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Intervention de François Grosdidier

Réunion du 4 mai 2010 à 21h30
Engagement national pour l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Grosdidier :

Monsieur le ministre d'État, vous avez parlé à propos des lois Grenelle de « monument législatif », à juste titre. Avec cette loi, nous construisons un nouvel étage, alors que l'édifice a déjà produit de puissants effets avant même d'être achevé.

Cette oeuvre écologique, le Président de la République l'a voulue, annoncée et défendue. Nicolas Sarkozy est le Président le plus écologiste que la République a connu. Cela étant, ses deux prédécesseurs n'étaient pas totalement insensibles à l'écologie.

Votre bilan, monsieur Borloo, et celui de vos secrétaires d'État, qui sont des femmes d'intelligence, fidèles à leurs convictions, est déjà au moins cent fois supérieur à celui de Dominique Voynet ou à celui d'Yves Cochet.

Je comprends la crainte des Verts de laisser capter leurs thèmes de prédilection. Je comprends aussi le dépit des socialistes, toujours écologistes dans l'opposition et productivistes au pouvoir. Nous, nous sommes raisonnablement écologistes dans l'opposition et nous le restons au pouvoir, même si c'est plus difficile de l'être au pouvoir que dans l'opposition. En matière d'écologie, les travaux pratiques sont aussi plus difficiles que la théorie.

Le grand débat du Grenelle a d'abord été une formidable réussite conceptuelle, réconciliant économie et écologie, développement et environnement. Quand le Président de la République conditionne la taxe carbone à l'adoption d'un dispositif européen incluant une taxe aux frontières, dès lors que le Conseil constitutionnel décide de l'appliquer aussi aux industries déjà soumises aux quotas de C02 et exposées à la concurrence mondiale, il est et il reste dans l'esprit du Grenelle. Nous ne devons pas provoquer le transfert massif de nos industries dans des pays moins contraignants. Et l'emploi, et la planète y perdraient.

Dans le consensus comme dans l'adversité, l'exécutif tient le cap du Grenelle. Je le dis librement, comme j'indique aussi que le Parlement représente bien, peut-être trop bien, les contradictions de la société française, contradictions qui s'expriment à travers les amendements parlementaires.

Grâce à vous, grâce à nous, l'éolien a triplé en France et le photovoltaïque, sextuplé. Il faut continuer, même s'il convient d'ajuster. Il fallait des incitations extrêmement fortes pour enclencher le mouvement et, contrairement à certains collègues, je ne les juge pas scandaleuses. Cela étant il n'est pas absurde de les moduler ou de les modérer, une fois le mouvement lancé, pour obtenir le rythme et les modalités souhaitables sur le long terme.

Pour autant, certains amendements, pas tous, sont excessifs. Nous sommes à un tournant et, dans un virage, mieux vaut ralentir doucement que de freiner trop brutalement. Ni les changements de comportement ni l'émergence de nouvelles filières économiques ne peuvent supporter de stop and go.

Je désapprouve certaines restrictions trop fortes ou injustifiées, comme la classification des éoliennes en ICPE – installations classées pour la protection de l'environnement – ou encore le seuil minimum. Les points de vue se rapprochent ; je m'en félicite et j'espère qu'ils se rapprocheront encore au cours de ce débat. Toutefois il ne faut pas tomber dans la caricature. Les commissions n'ont pas retenu les amendements les plus excessifs et ont avancé sur le sujet controversé des éoliennes.

Sur le fond, je crois qu'il faut rapprocher la production de la consommation et privilégier les circuits courts.

Franchement, les lignes à haute tension sont-elles plus belles que les éoliennes ? Il est vrai qu'elles ne mobilisent jamais les retraités d'EDF ou de l'industrie pharmaceutique reconvertis dans la défense sélective des paysages. Contestées pour leur esthétique – c'est subjectif – et pour leur irrégularité – c'est objectif –, les éoliennes sont le maillon faible des énergies renouvelables. Elles sont devenues les victimes expiatoires des écolo-sceptiques qui ont peut-être avalé trop de couleuvres depuis 2002. Les négationnistes du réchauffement climatique et même de l'épuisement des ressources se sont déchaînés ces derniers mois dans les médias et sur internet. Je débattais, il y a un mois, avec l'un d'eux qui m'expliquait que les réserves de pétrole étaient bien plus importantes qu'on ne le pensait : il suffisait de forer plus profond. On voit le résultat aujourd'hui en Louisiane !

Les écolo-sceptiques ont fourni une trop belle occasion aux grenello-sceptiques de ne plus parler que des éoliennes pour faire croire abusivement, avec une parfaite mauvaise foi et même une grande malhonnêteté intellectuelle, à un effondrement du Grenelle. La polémique alimente la chronique et masque le débat de fond. Si j'en juge par les titres de la presse quotidienne de ce matin, l'arbre de l'éolien, devenu arbrisseau, risquerait de cacher la forêt du Grenelle.

Or la révolution du Grenelle est colossale. Elle modifie en profondeur la société française et de façon irréversible. Elle touche le bâtiment, les transports, la consommation, l'urbanisme, la biodiversité, la démocratie locale et l'emploi. L'énergie n'en est qu'un volet, et l'éolien n'est qu'une lame du volet, intéressante, mais bien moins que la biomasse, par exemple.

Ne passons pas à côté de l'essentiel.

Paradoxalement, je n'aurai parlé que du sujet dont on parle, hélas trop, au détriment de tous les autres sujets. Toutefois, en cinq minutes, je ne pouvais pas embrasser ce monument législatif que nous construisons ensemble.

Je pense, comme le rapporteur Serge Grouard, que chaque député qui votera ce texte pourra en tirer une fierté particulière et légitime. Nous serons fiers d'avoir, avec vous, monsieur le ministre d'État, fait oeuvre utile pour les générations futures. Nous aurons légiféré durablement en faisant nôtre la parole de Saint-Exupéry : « Nous n'héritons pas la Terre de nos parents, nous l'empruntons à nos enfants ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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