report modal progressif du transport routier vers le transport par rail ne peut devenir réalité que si deux conditions sont réunies : le développement d'une offre alternative réelle et le renchérissement du prix du transport routier par rapport au rail ou au transport collectif. Dans ce cadre, l'internalisation des coûts de la route est essentielle. Mais il semble que cela ne soit pas votre volonté car non seulement la taxe poids lourds est reportée, mais les véhicules de plus de 24 tonnes sont autorisés à circuler. Vous reconnaîtrez tout de même, monsieur le secrétaire d'État, que ces deux éléments envoient des signaux contradictoires par rapport aux conclusions issues des tables rondes de 2007.

L'écotaxe était un engagement clair, sa portée avait néanmoins été affaiblie par l'introduction de nombreuses dérogations. Son application a déjà été reportée à deux reprises. Elle est maintenant annoncée pour 2012, soit l'année de l'élection présidentielle.

De plus, les arguments avancés pour justifier le report laissent perplexe. Officiellement, ce délai est lié aux difficultés rencontrées pour calculer le kilométrage des poids lourds. Étonnant, lorsque l'on sait que le même dispositif est en vigueur en Allemagne depuis le 1er janvier 2005. Décidément, l'Europe des transports, ça ne fonctionne pas très bien !

Sans cette taxe, seule de nature à s'appliquer à tous les camions d'Europe en transit en utilisant la géo-localisation, ce sont les pavillons étrangers, de plus en plus unités délocalisées des groupes français, qui vont effectuer les acheminements intérieurs en profitant de la récente ouverture au cabotage. Ils le feront avec un dumping tarifaire légitimé par une fiscalité absente à leur égard sur le territoire français.

C'est une très mauvaise nouvelle pour la société, qui doit organiser un report modal vers les modes écologiquement vertueux. D'autant que ce report est accompagné de l'annonce, par le Président de la République et le ministre de l'agriculture de la pêche et de l'alimentation, de l'extension de l'autorisation de circulation des camions à 44 tonnes sur les routes de France. L'argument utilisé a le mérite de la clarté : « améliorer les gains de productivité et la compétitivité du transport routier de marchandises rapportés au prix de revient de la tonne transportée ».

Plutôt surprenant, à l'heure où, pour engager une mutation des logiques économiques, environnementales et sociales de la société, il est nécessaire, comme l'avait retenu la négociation du Grenelle de l'environnement, d'aller vers le juste coût du transport en internalisant les coûts externes et d'usage d'infrastructure supportés par la société.

C'est dans cette logique que nous présentons un amendement proposant la mise en place d'une majoration de péage en zones sensibles afin de financer des projets d'infrastructures alternatifs à la route pour les massifs pyrénéens et alpins, comme l'autorise la directive Eurovignette II.

C'est également dans cette logique que nous avions demandé d'intégrer dans ce texte la nécessité pour la France d'être à l'initiative, au niveau européen, d'un mouvement visant à la révision de la directive Eurovignette afin d'intégrer les coûts externes liés au transport, ainsi que l'affectation des revenus de cette tarification à des projets liés au développement durable des transports .

Vous nous aviez répondu, monsieur le secrétaire d'État, que vous étiez d'accord sur le principe, mais vous aviez mis en avant l'isolement de la France sur cette question. J'ai une bonne nouvelle, ou plutôt une mauvaise, une très mauvaise nouvelle. Il semble que la France ne soit plus isolée : elle a rejoint le groupe des pays qui ne souhaitent pas vraiment changer durablement le schéma des transports existants.

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